Un jeune joueur américain poursuit Nintendo devant les tribunaux pour avoir fait payer la possibilité d’obtenir des bonus dans le jeu. Mais selon lui, le taux de probabilité de gain, très mince, n’était pas explicitement signalé aux joueurs.

Il aura dépensé plus de 170 dollars (157 euros) avec la carte de crédit de son père sans sa permission. Il y a un mois, un joueur mineur a attaqué Nintendo en justice. Le jeune plaignant reproche à l’éditeur de l’avoir poussé à payer pour remporter des récompenses liées au hasard sur Mario Kart Tour (version sur mobile du célèbre jeu de conduite), sans détailler les chances réelles des joueurs d »en obtenir, comme l’informe Gizmodo le 22 mai 2023, citant un rapport d’Axios.

Le plaignant affirme que la multinationale japonaise aurait réalisé un acte « immoral, contraire à l’éthique, oppressif, sans scrupules et/ou substantiellement injurieux envers les consommateurs ». Ces actions enfreindraient aussi le code de la protection des consommateurs en vigueur dans l’État de Washington. À l’origine qualifiée en procédure de « class action », l’action se poursuit désormais devant les tribunaux californiens.

Les tuyaux à rubis, un système de « coffres à butin » critiqué

Nintendo peine décidément à échapper à la polémique sur ses façons de monétiser les bonus dans le jeu de conduite Mario Kart Tour. À l’origine, les joueuses et joueurs pouvaient débloquer aléatoirement des conducteurs, des véhicules ou des planeurs en achetant le droit « tirer sur le tuyau » (les « Spotlight Pipe » communément appelées « gacha pipe »), payable en rubis, la monnaie du jeu. Chaque essai coûtait 5 rubis, correspondant à environ 3 dollars (ou 4 euros lorsque nous avions testés en 2019). 

Ce système des « boîtes à butin » (« loot boxes ») qui consiste à proposer du contenu additionnel payant dont le contenu reste inconnu jusqu’à ouverture est régulièrement critiqué lorsqu’il cible de jeunes joueurs prêts à dépenser sans compter. Certains se plaignent que les sommes dépensées ne correspondent pas à la valeur obtenue sur le jeu.

Le "tuyau" dans Mario Kart Tour // Source : Capture Numerama
Le « tuyau » dans Mario Kart Tour // Source : Capture Numerama

Lorsque Numerama avait testé les tuyaux à rubis en 2019, nous avions obtenu une première fois une aile, puis un kart, l’équivalent de 10 rubis soit environ 8 euros (soit 4 euros par objet). Dans cet exemple, étant donné que les objets étaient vendus 500 pièces d’or en boutique, et un personnage 800 pièces, l’utilisation s’était révélée intéressante en cas de trouvaille d’un personnage. S’il s’agit d’une aile, vous aurez dépensé trop.

Mario Kart Tour était déjà interdit en Belgique pour cette raison

Via Mario Kart Tour, Nintendo aurait engrangé pas moins de 293 millions de dollars entre 2019 et 2022, d’après les informations de Games Industry.biz. Certains pays ont déjà interdit les « loot boxes », comme la Belgique, où le jeu Mario Kart Tour n’est d’ailleurs pas disponible, bien qu’il soit possible de contourner le blocage.

De nombreux éditeurs de jeu ont aussi désactivé ce type de microtransactions. Nintendo leur a emboîté le pas en octobre dernier, en mettant fin aux tuyaux à rubis. À la place, il est désormais possible d’acheter des bonus directement dans le magasin du jeu, le Spotlight Shop.

Le joueur n’aurait « quasiment jamais reçu de récompense de valeur »

La plainte en question concerne la période entre 2021 et 2022, durant laquelle les tuyaux à rubis étaient encore actifs. Le jeune joueur aurait à l’époque dépensé des sommes indues dans ce système. « Le plaignant n’a quasiment jamais reçu de récompense de valeur grâce aux Spotlight Pipe qu’il a achetés, durant le temps qu’il a passé à jouer à Mario Kart Tour et n’aurait jamais autant dépensé sur le jeu en sachant ses véritables chances d’obtenir une récompense des Spotlight Pipe, ou qu’il n’aurait pas droit à un remboursement », est-il noté dans le dossier judiciaire. Nintendo ne s’est pas encore exprimé sur l’affaire, au moment où nous écrivons ces lignes.

Ce n’est pas le premier procès contre un éditeur de jeu vidéo autour des pratiques entourant ces coffres à butin. En décembre dernier, Epic Games a été contraint de payer une amende de 520 millions de dollars, pour avoir poussé les enfants à dépenser de l’argent sur Fortnite, en permettant des achats non autorisées (notamment par leurs parents) via des « schémas obscurs ».


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