Le timing a de quoi faire sourire. Le jour même de la promesse faite par Amazon de se fournir entièrement en sources d’énergie renouvelable en 2030 et d’atteindre dix ans plus tard la neutralité carbone, ce qui se traduit d’ores et déjà par la commande de 100 000 vans électriques, Google s’est fait remarquer en affirmant que son groupe était déjà à zéro émissions nettes depuis… 2007.
Mais surtout, la firme de Mountain View a enfoncé le clou en annonçant 18 nouveaux contrats énergétiques, en Europe du nord, aux États-Unis et au Chili. Ensemble, ils représentent la production de 1 600 MW, obtenus grâce à des fermes de panneaux solaires et des champs d’éoliennes. Selon Sundar Pichai, patron de Google, il s’agit du « plus gros achat d’énergie renouvelable à ce jour » par le groupe.
Quand tous ces programmes seront actifs, Google aura accès à une production totale de 5 500 MW. Pour avoir un ordre d’idée, c’est plus qu’il n’en faut pour alimenter la capitale américaine ou des pays comme la Lituanie et l’Uruguay pendant un an. Et surtout, Google déclare que sa consommation électrique est entièrement assurée par les sources d’énergie renouvelable depuis 2017.
Dans ces conditions, le contraste avec Amazon est forcément violent. Amazon vise 2024 pour passer le palier des 80 % de sources d’énergie renouvelable et 2030 pour celui des 100 %. Soit un écart de presque quinze ans avec Google. Quant à la neutralité carbone, elle est à un horizon encore plus lointain. Cependant, les activités d’Amazon sont très différentes de celles de Google.
Modèle d’entreprise différent de Google
Certes, les deux entreprises se rejoignent dans de nombreux domaines, avec des solutions dans l’hébergement informatique et les services (Twitch, Prime Video, AWS, etc.), mais la firme de Seattle est aussi et surtout le leader du e-commerce, avec d’immenses entrepôts, une logistique infernale, des transports à foison (y compris des avions, qui sont loués par dizaines), afin de livrer plus de 10 milliards de colis par an.
C’est pour cela qu’Amazon n’a pas pu aller aussi vite que certains autres groupes, suggère Jeff Bezos en filigrane.
« Si une entreprise disposant d’autant d’infrastructures physiques qu’Amazon peut respecter les Accords de Paris avec 10 ans d’avance, alors n’importe quelle entreprise peut y arriver », assure l’homme le plus riche du monde. Ces accords prévoient que d’ici 2050, les émissions mondiales de gaz à effet de serre doivent être réduites d’au moins 50 % par rapport aux niveaux de 1990.
Cependant, même en tenant compte de ce profil d’entreprise particulier, Amazon ne peut guère le brandir comme une excuse : depuis des années, l’entreprise américaine se prend blâme sur blâme de la part de Greenpeace, dans le cadre de rapports annuels sur l’impact environnemental des services dans le cloud, c’est-à-dire des services qui reposent sur de vastes centres de traitement de données.
Début 2017 par exemple, l’ONG observait que 30 % de l’approvisionnement d’Amazon se reposait sur le charbon. Suivaient ensuite le nucléaire, à 26 %, une énergie très faiblement carbonée (mais qui produit des déchets radioactifs qu’il faut gérer), le gaz, à 24 %, et enfin les énergies d’origine renouvelable, à 17 %. La plateforme AWS recevait alors la note globale de C, ce qui est médiocre.
Il reste désormais à savoir si Amazon tiendra ses engagements — ce qui n’a pas toujours été le cas par le passé, d’après Greenpeace –. Nul doute que la trajectoire de l’entreprise sera scrutée avec attention, sur cet objectif comme sur les autres promesses formulées par Jeff Bezos, qu’il s’agisse de son lobbying en faveur du climat ou de ses investissements dans la reforestation.
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