Trois entreprises ont annoncé la fin de leurs tractations avec Huawei. Dans le monde de la tech, la taxation des routes commerciales provoque toujours plus la discorde.

La crise Huawei n’en finit plus. Après le déclenchement de l’affaire dimanche 19 mai, date à laquelle l’entreprise chinoise a été placée sur une liste d’entités qui ont besoin d’une autorisation spéciale par le gouvernement américain, les annonces se suivent et aucune ne semble aller dans le sens d’une accalmie. Dernières en date : ARM, Panasonic et Toshiba confirment avoir arrêté ou l’intention d’arrêter leurs partenariats commerciaux avec Huawei.

Et si ces trois entreprises semblent moins importantes que l’arrêt des échanges avec Google ou Microsoft, qui fournit à Huawei le système d’exploitation Android présent sur ses smartphones, leur décision montre l’impact de l’affaire… et ses conséquences à moyen terme. Car ni ARM, ni Toshiba, ni Panasonic ne sont des entreprises américaines. Explications.

Bloquer les issues

ARM est peut-être l’entreprise la moins connue des trois par le grand public. Et pourtant, c’est la plus importante. Ces Britanniques possédés par le Japonais Softbank ont en effet conçu l’architecture de processeurs mobiles qui équipe la quasi-totalité des smartphones actuels, en plus d’objets connectés. Tous les processeurs des iPhone, même s’ils sont conçus par Apple, sont basés sur l’architecture ARM. Tous les processeurs de Qualcomm le sont également. Et les processeurs Kirin, conçus par la filiale de Huawei HiSilicon sont aussi basés sur ARM. Problème : la BBC a dévoilé que ARM avait demandé à ses employés de mettre fin aux contrats actifs et aux engagements futurs avec Huawei.

Pour Huawei, ce serait catastrophique : refaire un système d’exploitation et surtout un magasin d’application est déjà une tâche colossale ; concevoir une architecture matérielle pour ses processeurs mobiles est un chantier qui semble impossible à réaliser à temps. Et si ARM précise qu’elle a pris sa décision parce que certaines technologies employées sont « d’origine américaine », cela montre aussi à quel point le soft power américain est puissant.

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Un processeur basé sur l’architecture ARM fabriqué par Apple

C’est aussi ce que l’on retient des revers de Toshiba et Panasonic. Les deux entreprises japonaises ont annoncé couper les ponts avec Huawei à la suite de la décision américaine qui ne les concerne a priori pas. La raison évoquée est la même : Toshiba souhaite par exemple s’assurer que « des pièces ne sont pas produites aux États-Unis ». Elles ne pourraient plus être vendues à Huawei si c’était le cas. Panasonic suspend, de son côté, uniquement les transactions portant sur des objets dont certaines pièces sont fabriquées aux États-Unis.

Mais ces trois exemples sont critiques pour Huawei. Ils montrent en effet que la décision américaine a un impact sur les entreprises du monde entier et ne se limite pas aux seules entreprises américaines. Si la Chine souhaitait avancer avec une logique d’opposition idéologique, arguant qu’elle pourrait « faire sans » les États-Unis, ces annonces tendent à prouver le contraire. Même en gardant à l’esprit qu’elles viennent du Royaume-Uni et du Japon, pays très proches économiquement et idéologiquement des États-Unis.

Pas d’app store tiers

L’autre conséquence grave, c’est que par ces exemples, l’idée d’une entreprise tierce qui volerait au secours de Huawei côté smartphone s’effondre. On aurait pu imaginer une entreprise européenne ou asiatique capable de faire tampon entre Huawei et les entreprises américaines. Par exemple, l’idée d’un magasin d’applications non américain qui fournirait les applications les plus populaires (Netflix, Twitter, Facebook, WhatsApp, Instagram…) aurait pu être une porte de sortie pour les clients de Huawei. Visiblement, cela ne sera pas possible : même une entreprise tierce qui fournit des services américains doit se plier à la décision du gouvernement Trump.

Une crise de plus en plus politique

Pour Huawei, la balle semble être plus que jamais dans le camp des négociations politiques. Difficile d’imaginer une issue confortable si le Département du Commerce américain ne fait pas preuve de tolérance. Les trois mois de sursis accordés au géant chinois doivent permettre d’arriver à une décision éclairée.

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