La solitude peut être un bienfait pour certains. Mais selon une étude, se retrancher sur soi-même peut aussi grandement aspirer notre énergie.

Nous avons tendance à penser que la pandémie liée au covid a été un élément déclencheur dans l’isolement de nombreux Français et Françaises. Mais, en réalité, la solitude est un problème de santé publique antérieur aux confinements et aux restrictions sociales, qui n’ont fait qu’accentuer ce phénomène. Depuis plusieurs années, un bon nombre d’études se sont penchées sur ce qu’apporte la solitude. C’est le cas des universités de Viennes et de Cambridge, qui ont mené une étude conjointe publiée le 28 mars 2023.

Réalisée en laboratoire, l’étude a isolé 30 femmes adultes, pour observer l’effet de la solitude sur leur énergie. Elles se sont présentées au laboratoire trois jours différents, dans trois situations différentes :

  • Soit sans contact social
  • Soit sans nourriture
  • Soit avec du contact social et de la nouritture.

Une « sensation de manque »

Au cours de chaque journée, les participantes ont fait à plusieurs reprises un point sur leur niveau de stress et de fatigue, tout en décrivant l’état de leur humeur. Les scientifiques ont aussi enregistré leurs réactions physiologiques au stress, en analysant leur rythme cardiaque et leur niveau de cortisol. Finalement, les résultats ont révélé que ces 8 heures d’isolement social ont entraîné une baisse d’énergie et une augmentation accrue de la fatigue, « comparable à 8 heures de privation de nourriture ».

Cependant, ces résultats n’ont pas entièrement satisfait les scientifiques derrière l’étude, qui se sont demandés s’ils obtiendraient des résultats similaires dans des conditions de vie réelle. C’est dans cette optique qu’ils ont réalisé une autre étude en Autriche et en Italie, pendant le confinement occasionné par le covid en 2020. Cette fois, ce sont 87 adultes qui ont été isolés socialement pendant 8 heures.

Pour beaucoup, le lien social est primordial // Source : Pexel
Source : Pexel

Les résultats des deux études sont allés dans le même sens, ce qui a permis aux scientifiques de suggérer « que la baisse d’énergie pourrait faire partie d’une réponse homéostatique à l’absence de contact social ».

Ces résultats confirment la comparaison faite par les auteurs de l’étude : « Si nous ne mangeons pas pendant une période prolongée, il s’ensuit une série de processus biologiques qui créent une sensation de manque que nous appelons la faim. En tant qu’espèce sociale, nous avons également besoin des autres pour survivre. Il est prouvé qu’un manque de contact social induit dans notre cerveau une réaction de manque comparable à la faim, ce qui nous motive à renouer des liens ».

Une perte qui dépend de la personnalité

Pour autant, certaines personnes ont mieux vécu l’expérience que d’autres. Les scientifiques ont ainsi notifié dans l’étude que les réactions étaient influencées par les traits de personnalité sociale des participants. L’étude réalisée dans les conditions de la maladie Covid-19 a montré que les personnes qui se qualifient de sociables ont eu une baisse d’énergie très importante lorsqu’ils étaient isolés, par rapport aux jours où ils avaient des interactions sociales.

À l’inverse, la baisse d’énergie est beaucoup plus faible chez les participants moins sociables, qui ont aussi mieux vécu l’expérience. Cela ne veut pas dire non plus qu’ils n’ont pas été affectés. Mais, en comparaison des participants très sociables, ils ont ressenti moins de fatigue.

Pour d'autres, l'isolement social est parfois mieux vécu // Source : Pixabay
Pour d’autres, l’isolement social est parfois mieux vécu. // Source : Pixabay

Cette analyse rejoint ce qui a été observé dans l’ensemble de la société pendant la pandémie, où certaines personnes, habituées à rester chez eux, ont profité du confinement pour se ressourcer. Ce qui n’a pas été le cas d’autres personnes qui ont vu leurs habitudes sociales bouleversées par l’obligation de rester chez soi.

Selon les auteurs de l’étude, ces résultats sont à prendre au sérieux. Si la baisse d’énergie fait « partie de notre réponse homéostatique au manque de contacts sociaux », c’est aussi « un précurseur potentiel de certains effets plus néfastes de l’isolement social à long terme ». Giorgia Silani, l’une des scientifiques qui a participé à l’étude, explique même que « le fait que nous observions cet effet même après une courte période d’isolement social suggère que le manque d’énergie pourrait être une réponse adaptative qui, à long terme, peut devenir inadaptée ».

Il y a toutefois quelques limites possibles : les auteurs n’excluent pas totalement le rôle de l’ennui dans les résultats — la façon dont le temps est occupé. « Il est possible que les participants les plus sociables aient décidé de s’abstenir d’interactions sociales les jours où ils se sentaient en manque d’énergie, et non que le manque d’interactions soit à l’origine du manque d’énergie », écrivent-ils aussi, « bien que ces possibilités ne s’excluent pas mutuellement, notre étude en laboratoire apporte des preuves en faveur de cette dernière interprétation ». C’est une étude basée sur des corrélations, et non des causalités directes, à ce stade des recherches.

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