Ce qui est proche de la Terre à l’échelle du cosmos peut être infiniment loin à l’échelle de l’humanité. Proxima Centauri b, qui est l’exoplanète habitable la plus proche de nous, constitue un exemple frappant.

Trouver l’exoplanète habitable la plus proche de la Terre est une chose. Parvenir à s’y rendre en est une autre. Car à l’échelle de l’immensité cosmique, les échelles de distance prennent vite des dimensions colossales. À tel point que les décrire avec des kilomètres n’a plus aucun sens au-delà d’un certain seuil : il vaut mieux parler en années-lumière.

Aujourd’hui, c’est Proxima Centauri b qui est l’exoplanète la plus proche de la Terre. Elle se trouve à 4,37 années-lumière de la planète bleue. Surtout, elle est située dans la zone habitable de son système stellaire. Il s’agit d’un endroit se trouvant à une certaine distance de l’étoile (ici, Proxima Centauri), dans lequel une vie extraterrestre serait susceptible d’émerger.

Découverte en 2016, Proxima Centauri b demeure pourtant toujours mystérieuse. On la suppose tellurique (comme Mercure, Vénus, la Terre et Mars). Elle pourrait avoir de l’eau liquide en surface. Sa masse est un peu plus élevée (1,3 fois la Terre). Elle n’aurait en revanche pas de cycle jour / nuit. Elle est parfois suspectée d’être même « hautement habitable ».

Proxima Centauri, vue d'artiste. // Source : ESO/L. Calçada
Proxima Centauri, vue d’artiste. // Source : ESO/L. Calçada

Cette description, faite par le site The Space Academy, en reprenant une publication de Live Science, a fait l’objet d’un commentaire sans doute ironique d’Elon Musk, le 12 juin. Sur Twitter, il a répondu que Proxima Centauri b était « quasi la portée à côté ». Ce qui est vrai à l’échelle de tout l’Univers. Mais c’est moins vrai si l’on s’en tient à ce que peut faire l’humanité.

Rien ne va plus vite que la lumière, qui file dans le vide spatial à presque 300 000 kilomètres par seconde (précisément : 299 792 458 mètres par seconde). Pourtant, même à cette vitesse extrême, les photons mettent du temps à voyager. Il leur faut plus de quatre ans pour traverser l’espace entre Proxima Centauri b et la Terre. Et c’est pourtant l’exoplanète la plus proche de nous.

Même la lumière met du temps pour traverser le cosmos

Pourrait-on tenter un voyage intersidéral de 4,37 ans pour rejoindre l’exoplanète ? C’est oublier que l’humanité est incapable d’approcher cette allure. On en est même ridiculement loin : le vaisseau spatial qui se déplace le plus rapidement est la sonde solaire Parker de la NASA. Son allure ? 535 000 km/h, soit aux alentours des 148 km/s.

C’est une allure très rapide, obtenue grâce aux orbites autour du Soleil. Mais c’est un pouillème de la vitesse de la lumière : Parker n’a atteint « que » 0,05 % de la vitesse de la lumière. Et celle-ci, répétons-le, met déjà plus de quatre ans à faire la liaison Terre — Proxima Centauri b. À la vitesse de Parker, le voyage prendrait des millénaires. Et on ne parle ici que du voyage aller. Comptez le double si vous voulez rentrer.

Du temps ou Helios 2 détenait le record d’objet terrestre le plus rapide, on estimait déjà qu’il fallait, dans le meilleur des cas, 18 000 ans pour rejoindre Proxima Centauri b en maintenant sa vitesse de pointe à 70,2 km/s. Cela représente environ 600 générations. Parker a doublé cette allure, ce qui réduirait le temps de vol à près de 9 000 ans. Neuf millénaires !

Sun Parker Soleil
La sonde solaire Parker est rapide. Mais pas assez rapide. // Source : NASA

Même s’approcher à 1 % de la vitesse de la lumière paraît extrêmement difficile. « Par exemple, pour qu’un adolescent pesant 50 kg atteigne 1 % de la vitesse de la lumière, il faudrait 200 000 milliards de joules. C’est à peu près la quantité d’énergie que 2 millions d’habitants des États-Unis consomment en une journée », rappelait l’astronome Chris Impey.

Alors, Proxima Centauri b est-elle à jamais inaccessible ? Sans doute ne faut-il pas faire insulte au futur. Christophe Bonnal, ingénieur au Centre National d’Études Spatiales (Cnes), rappelait en 2016 à Sciences et Avenir qu’il existe diverses pistes, plus ou moins exotiques, plus ou moins crédibles, pour développer de nouvelles technologies de propulsion spatiale.

On parle par exemple de propulsion magnéto-plasmique à impulsion spécifique variable (VASIMR), de voile poussée par un laser ou de moteur à antimatière. Des solutions qui promettent un saut technologique par rapport à l’existant, comme les moteurs ioniques, mais qui ont une foule d’obstacles techniques à franchir. Mais ça pourrait rester largement insuffisant.

Il y a par ailleurs un autre problème : au-delà de la vitesse de voyage, il y a aussi le problème de la communication. On pourrait communiquer par laser avec une sonde, mais avec un même problème de délai : la sonde, une fois sur place, devra attendre plus de quatre ans pour recevoir une instruction par la lumière. Et sa réponse mettra ensuite quatre ans à revenir sur Terre…

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