Des chercheurs du MIT ont généré un état fluide le plus parfait possible compte-tenu des limites de la mécanique quantique. Cela permet de simuler le comportement des ondes sonores au sein, notamment, d’une étoile à neutrons.

C’est une première. Des physiciens du MIT ont réussi à enregistrer la façon dont les ondes sonores se propagent au sein d’un fluide « parfait ». Par perfection, il faut entendre un son qui ne subit quasiment aucune friction car il traverse un fluide dont tous les niveaux de viscosité sont au plus bas de ce que permet la mécanique quantique. Vous pouvez écouter le résultat sur Soundcloud : vous écouterez alors un son traversant l’état fluide le plus parfait autorisé par la physique.

Au-delà de la petite curiosité, que représente réellement cet enregistrement pour la science ? Cette avancée, publiée dans Science, le 4 décembre 2020 n’a rien d’une petite expérience anodine. Ce son représente en fait un nouveau point d’entrée au sein de certaines parties les plus extrêmes et insondables du cosmos.

Un nouvelle façon d’aborder la mécanique des fluides

Quel que soit l’état du fluide (gaz, liquide, plasma), celui-ci va rencontrer une friction avec ce qui l’entoure, et cette résistance génère une viscosité. Plus il y a résistance, plus le fluide devient épais. Seul un « superfluide » est potentiellement dépourvu de cette viscosité. Cet état de la matière est très rare, mais on suppose qu’il advient notamment au cœur des étoiles à neutrons… ou dans la fameuse « soupe » sous forme de plasma quarks-gluons de l’Univers primordial (notre cosmos dans sa prime jeunesse).

Problème : « il est difficile d’écouter une étoile à neutrons », relève non sans ironie Martin Zwierlein, professeur de physique au MIT, et tout aussi difficile d’écouter l’Univers primordial.

Une étoile à neutrons. // Source : Kevin Gill

Une étoile à neutrons.

Source : Kevin Gill

C’est là où la création d’un fluide « parfait » en laboratoire, lors de cette recherche, trouve son utilité pour reproduire le phénomène. « Dorénavant, vous pouvez l’imiter dans un laboratoire en utilisant des atomes, secouer cette soupe atomique et l’écouter, et savoir comment le son se comporterait dans une étoile à neutrons. » Il y a évidemment des différences entre une étoile à neutrons et cette reproduction, mais d’après les calculs de Martin Zwierlein, les fréquences sonores du son en laboratoire est extrêmement proche de ce que l’on pourrait entendre au cœur du gaz d’une étoile à neutrons « si l’on pouvait porter notre oreille au plus proche sans être déchiré par la gravité ».

Si vous vous demandez à quoi cela peut bien servir, il faut se rappeler qu’en physique, le jeu des interactions permet qu’une mesure apporte des informations sur d’autres mesures. C’est ainsi par exemple qu’en mesurant la luminosité d’une galaxie, on obtient nombre de données, par exemple sur sa masse et la quantité théorique de matière noire qui soutient cette galaxie.

En se servant du fluide parfait créé par le MIT, les chercheurs peuvent reproduire en partie ce qu’il se passe au cœur d’une étoile à neutrons. En fonction de comment une étoile à neutrons oscille et de comment se comportent les fermions (particules élémentaires — électrons, quarks…), les ondes sonores se propagent différemment. En reproduisant ces ondes sonores et leur façon de résonner, on retrace le processus, on pénètre dans le mécanisme intérieur de ces objets cosmiques. Au-delà même des étoiles à neutrons, il s’agit en fait tout simplement de comprendre comment les états superfluides de la matière, si rares, se comportent et se forment. Cela offre une nouvelle façon de se pencher sur la dynamique des fluides concernant les électrons, les neutrons et les quarks.

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