De la reconnaissance faciale partout dans l’espace public ? Si l’opinion publique y est hostile aujourd’hui, le ministre de la Justice Gérald Darmanin estime que le pays y viendra dans quelques années — notamment dans le cadre de la lutte contre le trafic de drogue, qui prend de plus en plus d’ampleur dans le pays.

La France finira par se faire à l’idée de la reconnaissance faciale partout. C’est la conviction manifestée par le ministre de la Justice Gérald Darmanin ce 23 mai 2025 à l’occasion d’une intervention sur RTL. Selon lui, l’emploi de caméras de vidéosurveillance couplées à cette technologie biométrique est clé dans la lutte contre le trafic de drogues.

En réalité, le garde des Sceaux considère qu’il existe deux leviers décisifs pour combattre le narcotrafic : la disparition de l’argent liquide, parce que les transactions avec des pièces et des billets sont intraçables, et la montée en puissance d’une surveillance vidéo avec la capacité d’identifier en temps réel les visages, pour renseigner les forces de l’ordre.

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La disparition de l’argent liquide est aussi un levier potentiel contre la drogue, selon le ministre. // Source : scrisman

Idéalement, il en faudrait partout, a avancé le ministre. « Je suis favorable à la reconnaissance faciale dans l’espace public et dans les aéroports », a-t-il lancé, avant toutefois de reconnaitre que l’opinion publique est tout à la fois contre la suppression de l’argent liquide et contre la reconnaissance faciale… et pourtant demandeuse de plus de sécurité et d’un plan antidrogue.

Un trafic de drogue en hausse en France

Cette prise de parole du ministre survient alors que la France est confrontée à un trafic et une consommation de drogues en hausse, dans les grandes villes comme dans les territoires ruraux. Le journaliste italien Roberto Saviano, expert du grand banditisme, prévient même que les mafias de la drogue en France ont pris une ampleur hors norme.

Elle arrive également tandis qu’a eu lieu récemment l’opération dite « Prison Break ». Lancée en octobre 2024 par la section de lutte contre la cybercriminalité, elle a notamment permis la saisie de 164 téléphones illicites se trouvant dans les prisons (dont 88 miniatures) et 500 autres téléphones destinés à la vente.

Prison Break // Source : Netflix
Oui, l’opération s’est bien appelée « Prison Break ». // Source : Netflix

C’est dans ce contexte qu’a été votée récemment la proposition de loi visant à sortir la France du piège du narcotrafic avec diverses mesures pour enrayer le phénomène : quartiers de prison sécurisés pour les trafiquants, nouveau parquet national anticriminalité organisée, techniques d’enquête renforcées, dossier coffre (pour cacher des informations sensibles)…

Ce texte avait d’ailleurs tenté d’intégrer une mesure ciblant les messageries chiffrées, afin d’accéder au contenu des échanges. Malgré l’engagement du ministre de l’Intérieur Bruno Retailleau en sa faveur, le Parlement s’y était opposé. La disposition était très controversée. Certaines plateformes étaient montées au créneau, comme Signal et Telegram.

Rendez-vous dans cinq ou dix ans

Malgré tout, Gérald Darmanin pense que ce n’est qu’une question de temps avant que la France finisse par se convertir à la reconnaissance faciale dans l’espace public. « Il y a vingt ans, on disait beaucoup de mal des caméras de vidéosurveillance. Maintenant, je crois qu’il n’y a plus grand monde qui les conteste. »

caméra vidéosurveillance
Bientôt de la reconnaissance faciale couplée aux caméras dans tout l’espace public ? // Source : Alex Knight

De toute évidence, on y vient graduellement. L’affaire Briefcam, un logiciel de reconnaissance faciale utilisé discrètement par la police depuis des années, en est un exemple. La vidéosurveillance algorithmique, pour l’heure limitée à des situations spécifiques, en est un autre. Aujourd’hui, on cherche à la prolonger. Et demain, à en étendre les capacités ?

Et si « aujourd’hui l’opinion publique ne semble pas prête », le ministre de la Justice s’est livré à une prédiction : d’après lui, « dans cinq ou dans dix ans, on fera de la reconnaissance faciale », car c’est son « langage de vérité » et qu’il n’y a pas mieux « si on veut vraiment lutter contre l’insécurité et contre la drogue ». Et tant pis s’il n’a pas toujours été pour.

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