Le ministre de l’Intérieur polonais a appelé l’Union européenne à envisager l’exclusion de Huawei des marchés publics dans les télécoms.

Le temps passe et les difficultés s’amoncellent pour Huawei : l’équipementier chinois est ouvertement soupçonné en Occident de travailler en sous-main pour le compte de Pékin. Résultat, alors que le déploiement de la 5G — la prochaine génération de la téléphonie mobile — pointe à l’horizon dans un nombre croissant de pays, le géant des télécoms asiatique est traité comme un indésirable.

Et les voix appelant à se passer de ses services pour les marchés publics se font de plus en plus entendre.

Arrestations et accusations en Pologne

Dernier exemple en date, celui de la Pologne. Le 13 janvier, le ministre de l’Intérieur et de l’Administration, Joachim Brudziński a lancé un appel à l’Union européenne et à l’OTAN pour les inviter à travailler sur une position commune à propos de l’exclusion éventuelle de Huawei de leurs marchés, rapporte le Guardian. À la radio, il a jugé que certains secteurs devaient être préservés.

Une telle déclaration d’un membre gouvernemental ne doit rien au hasard : elle survient au moment où un employé de Huawei a été interpellé dans le pays au prétexte que celui-ci s’adonnait à de l’espionnage. Un autre homme, polonais cette fois, a aussi été arrêté. En parallèle, les bureaux du groupe chinois en Pologne et le siège de l’autorité des télécoms ont été perquisitionnés.

Face à ces récents développements, Huawei a réagi promptement : non seulement la société s’est distanciée de son salarié, mais elle a aussi procédé dans la foulée à son licenciement. L’individu n’a pourtant pas été jugé, mais l’entreprise chinoise a mis en avant le fait que cette histoire écorne son image de marque et alimente des rumeurs qui, jusqu’à présent, n’ont pas été étayées.

L’Union européenne entendra-t-elle l’appel du ministre polonais ? Andrus Ansip, qui officie en tant que commissaire du marché unique du numérique, a en tout cas admis qu’il y a des inquiétudes légitimes. Ainsi, l’homme fort de la Commission a noté que ces sociétés sont susceptibles d’être contraintes de coopérer avec les services de renseignement chinois pour obtenir certains secrets occidentaux.

Une précédente arrestation avait fait couler beaucoup d’encre en fin d’année : celle de la directrice financière de Huawei. Interpellée au Canada à la demande des USA, l’intéressée est au cœur d’une crise diplomatique entre Ottawa et Pékin. Cependant, les raisons pour lesquelles elle a été arrêtée ne sont pas liées aux soupçons d’espionnage, mais portent sur une possible violation de l’embargo contre l’Iran.

Suspicions occidentales

La polémique concernant Huawei n’est pour l’heure soutenue par aucun début de preuve. Il n’en demeure pas moins que quelques pays ont commencé à restreindre l’accès à leurs marchés, au nom de la sécurité nationale : c’est le cas par exemple des États-Unis et de ses proches alliés, comme l’Australie et la Nouvelle-Zélande. D’autres pays proches adoptent pour l’heure une posture plus prudente.

C’est le cas du Canada, du Royaume-Uni, de l’Italie, de la Corée du Sud, de l’Allemagne, de la Belgique ou encore de la France. Si certains de ces États sont en passe de fermer la porte à Huawei, d’autres temporisent dans l’attente de nouveaux éléments, pour trancher, que ce soit des rapports issus des agences de renseignement ou bien des preuves de Huawei de sa bonne foi.

Le logo SFR sur fond blanc // Source : SFR

Le logo SFR sur fond blanc

Source : SFR

Sur ce sujet, la France reste pour l’instant à la croisée des chemins : si SFR a déjà signé avec l’équipementier chinois pour une antenne 5G de test, Orange, lui, préfère se tenir à distance (dans l’Hexagone, en tout cas).

Quant à Paris, elle refuse de donner à Huawei l’agrément l’autorisant à fournir les routeurs de cœur de réseau pour les opérateurs. Bruno Le Maire a pour sa part affiché un tiède soutien à l’entreprise, en ménageant la chèvre et le chou : il a certes souligné que les investissements chinois sont les bienvenus, mais que ce qui relève des infrastructures critiques sera supervisé par l’exécutif.

Pékin demande que cela cesse

Et Pékin dans tout ça ? Alors que Huawei passe son temps à démentir les soupçons à son encontre, le gouvernement chinois, par la voix d’une porte-parole du ministère des Affaires étrangères a demandé à toutes les parties concernées « de cesser les fabrications infondées et les restrictions déraisonnables à l’égard de Huawei et d’autres entreprises chinoises ».

« Utiliser des raisons de sécurité pour médiatiser, entraver ou restreindre la coopération normale entre les entreprises ne fera finalement que nuire à ses propres intérêts », a-t-elle ajouté, estimant que « certaines personnes » cherchent à utiliser des accusations sans fondement pour « supprimer et restreindre le développement des entreprises technologiques chinoises à l’étranger ».

Source : Numerama

Abonnez-vous gratuitement à Artificielles, notre newsletter sur l’IA, conçue par des IA, vérifiée par Numerama !