À l’Assemblée nationale, les députés ont déposé une proposition de loi qui est taillée contre Huawei.

Quelle attitude tenir face à Huawei, à qui l’on prête d’avoir un agenda caché au profit de Pékin ? Pour la majorité présidentielle, la réponse coule de source : il faut prendre des mesures pour restreindre et encadrer les activités de l’équipementier chinois en France, afin d’éviter que celui-ci ne soit un problème pour la sécurité des réseaux de télécommunications.

Et cela, même si les preuves de liens secrets entre l’entreprise chinoise et l’Empire du milieu, si elles existent, n’ont pour l’heure pas été mises sur la place publique.

Huawei au CES // Source : Kārlis Dambrāns

Huawei est leader sur la 5G, mais inquiète. // Source : Kārlis Dambrāns

Malgré cette absence d’éléments tangibles permettant de documenter les suspicions dont fait l’objet Huawei, les députés de La République en marche ont malgré tout déposé le 20 février une proposition de loi à l’Assemblée nationale « visant à préserver les intérêts de la défense et de la sécurité nationale de la France dans le cadre de l’exploitation des réseaux radioélectriques mobiles ».

Certes, le nom de l’équipementier chinois n’est jamais donné dans le texte de loi — après tout, la loi doit être générale et impersonnelle. Il n’est pas non plus fait référence à la Chine. Mais le contexte dans lequel cette proposition de loi — qui a l’avantage de ne pas avoir à se soumettre à une étude d’impact ou à l’avis du Conseil d’État, contrairement à un projet de loi — suffit à comprendre qui est visé.

Huawei suscite la méfiance

Car en France comme ailleurs dans le monde, Huawei suscite la méfiance.

Différents leviers sont envisagés pour limiter le déploiement de l’équipementier sans pour autant se fâcher avec Pékin. En outre, Paris ne tient pas non plus à verser dans une position extrême qui consisterait à exclure purement et simplement la société, alors qu’elle est aussi l’un des leaders dans le domaine de la 5G, la future génération qui sera bientôt déployée dans l’Hexagone.

Sont envisagés l’interdiction d’utiliser les produits du groupe dans le cœur des réseaux des opérateurs, l’exclusion en Île-de-France (où figure les principaux lieux de pouvoir), la fixation d’une limite de présence à 50 % sur un même réseau et la création d’un régime d’autorisation préalable durci et étendu. Un accès au code source, une exclusion des marchés publics et une surveillance par les services spécialisés de l’État pourraient aussi être au programme.

En l’espèce, la proposition de loi propose « un régime d’autorisation préalable, fondé sur des motifs de défense et sécurité nationale, des équipements des réseaux radioélectriques ». Cette autorisation préalable sera délivrée par le Premier ministre, qui pourra s’appuyer sur le Secrétariat général de la défense et de la sécurité nationale (SGDSN) et l’Agence nationale de la sécurité des systèmes d’information (ANSSI).

Charge alors à Matignon, éclairé par les informations de ses services spécialisés, de dire « s’il existe un risque sérieux d’atteinte aux intérêts de la défense et de la sécurité nationale » pour tel ou tel matériel, en tenant compte des dispositions législatives et des « garanties que présente l’équipement pour l’intégrité, la sécurité et la continuité de l’exploitation des réseaux et services de communications électroniques ».

Les députés expliquent que cette loi permet de tenir compte des « obligations légales qui pourraient contraindre leurs fournisseurs à coopérer avec des autorités étrangères dans la collecte de renseignement ». En Chine, la loi exige de toutes les entreprises qu’elles soutiennent le travail de renseignement national et qu’elles coopèrent avec lui — une spécificité que l’on retrouve cela dit dans d’autres pays.

Si le texte passe en l’état, il concernera tous les appareils installés depuis le 1er février 2019 en France. Dans la mesure où ce sont les équipements relatifs à la 5G qui sont visés, il n’est de toute façon guère nécessaire de s’attarder énormément sur les anciennes installations. Quant aux sites 5G déjà déployés, ceux-ci sont avant tout conçus à des fins de test. La 5G en France ne sera une réalité qu’à partir de 2020. Au mieux.

Source : Numerama

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