Et si l’entreprise ARM, surnommée la Suisse des semi-conducteurs, était partagée entre les grands fabricants de puces ? C’est la piste soutenue par Qualcomm, qui juge que cela permettrait de garantir sa neutralité et protéger son savoir-faire, afin que tout le monde puisse en profiter.

Si aucune entreprise ne parvient à prendre le contrôle d’ARM, pourquoi ne pas se partager le contrôle de cette société britannique, de façon à garantir la neutralité dans le marché des semi-conducteurs ? C’est la piste que trace le patron de Qualcomm, Cristiano Amon, au Financial Times, dans un échange publié le 30 mai.

La suggestion du PDG de Qualcomm, un groupe dont la spécialité est la production de composants électroniques pour l’industrie des télécommunications et le secteur de l’informatique, vient alors que la tentative du rachat d’ARM par Nvidia a fini par échouer début 2022. Des craintes en matière de concurrence étaient apparues ces derniers mois, jetant une ombre sur la réussite du deal.

Et Qualcomm serait prêt à mettre la main au portefeuille, avec d’autres. ARM « est un actif très important et c’est un actif qui va être essentiel au développement de notre industrie [de semi-conducteurs] », a relevé Christiano Amon. Si d’autres firmes du secteur suivent le mouvement, cela pourrait assurer la neutralité d’ARM, qui pourrait continuer à servir tout le marché.

ARM est au centre de la tech

ARM a pour particularité de ne pas fabriquer directement les puces, mais d’en concevoir les plans et de développer des approches innovantes pour les rendre plus puissantes et moins énergivores. En somme, plus efficaces. Charge ensuite à des tiers de les assembler, à travers un système de licence. Grâce à son savoir-faire, ARM est désormais au carrefour de la tech.

Les modèles que l’entreprise britannique dessine sont très prisés. Outre Qualcomm, qui est déjà un gros client d’ARM, des groupes comme Intel, Microsoft ou Apple ont déjà signé des accords avec elle pour exploiter son catalogue. Et d’ailleurs, Nvidia n’aurait pas été prêt à débourser 40 milliards de dollars si ARM n’était pas au-dessus du lot.

En fait, la position d’ARM est telle que la Federal Trade Commission (FTC), une agence indépendante qui s’occupe, entre autres, des sujets de concurrence, de monopole et de consommation, a utilisé une expression qui est parfois utilisée pour décrire la société : la Suisse de l’industrie des semi-conducteurs, car elle accorde des licences en utilisant une approche neutre et ouverte.

Fredrik Rubensson
ARM. Allégorie. // Source : Fredrik Rubensson

« ARM a gagné partout grâce à l’investissement collectif de l’ensemble de l’écosystème, de sociétés comme Apple et Qualcomm et bien d’autres, et ce parce qu’il s’agissait d’une architecture indépendante et ouverte dans laquelle tout le monde pouvait investir », a observé Christiano Amon. Un statu quo mériterait donc d’être maintenu pour la paix du secteur.

Qualcomm s’était opposé d’ailleurs à la tentative de rachat de Nvidia, compte tenu des enjeux stratégiques derrière cette opération. En outre, des clients d’ARM ne voyaient pas forcément d’un bon œil la perspective qu’un groupe privé comme Nvidia arrive à ses fins, car cela risquait de lui permettre de connaître des secrets industriels, y compris de rivaux.

Il reste à déterminer quel écho la proposition du patron de Qualcomm aura et si elle attirera assez de partenaires dans l’aventure pour assurer une bonne neutralité. Plus le consortium sera large, meilleures seront les garanties. L’idée en tout cas semble cheminer : déjà en début d’année, le patron d’Intel, Pat Gelsinger, avait suggéré qu’il était disposé à soutenir une initiative de ce genre.

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