Les Mayas et Teotihuacan étaient deux civilisations différentes de l’Amérique précolombienne et on sait qu’elles avaient des relations certes tendues (Teotihuacan a conquis plusieurs sites mayas), mais également diplomatiques. Une découverte récente étaye un peu plus notre connaissance de leurs échanges politiques.
Une étude publiée le 28 septembre 2021 dans Antiquity, s’intéresse à la cité maya de Tikal. Celle-ci fait l’objet de recherches archéologiques intensives depuis les années 1950 et, pourtant, on était bien loin de tout connaître. Ils ont mobilisé un équipement appelé LIDAR : c’est une méthode de scan mais, au lieu d’utiliser des ondes radio, cela mobilise la lumière infrarouge. Des impulsions sont envoyées, ce qui permet de dresser la cartographie d’un terrain, y compris ce qui se cache au-dessous de la surface.
C’est ainsi que l’étude publiée dans Antiquity révèle la présence d’une structure souterraine à Tikal, qui n’avait jamais été repérée avant lors des fouilles.
Un signe de l’influence de Teotihuacan
Grâce au scan de la cité, les archéologues ont découvert qu’une zone censée être composée de collines naturelles, en bordure du centre de Tikal, est en réalité un ancien quartier, comprenant des bâtiments en ruine. Mais la découverte est encore plus surprenante que cela : la structure édifiée dans cette zone est conforme à l’architecture du palais impérial — la citadelle — de Teotihuacan. C’est une sorte de petite réplique de la citadelle. Pourtant, les deux cités provenaient de cultures différentes et étaient éloignées de plus de 1 000 kilomètres.
« Le complexe architectural que nous avons découvert semble avoir été construit pour les habitants de Teotihuacan ou pour ceux qui étaient sous leur contrôle », détaille Stephen Houston, l’un des auteurs, sur le site de l’université Brown. Cela ressemble à une sorte d’ambassade, mais les recherches développées dans cette étude suggèrent que cela pourrait être bien davantage. Peut-être le reliquat d’une occupation, ou en tout cas d’une surveillance. « Tout le moins, cela montre une tentative d’implanter une partie du plan d’une ville étrangère sur Tikal. »
C’est assez cohérent avec l’histoire connue des deux cités, puisqu’au IVe siècle, Teotihuacan a conquis Tikal. Cette structure suggère que cette conquête est d’abord passée par un rapport d’influence assez conséquent de Teotihuacan sur Tikal.
Les fouilles qui ont suivi le scan de la zone ont d’ailleurs montré que la réplique était faite à partir des matériaux et techniques utilisées à Teotihuacan et non celles des Mayas. La structure est orientée à 15,5 degrés est-nord… comme les autres bâtiments de Teotihuacan. « Cela suggère presque que l’on a demandé aux constructeurs locaux d’utiliser une technologie de construction qui soit entièrement non locale lors de la mise au point de ce nouveau complexe immobilier tentaculaire. »
Selon les archéologues, tout cela ressemble à une « installation agressive dans la région ». C’est cohérent avec l’invasion de la zone au IVe siècle par Teotihuacan. Sur des sites adjacents, les archéologues ont aussi découvert des pointes en silex, qui étaient utilisées par les Mayas, et des pointes en obsidienne verte, utilisées par Teotihuacan. Des sépultures ont aussi été mises au jour. Cela démontre l’existence d’un conflit. Les recherches vont se poursuivre, car ces découvertes offrent un approfondissement inédit de l’influence de Teotihuacan, et sur des rapports intercivilisationnels de l’époque.
« Avant la colonisation européenne des Amériques, il y avait des empires et des royaumes d’une influence et d’une force disproportionnées qui interagissaient avec des civilisations plus petites d’une manière qui a laissé un grand impact. Explorer l’influence de Teotihuacan sur la Méso-Amérique pourrait être un moyen d’explorer les débuts du colonialisme et de ses oppressions et collusions locales », conclut Stephen Houston.
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