Il y a assurément une intention louable derrière le portail d’informations pour les jeunes de Facebook. Sa forme, par rapport à la cible qu’il vise, nous laisse dubitatifs.

Le 15 mai 2018, Facebook est heureux de présenter son Portail pour les jeunes, disponible en 60 langues. Le réseau social met en avant quatre grands axes développés sur ce portail : des informations pédagogiques, des témoignages d’utilisateurs, des conseils et des tutoriels pratiques. En somme, il s’agit d’une boîte à outils numériques qui s’adresse à celles et ceux qui souhaiteraient en apprendre plus sur la manière d’utiliser Facebook et qui entrent dans la catégorie « jeune ».

Mais une fois la page d’accueil ouverte, le doute s’installe dans nos esprits. D’emblée, les « jeunes » ne sont pas le sujet de la page, mais l’objet. Les titres ne s’adressent pas à eux, mais à des tiers — parents, professeurs, journalistes ? — qui pourraient envoyer ces « jeunes » vers les ressources disponibles sur la page. Et pourtant, les paragraphes contredisent cette première analyse : « Jetez un œil : ces ressources ont été élaborées spécialement pour vous, vos ami(e)s et vos expériences réelles en ligne et hors ligne. » Maladresse et froideur des tournures. Quelle est véritablement l’audience jeune de Facebook ? Un ado va-t-il se sentir concerné par des sentences professorales et des punchlines qui ne s’adressent pas à lui ? Allons plus loin.

Un « jeune » lira-t-il un jour ces pages ?

Venant d’une entreprise qui mise énormément ces dernières années sur les stories et la vidéo, qui a créé des modes d’interaction sur le web (comme la timeline ou le like) et qui sait aussi faire le meilleur sur le fond et la forme sur des sujets fondamentaux, on s’attend à ce que des pages pour les jeunes aient été réfléchies et millimétrées pour présenter des informations claires et agréables à lire, concises, sous des formes innovantes, immédiates et interactives.

Il n’en est rien : le portail est un recueil de conseils tout ce qu’il y a de plus touffu. Certes, Facebook a créé des gif mignons, mais les textes sont tous des blocs longs et verbeux, qui s’écartent même des critères de la mise en page web connus appliqués depuis des années (pas de mur de texte, pas de paragraphes justifiés…).

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Quand on fait le constat début mai 2018 que la story (soit une image avec très peu de texte, facilement consommée) devient plus populaire que la timeline, portée par une nouvelle génération d’utilisateurs du web qui a été formée à l’image plus qu’au texte, on se demande vraiment si la forme de cette base ne dessert pas son intention.

D’autant que les conseils, nombreux et détaillés, passent pour un manuel d’utilisation que tout le monde devrait lire avant d’utiliser Facebook — ou n’importe quel service. Les rubriques devraient intéresser tout utilisateur du web, jeune ou moins jeune : créer un bon mot de passe, sécuriser son compte avec la double authentification, vérifier la portée de ses publications, signaler des faux comptes, examiner les identifications…

Entre la sécurité, la confidentialité, la vie privée, l’e-réputation ou encore le piratage de compte, la page de Facebook ressemble en effet à un B.A.-BA de l’utilisation du web moderne. Et, s’ils n’étaient pas mieux mis en page et plus agréables à lire sur Numerama, nous pourrions tout à fait vous inviter à lire ces conseils pour parfaire votre connaissance des enjeux du numérique.

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Pour autant, l’enrobage « jeune » parvient difficilement à passer. D’un côté, il est possible que Facebook se soit trompé dans sa manière d’adresser un message à ses utilisateurs les moins âgés — les mauvaises langues diront que c’est un signe de plus du vieillissement de sa base. De l’autre, on se demande bien volontiers si ces pages ne sont pas adressées, en fin de compte, aux parents, aux juristes et aux élus, qui cherchent en ce moment à définir la majorité numérique sans consentement nécessaire d’un adulte ou titulaire à 15 ans.

Entre 13 et 15 ans — le RGPD invitait les états à choisir un seuil entre 13 et 16 ans –, il faudra donc peut-être en France et dans d’autres pays recueillir un consentement parental bien difficile à obtenir sur le web — si ce n’est techniquement impossible. La première étape vers ce consentement idéalisé n’est-elle pas l’information et la publication de pages qui montrent la bonne foi du service ?

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