Ce week-end, le hashtag #SarkozyCensure s’est imposé parmi les mots clés les plus populaires sur Twitter. La raison : Twitter a suspendu de nombreux comptes qui parodiaient Nicolas Sarkozy. Faut-il pour autant y voir une « censure politique » ? Pas sûr.

Mise à jour 2 : Interrogé par Le Monde, l’équipe de campagne de Nicolas Sarkozy confirme être à l’origine de la demande de la suppression du compte parodique @_NicolasSarkozy, sur le fondement de l’usurpation d’identité, comme de l’ensemble des comptes utilisant le nom du président-candidat. « En revanche, le membre de l’équipe de Nicolas Sarkozy affirme aucune action n’a été entreprise pour d’autres comptes parodiques n’utilisant pas le nom du candidat, notamment @mafranceforte ou @sarkocasuffit« , indique le quotidien.

Mise à jour : Selon France Inter, qui doit révéler plus de détails dans son édition de 13 heures, l’UMP serait bien à l’origine des demandes de suspensions de compte. La polémique promet de prendre de l’ampleur.

Les accusations de censure fusent à l’encontre du service de micro-blogging américain. Internet Sans Frontières a accusé dimanche Twitter d’avoir suspendu plusieurs comptes d’utilisateurs anti-Sarkozy depuis la déclaration de candidature du président Nicolas Sarkozy. « Le point commun de ces comptes est leur caractère parodique et caricatural de la campagne présidentielle du Président sortant Nicolas Sarkozy. Internet Sans Frontières est préoccupée par la censure politique opérée par ce réseau social à moins de 62 jours de l’élection présidentielle française« , indique l’association.

Les comptes ainsi suspendus sont ceux de @MaFranceForte, @ForteFrance, @SarkozyCaSuffit et @_NicolasSarkozy. Ce dernier est celui dont la fermeture fera sans doute le plus polémique, puisqu’il avait été créé dès septembre 2010, et qu’il était connu pour son caractère parodique, et décrit comme tel. « Il ne violait donc pas les conditions générales d’utilisation de Twitter, qui précisent qu’en cas de compte parodique, la mention précisant le caractère caricatural ou parodique du compte doivent figurer dans l’intitulé de celui-ci« , note ISF. Depuis son communiqué, d’autres comptes ont connu le même sort, en particulier @SarkozyCestFini.

Dans ses conditions d’utilisation, Twitter indique qu’il est « interdit d’usurper l’identité d’autres personnes via le service Twitter de manière susceptible d’induire en erreur ou tromper« . Le service précise également que « les comptes créés pour remplacer le comptes suspendu seront également suspendus« .

Dans ses règles relatives à l’usurpation d’identité, Twitter explique que les personnes qui s’estiment victimes peuvent déposer une plainte auprès du service, ou le faire par l’intermédiaire d’un représentant. Sur son blog, l’auteur de @_NicolasSarkozy, Kaboul, estime donc que « c’est manifestement suite à une dénonciation que notre compte est suspendu« , et que « nous estimons qu’il s’agit d’un cas proprement ahurissant de censure politique« .

Parler de censure politique orchestrée par Twitter nous semble toutefois largement exagéré. Il s’agit plus probablement d’une utilisation massive et soudaine des outils qui permettent aux internautes de dénoncer un compte « abusif ». Si les dénonciations sont suffisamment nombreuses, le compte est automatiquement suspendu par Twitter. Contrairement à ce qui a été allégué, il n’est pas nécessaire que l’équipe de campagne de Nicolas Sarkozy (en particulier son stratège numérique Nicolas Princen) demande la suspension des comptes. Tout militant ou sympathisant UMP, et n’importe quel internaute, peut signaler les comptes qu’il estime abusifs, y compris pour usurpation d’identité. Twitter prévient simplement que « si l’usurpation d’identité ne vous concerne pas directement et que vous n’êtes pas légalement autorisé à agir au nom de la personne en question, Twitter enquêtera le problème mais n’est pas tenu de prendre des mesures contre le compte en question« .

Si les suspensions ne sont pas une censure active de la part de Twitter, elles témoignent en revanche d’une certaine conception de la liberté d’expression de la part de ceux qui cherchent ainsi à protéger Nicolas Sarkozy de toute caricature. Comme le note le journaliste Frédéric Martel, « les comptes parodiques hostiles à François Hollande sont également nombreux, tels @FrancoisHolland @PsyHollande @DehorsHollande ou encore @FranHollande, et ne semblent pas, à ce jour, avoir été désactivés« .

Ces suspensions démontrent en tout cas que les procédures de Twitter sont à revoir, pour y apporter une plus forte dose de contradictoire. L’utilisateur dont le compte est suspendu devrait avoir le droit de se défendre avant l’exécution de la suspension, en particulier pour les comptes anciens qui connaissent déjà un certain nombre d’abonnés.


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