En 3 ans, l’étendue de la banquise s’est beaucoup réduite en Antarctique. La région a perdu autant de glace de mer que l’Arctique en 35 ans. Un renversement de la situation en Antarctique semble s’être produit en 2014.

L’Antarctique a perdu presque autant de banquise en 3 ans que l’Arctique n’en a perdu en 35 ans. La climatologue Claire L. Parkinson du NASA Goddard Space Flight Center a fait ce constat dans la revue PNAS le 1er juillet 2019. L’année 2014 semble avoir marqué un tournant important pour la banquise antarctique.

La chercheuse constate qu’avant cette année là, les satellites ont enregistré une « augmentation globale pendant plusieurs décennies de l’étendue de la banquise antarctique ». Entre 2014 et 2017, elle observe une inversion de cette tendance, avec une baisse qui « dépasse de loin les taux de décomposition connus de l’Arctique ». Selon l’AFP, la banquise de l’Antarctique a perdu une superficie d’environ 4 fois la France.

L’Arctique et l’Antarctique évoluent différemment

Quel est l’intérêt de comparer la situation en Antarctique et en Arctique ? Comme le rappelle Claire L. Parkinson, la banquise des pôles nord et sud ne connait pas la même évolution. En Arctique (pôle nord), l’étendue de la banquise est en diminution depuis les années 1990. Depuis, la diminution s’accélère, encouragée par la hausse des températures dans l’atmosphère, le réchauffement des océans, la fonte des glaces terrestres (le gel formé sur le sol) et du pergélisol (le sol gelé en permanence).

La situation est différente en Antarctique (pôle sud). « L’étendue de glace a globalement augmenté » au cours de la même période (et plus largement depuis 1978). Cette expansion de la banquise antarctique a encore plus surpris les scientifiques que la situation en Arctique. En 2014, l’extension de la banquise était à son maximum depuis 1978.

Pendant trois décennies, l’étendue de la « glace de mer » (autre expression désignant la banquise) a augmenté de façon progressive et inégale. Après 2014, l’étendue de la banquise a diminué précipitamment (jusqu’en 2017), si bien qu’elle « a atteint sa valeur la plus basse en 40 ans », constate la climatologue. Les moyennes des années 2017 et 2018 sont les plus basses de la période 1979-2018, ce qui revient à l’annulation des « 35 années d’augmentation globale de l’étendue de la glace en quelques années seulement », écrit la climatologue. En Arctique, il fallu 3 décennies pour enregistrer une perte de l’étendue de la banquise équivalente (en moyenne par an).

Un « renversement spectaculaire »

Pour obtenir ces informations, la climatologue a utilisé le programme Nimbus de la Nasa, un ensemble de satellites météorologiques placés en orbite en entre 1964 et 1978. Ils embarquent des radiomètres à micro-ondes, dont l’instrument SMMR (« Scanning Multispectral Microwave Radiometer ») capable de mesurer la concentration des glaces de mer. Ses données ont servi jusqu’à l’année 1987. Ensuite, l’autrice a eu recours aux données des satellites météorologiques DMSP (« Defense Meteorological Satellite Program »).

C’est un « renversement spectaculaire » qui se produit dans la banquise antarctique, poursuit Claire L. Parkinson. Elle encourage la publication d’autres recherches sur « les conditions atmosphériques et océaniques » qui pourraient expliquer à la fois le déclin observé entre 2014 et 2017, ainsi que l’étonnante extension enregistrée les décennies précédentes, sur la banquise de l’Antarctique.

Les limites de la comparaison

D’autres scientifiques nuancent la comparaison faite entre l’Arctique et l’Antarctique : cela revient à « comparer des pommes et des camions militaires », assure Douglas Martinson, océanographe à l’université Colombia, à l’AFP. L’Antarctique est un continent entouré par des océans, tandis que l’Arctique est un océan entouré par des terres. Les contraintes exercées sur les icebergs sont donc différentes. L’Antarctique ne se réchauffe pas, alors que c’est le cas de l’Arctique.

Par ailleurs, les extensions de banquise ne sont pas forcément incompatibles avec le réchauffement planétaire. Ce dernier peut provoquer des situations qui semblent étonnantes, mais pour lesquelles il existe des explications. Par exemeple, un glacier de la côte ouest du Groenland fond moins vite et s’épaissit, et ce n’est pas forcément une bonne nouvelle.


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