Les vaccins basés sur l’ARN messager, et notamment celui de Pfizer, représentent un défi de transport, de logistique et de stockage, tant ils sont fragiles.

La campagne vaccinale allemande a commencé le même jour qu’en France, à savoir le dimanche 27 décembre 2020. Il s’agit du vaccin produit par Pfizer/BioNTech, qui est basé sur la technique de l’ARN messager. Or comme dans l’Hexagone, les mêmes difficultés logistiques se présentent outre-Rhin, car ces vaccins ne sont pas simples à transporter.

Dimanche 27 décembre, les journaux allemands ont couvert cette toute première phase, incluant les premières injections, mais également pointé une bévue. Des milliers de doses n’ont en effet pas pu être délivrées, privant sept cantons de Bavière, dans le sud-est du pays, du vaccin cette semaine-ci. En cause : une rupture dans la chaîne du froid.

Le candidat vaccin de Pfizer est en phase 3 et tire des résultats prometteurs. // Source : Pfizer

Le candidat vaccin de Pfizer est en phase 3 et tire des résultats prometteurs.

Source : Pfizer

Il se trouve que les deux vaccins basés sur l’ARN messager ont conjointement besoin d’être stockés à froid, dans des conditions pour le moins extrêmes. La congélation de celui de Pfizer/BioNTech se fait à des températures plus basses que les moyennes de l’Antarctique, à savoir entre -60 et -80 degrés Celsius.

Ces vaccins sont fragiles

Si les vaccins basés sur l’ARN messager amènent des avantages dans leur développement (notamment la facilité de conception), ils ont un défaut : leur fragilité. Cette problématique provient principalement des enzymes qui accompagnent l’ARN messager. Puisque l’ARN messager est un code génétique temporaire, il contient son propre mécanisme d’autodestruction, afin qu’il disparaisse à la fin de sa seule et unique mission. Mais dans le cas d’un vaccin, il est nécessaire que la molécule contenant l’ARN messager reste parfaitement stable d’ici l’injection. Alors, comment éviter que la dose se détériore ?

Une première étape de stabilisation passe par différentes techniques, dont chaque laboratoire a le secret — ce qui explique des variations entre les besoins de celui de Moderna et celui de Pfizer. La vaccinologue Margaret Liu utilise l’analogie de la barre chocolatée dans NPR. Si le chocolat fond, on peut freiner ce phénomène grâce à un emballage ainsi qu’avec de l’enrobage, comme pour des M&M’s. Raison pour laquelle l’ARNm est d’abord structurellement stabilisé en laboratoire (enrobage), et qu’il n’est pas injecté à nu, mais au sein d’une molécule lipidique (emballage).

Sauf que cela n’est pas suffisant. Le temps du stockage, il faut réduire les températures afin de suspendre l’ARN messager dans le temps. En réduisant les températures, l’activité des enzymes est mise en pause. Elles ne peuvent plus détériorer l’ARN. Cette suspension n’est valable que lorsque les températures sont au plus bas : une fois décongelé, le vaccin n’est viable que quelques jours dans un frigo classique. À partir du moment où la chaîne du froid est rompue, l’activité des enzymes reprend.

Maintenir la chaîne du froid, cela signifie que les doses doivent être conservées dans de « super-congélateurs » (fonctionnant par exemple avec de la neige carbonique), et que les conditions ne doivent pas varier entre le moment où elles sortent du laboratoire, durant le transport et jusqu’à réception.

C’est la raison pour laquelle les doses concernées, en Allemagne, ne sont pas utilisables. Leur ARN messager s’est probablement trop détérioré, rendant les doses potentiellement inefficaces. Cette potentialité n’est évidemment pas acceptable pour un vaccin censé protéger dans une crise sanitaire. Dès lors, ces doses sont délaissées.


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