L’information était passée inaperçue, mais elle provoque de vives discussions depuis le mois de décembre sur les forums du site spécialisé LaFibre.info. Comme le remarque Univers Freebox, Free a décidé d’économiser le nombre d’adresses IP de type IPv4 qu’il lui reste en réserve, et de partager ces adresses IP entre plusieurs clients. La mesure serait en place au moins pour de nouveaux clients à la fibre FTTH situés en « zone moyennement dense » (ZMD).
Chez les clients concernés, les abonnés ne profitent plus de l’ensemble du bloc des 65 536 ports permis par la norme IP, mais d’un quart de bloc. Une même adresse IP peut ainsi être partagée entre quatre abonnés, le premier ayant à disposition les ports 1 à 16363, le second les ports 16384 à 32767, et ainsi de suite. Il s’agit d’une forme alternative de Carrier-grade NAT, qui permet au FAI de répartir le trafic entre les quatre abonnés selon les ports qu’ils utilisent.
Pour la plupart des clients, ça ne change strictement rien en apparence. Le fait de partager la même adresse IP n’implique absolument pas de partager la même connexion à Internet, et donc de baisser en débit. Et les internautes qui ont besoin simultanément de plus de 16 363 ports sont rarissimes (s’ils existent). Mais si le client a besoin d’ouvrir des ports spécifiques pour que son application soit joignable, par exemple pour héberger un site web personnel (la norme impose l’utilisation du port 80 par le navigateur), pour BitTorrent ou pour jouer à certains jeux multijoueurs, des problèmes de connectivité peuvent se poser.
Une option « vraie IP fixe » chez Free
Pour eux, il « y aura une option ”vraie ip fixe” bientôt et, cerise sur le gâteau, on pourra même demander plusieurs IP ». a donc fini par annoncer ce week-end Rani Assaf, le directeur technique de Free. Il n’a en revanche donné aucun calendrier.
Reste à comprendre pourquoi Free opère ce partage d’adresses IP.
En apparence, Free a largement plus qu’assez d’adresses IPv4 pour tout le monde, avec environ 11 millions d’adresses IP pour 6 millions de clients. Mais « il faudrait prendre en compte les plages attribuées à chaque DSLAM (qui sont de taille fixe, indépendamment du nombre de clients), les pools dynamiques des non-dégroupés, les usages mineurs comme le backbone et le CG-NAT mobile, et surtout ce que représenterait un déploiement FTTH à l’échelle nationale avec l’architecture actuelle pour faire une projection exhaustive du nombre d’adresses qui pourraient être requises sur le long à moyen terme », explique Marin.
Accompagner la transition vers IPv6
Le même internaute note que la technique employée par Free consisterait à encapsuler du trafic IPv4 dans des trames IPv6, ce qui avait fait l’objet d’une publication de RFC auprès de l’IETF en juillet 2015. Le but serait d’accompagner plus en douceur la transition du protocole IPv4 vers IPv6, en permettant en apparence aux clients d’utiliser une adresse IPv4, alors que le trafic sera traité en IPv6. Il note que la technique a été développée par l’ingénieur français Rémi Desprès, qui est déjà à l’origine du mécanisme 6rd utilisé le premier par Free pour déployer très rapidement IPv6.
L’incontournable Stéphane Bortzmeyer avait aussi expliqué en détails la technique dite « A + P » (adresses + ports) qui semble être celle utilisée par Free, dans un billet d’août 2011. « L’idée de base est un compromis. On va sacrifier quelques bits du numéro de port pour les donner à l’adresse IP (…). L’idée d’A+P est que, même si l’adresse ne sera plus unique, le couple {adresse, partie du port} restera unique par client. Avec 65536 ports possibles, on peut mettre 65536 clients sur une même adresse IP (si chacun se contente d’un seul port), 256 (avec 256 ports chacun), ou un seul (avec le système actuel où le client a 65536 ports)… L’un des intérêts d’A+P est qu’il limite (sans toutefois le supprimer) le recours au NAT et à tous ses inconvénients ». Au passage, Bortzmeyer expliquait qu’Orange avait lui-même réalisé des tests de cette technique.
Vous avez lu 0 articles sur Numerama ce mois-ci
Tout le monde n'a pas les moyens de payer pour l'information.
C'est pourquoi nous maintenons notre journalisme ouvert à tous.
Mais si vous le pouvez,
voici trois bonnes raisons de soutenir notre travail :
- 1 Numerama+ contribue à offrir une expérience gratuite à tous les lecteurs de Numerama.
- 2 Vous profiterez d'une lecture sans publicité, de nombreuses fonctions avancées de lecture et des contenus exclusifs.
- 3 Aider Numerama dans sa mission : comprendre le présent pour anticiper l'avenir.
Si vous croyez en un web gratuit et à une information de qualité accessible au plus grand nombre, rejoignez Numerama+.
Abonnez-vous gratuitement à Artificielles, notre newsletter sur l’IA, conçue par des IA, vérifiée par Numerama !