Avec TF1+, le groupe TF1 entreprend un des virages les plus importants du paysage audiovisuel français. Pour la première fois, TF1 abandonne sa « stratégie de rattrapage » au profit d’une vraie offre de streaming, conçue pour répondre à l’évolution « irréversible » des habitudes. Derrière l’opportunité financière se cache une vraie nouvelle manière de s’adresser aux téléspectateurs.

Tou Dou Doum. À chaque fois qu’ils ouvriront l’application TF1+, les Français et les Françaises entendront un petit jingle musical. Une nouveauté par rapport à myTF1, la plateforme numérique aujourd’hui proposée par le groupe éponyme. À vrai dire, TF1+ et myTF1 n’ont pas du tout la même philosophie. Même s’ils partagent la plupart de leurs programmes, l’un se présente comme un vrai service de streaming, qui s’imagine à la table de Netflix et Disney+, l’autre est un service de rattrapage, qui s’oppose plus à france.tv ou 6play.

Le 20 décembre, à l’occasion d’une grande conférence de presse, le groupe TF1 a présenté aux journalistes sa nouvelle stratégie streaming. Pour la première fois et malgré ses très bons résultats sur le linéaire, TF1 ouvre la porte à une évolution « irréversible » de la consommation audiovisuelle des Français, qui sont de plus en plus nombreux à abandonner la télévision en direct. TF1+ est la solution à ce problème, pour faire de TF1 un géant du streaming, un peu moins d’un an après avoir abandonné Salto pour faire bande à part.

TF1 constate l’évolution de la télé

TF1 ne le cache pas, il a un grand retard à rattraper. Par mois, les Français se passent en moyenne trois heures sur myTF1. C’est beaucoup, mais trop peu par rapport aux plus de 20 heures passées sur Netflix ou YouTube. Le temps de cerveau humain disponible, comme TF1 l’a lui-même théorisé en 2004, a basculé dans le camp des Américains.

Aujourd’hui, TF1 est un groupe télé. Demain, il veut être un « groupe dans l’ère digitale ». Si les audiences le positionnent encore parmi les plus grands acteurs de France (il capte près de la moitié des recettes publicitaires télévisuelles), TF1 se dit conscient que les habitudes des Français évoluent. En cause notamment : les téléviseurs connectés de plus en plus présents dans les foyers. Selon ses estimations, la moitié des 25-49 ans ne consommeront plus que de la SVOD d’ici 2027. Aujourd’hui, seuls 35 % de cette population a abandonné la télé linéaire.

TF1 fait le constat du basculement des Français vers la VOD.
TF1 fait le constat du basculement des Français vers la VOD. // Source : Numerama

Pour Claire Basini, directrice générale adjointe BtoC de TF1, « ce mouvement technologique est irréversible ». En clair, TF1 a deux possibilités : fermer les yeux et tout miser sur la télé linéaire, en devenant son principal acteur (son avenir n’est pas menacé aujourd’hui, ou se diversifier dans le streaming, pour préparer l’après et devenir un acteur du présent.

TF1+ doit devenir « un réflexe quotidien »

C’est ainsi qu’est né TF1+, dont le nom s’inspire de Disney+, Paramount+ ou Apple TV+. Rodolphe Belmer, le patron de TF1, constate que le marché de la télévision se partage aujourd’hui 3,3 milliards d’euros de recettes de publicitaires. Dans l’univers du streaming, il y a dorénavant un jackpot de 2 milliards d’euros à se partager, qui risque d’augmenter dans le futur. Pourquoi le laisser à YouTube, Netflix, Disney+ ou Prime, alors que les Français peuvent avoir envie de regarder leurs fictions préférées en streaming, comme Plus belle la vie de retour en janvier ? « Tous les acteurs font la même analyse que nous ».

Sur TF1+, qui prend la forme d’une vraie application de streaming avec une interface proche de Netflix, les Français pourront créer des profils utilisateurs. Particularité de la plateforme : la possibilité de sélectionner plusieurs profils en même temps, pour obtenir des suggestions adaptées à tous. TF1+ veut devenir un « réflexe quotidien », au même titre que Netflix ou YouTube, pour les Français en quête d’un contenu à regarder. Les programmes y seront disponibles pendant 48 mois avec des séries, des films, du divertissement et des émissions. TF1+ veut aussi expérimenter un virage streaming de l’info, avec du contenu social réalisé par les journalistes de TF1 dans l’application.

L'interface de TF1+ est très épurée (et bleue).
L’interface de TF1+ est très épurée (et bleue). // Source : Numerama

Autre idée de TF1 : un live enrichi. En plus des 5 chaînes de la TNT du groupe, 50 flux thématiques seront proposés en direct, pour regarder des playlists de ses programmes préférés sans avoir à choisir. Top Chrono, une nouveauté adaptée aux sports diffusés par TF1, permettra de générer un résumé personnalisé d’un match de la durée de son choix.

Le prix de TF1+ ? 0 euro. L’approche de TF1 est de proposer la plus grande plateforme de streaming gratuite en Europe, entièrement financée par la publicité (avec de la HD gratuit, mais à activer manuellement). Il faudra évidemment s’inscrire, ce qui permettra à TF1 d’en apprendre sur vous pour personnaliser ses publicités. Pour le groupe audiovisuel, c’est l’assurance d’augmenter son revenu par utilisateur. Pour les personnes qui détestent la publicité, une version payante, nommée TF1+ Premium, sera aussi proposée au tarif de 5,99 euros par mois. Mais ce n’est pas celle que veut mettre TF1 en avant.

À chaque démarrage, TF1+ permet de choisir un ou plusieurs profils.
À chaque démarrage, TF1+ permet de choisir un ou plusieurs profils. // Source : Numerama

TF1+ peut-il réussir son pari, en devenant une application dans laquelle les utilisateurs en quête d’un programme zappe ? À son lancement le 8 janvier, il sera disponible sur la plupart des box connectés, en plus des décodeurs Orange et Bouygues. SFR arrivera dans un second temps, tandis que Free semble avoir décidé de ne pas donner de coup de pouce à TF1 (ses box sous Android TV devraient pouvoir installer l’application). TF1 semble avoir bien fait les choses, encore faut-il que les gens aient envie de donner une place à son application.

Source : Montage Numerama

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