De nouveaux signaux d’ondes gravitationnelles témoignent de l’existence de systèmes qui n’avaient jamais encore été détectés. Des scientifiques présentent la fusion inédite de « couples mixtes », constitués d’un trou noir et d’une étoile à neutrons.

C’est une fusion inédite de « couples mixtes » qui vient d’être détectée dans l’Univers. Pour la toute première fois, des ondes gravitationnelles provenant d’une rencontre entre un trou noir et une étoile à neutrons ont été interceptées, rapporte le CNRS dans un communiqué le 29 juin 2021. La découverte est détaillée dans la revue The Astrophysical Journal Letters. Comme l’explique l’organisme public de recherche, il s’agit d’ « un nouveau type de cataclysme cosmique » et d’une « nouvelle pièce […] ajoutée au catalogue des phénomènes cosmiques ».

Les auteurs rapportent l’identification de deux événements, baptisés GW200105 et GW200115, en janvier 2020 (respectivement le 5 puis le 15 janvier). « Les observations de GW200105 et GW200115 sont cohérentes avec les prédictions de fusion entre étoiles à neutrons et trous noirs et avec les observations de trous noirs et d’étoiles à neutrons dans la Voie lactée », écrivent les scientifiques. Les niveaux de confiance associés aux signaux sont différents : celui de GW200105 n’est pas élevé, mais la forme du signal plaide en faveur d’une origine astrophysique. La détection a été réalisée à l’aide du réseau de détecteurs LIGO et Virgo, des observatoires d’ondes gravitationnelles respectivement installés aux États-Unis et en Italie.

Un type de système théorisé, mais encore jamais détecté

Ces signaux d’ondes gravitationnelles « représentent les premières observations fiables à ce jour de binaires étoile à neutrons-trou noir via n’importe quel moyen d’observation », décrivent les scientifiques dans l’étude. Grâce à LIGO et Virgo, des fusions de couples de trous noirs (on parle aussi de trous noirs binaires), ou de couples d’étoiles à neutrons (des résidus issus de l’effondrement d’étoiles massives arrivées en fin de vie), ont déjà pu être étudiées. Les ondes gravitationnelles associées à GW200105 et GW200115 montrent l’existence de nouveaux types de systèmes déjà théorisés, mais encore jamais détectés, à savoir des « couples mixtes » composés d’un trou noir et d’une étoile à neutrons.

Représentation du phénomène. // Source : Deborah Ferguson (UT Austin), Bhavesh Khamesra (Georgia Tech), and Karan Jani (Vanderbilt)

Représentation du phénomène.

Source : Deborah Ferguson (UT Austin), Bhavesh Khamesra (Georgia Tech), and Karan Jani (Vanderbilt)

La détection des ondes gravitationnelles a permis, en quelques années déjà, de faire de grands progrès dans la connaissance d’objets cosmiques massifs. Ces ondulations invisibles et voyageant à la vitesse de la lumière dans l’espace peuvent renseigner sur les caractéristiques de systèmes binaires. Ainsi, pour cette nouvelle détection, les scientifiques ont pu déterminer que :

  • GW200105 est issu de la fusion d’un trou noir de 8,9 fois la masse du Soleil, et d’une étoile à neutrons 1,9 fois plus massive que le Soleil. Leur collision s’est produite il y a 900 millions d’années,
  • GW200115 est issu de la rencontre entre un trou noir de 5,7 masses solaires, et d’une étoile à neutrons de 1,5 fois la masse du Soleil. Leur fusion est survenue il y a 1 milliard d’années.

Le trou noir n’aurait fait qu’une bouchée de son compagnon

Ce sont les différences de masses entre les objets de chaque système qui ont mis les scientifiques sur la voie pour comprendre qu’il s’agissait de « binaires mixtes ». Dans chaque binôme, la masse la plus imposante correspond à celle d’un trou noir, et la plus légère à celle d’une étoile à neutrons. Comme le précise le CNRS, l’écart entre les masses est tel qu’il pourrait expliquer pourquoi aucun signal lumineux n’a été perçu à l’aide de télescopes. Lorsqu’une étoile à neutrons s’approche un peu trop près d’un trou noir, on s’attend à ce qu’elle soit déchirée par les forces de marée, ce qui émettrait alors un rayonnement. Mais, pour ce qui concerne GW200105 et GW200115, le trou noir de chaque système a probablement gobé très rapidement l’étoile à neutrons, « en une seule bouchée », pour reprendre l’expression du CNRS.

Représentation de GW200115. // Source : T. Dietrich (Potsdam University and Max Planck Institute for Gravitational Physics), N. Fischer, S. Ossokine, H. Pfeiffer (Max Planck Institute for Gravitational Physics)

Représentation de GW200115.

Source : T. Dietrich (Potsdam University and Max Planck Institute for Gravitational Physics), N. Fischer, S. Ossokine, H. Pfeiffer (Max Planck Institute for Gravitational Physics)

Il reste encore des questions en suspens, notamment la manière dont ces binaires ont pu se former. Plusieurs hypothèses sont envisagées :

  • Un couple d’étoiles, en orbite l’une autour de l’autre. À la fin de leur vie, les deux membres deviendraient un trou noir et une étoile à neutrons, toujours liés ensemble.
  • Les deux éléments se seraient formés séparément dans un milieu stellaire dense, avant de se rejoindre. C’est l’hypothèse de l’interaction dynamique.

Pour espérer mieux comprendre ces systèmes binaires « mixtes », d’autres détections seront probablement nécessaires. « Compte tenu de leurs masses constitutives significativement inégales, les futures observations des systèmes d’étoile à neutrons-trou noir offriront de nouvelles opportunités d’étudier la matière dans des conditions extrêmes », concluent les scientifiques.


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