Avec un objectif (très ambitieux) de 700 000 tests réalisés par semaine, le dépistage est l’un des enjeux majeurs du déconfinement. La stratégie gouvernementale repose sur différents types de tests, répondant à diverses questions et utilisant plusieurs procédés. Certains tests sont-ils réservés au personnel médical ? Quelle est la différence entre un test salivaire et un test sanguin ? Peut-on faire confiance à tous les tests ? Numerama fait le point.
Quels sont les différents types de tests ?
Il existe deux grandes familles de tests : les tests PCR et les tests sérologiques. Les premiers sont réalisés par prélèvements nasaux et permettent de savoir si les personnes testées sont, au moment de l’analyse, porteuses du virus. Au début réservés au personnel médical et aux personnes gravement malades, ils sont depuis le 11 mai disponibles aux personnes présentant des symptômes, munies d’une ordonnance médicale ou non. Ces tests sont forcément réalisés par des professionnels de santé, en hôpital ou bien en laboratoires d’analyse. Les résultats sont ensuite disponibles jusqu’à deux jours après le prélèvement, en fonction de la demande. Des variantes aux tests PCR sont en train d’être développées, qui permettraient d’avoir les résultats plus rapidement.
Les tests sérologiques
Les tests sérologiques sont la deuxième grande famille de tests. Ils ne disent pas si les personnes sont porteuses de la maladie, mais si elles ont développé des anticorps contre la Covid 19, c’est-à-dire si elles ont été en contact à un moment donné avec Sars-CoV-2. Ils testent plus précisément la présence d’anticorps IgG et IgM, qui se développent à différents stades de la maladie, à partir d’échantillons de sang. Ainsi, ces tests permettent de voir si une personne, même si elle n’a jamais présenté de symptômes, a bien été infectée : comme Numerama l’expliquait déjà en mars, cette méthode de tests permet de faire une idée plus précise de « la véritable échelle de la pandémie ». Les résultats arrivent plus rapidement que pour les tests PCR, parfois en quelques dizaines de minutes à peine.
Les tests sérologiques sont eux-mêmes répartis en plusieurs catégories, les « tests rapides », réalisés à partir d’une goutte de sang, et les tests « Elisa », automatisables et nécessitant du matériel précis afin de pouvoir être réalisés.
Parmi les tests rapides, les TRD (tests diagnostiques rapides), et les TROD (tests rapides d’orientation diagnostiques), que la Haute Autorité de Santé préconise dans certains cas par rapport aux tests Elisa, car ils nécessitent moins de matériel. Ils doivent néanmoins tous deux être réalisés par des professionnels de santé et sur ordonnance.
Quels tests sont fiables ?
Le gouvernement a mis en ligne vendredi 22 mai la liste des 91 tests, PCR et sérologiques, dont la fiabilité est reconnue par les Centres Nationaux de Références, chargés de la vérification de leur sureté. La fiabilité des tests sérologiques a dans un premier temps été critiquée par le gouvernement, notamment le trop fort taux de faux négatifs et de faux positifs. Ces doutes ont depuis été levés par des évaluations de la Haute Autorité de Santé et des CNR, en se basant sur un cahier des charges et des critères très précis. Les tests sérologiques reconnus doivent avoir un marquage CE (Conformité Européenne), et démontrer un seuil de sensibilité clinique, soit un taux de fiabilité entre entre 90 % et 95 % pour les cas positifs et de 98 % pour les cas négatifs.
Il reste cependant des incertitudes quant à l’aspect immunisant du virus : la présence d’anticorps pourrait ne pas protéger systématiquement contre une nouvelle infection, prévient le gouvernement.
Les auto-tests sont-ils utiles ?
Une dernière catégorie de tests sérologiques existe : les autotests. Disponibles à la vente sur Internet, ces tests sont, comme leur nom l’indique, à réaliser soi-même. Il n’y a donc pas besoin d’ordonnance pour les faire. Ils comprennent plusieurs parties : une languette sur laquelle on déposera la goutte de sang, un stylo autopiqueur, un flacon de sérum physiologique, une pipette, et une lingette désinfectante. Pour faire fonctionner les autotests, il faudra se piquer le bout du doigt avec le stylo après l’avoir désinfecté avec la lingette, déposer la goutte de sang sur la languette, mettre à l’aide de la pipette du sérum physiologique, et attendre le résultat.
Bien qu’on les trouve facilement sur Internet, ces tests ne sont pas encore approuvés par la haute Autorité de Santé. Dans un rapport rendu public le 18 mai 2020, elle estimait avoir identifié « deux freins majeurs à leur utilisation ». « Il existe à ce jour très peu de données scientifiques sur les performances des autotests pour le diagnostic du COVID-19 en vie réelle. À cette incertitude sur la fiabilité de ces tests, s’ajoute une difficulté d’utilisation : si la réalisation du prélèvement est simple, il n’en est pas de même pour la lecture et l’interprétation du résultat. Sans accompagnement, le patient prend le risque de tirer des conclusions erronées de ce test. Compte tenu de ces éléments, la HAS considère qu’il est prématuré de recommander l’utilisation des autotests sérologiques pour le diagnostic du COVID-19 à ce jour ». C’est pour cette raison qu’on ne retrouve pas les autotests dans la liste officielle du gouvernement.
Ce n’est pas tout : l’origine de certains autotests mis en vente en ligne est au mieux difficilement traçable, au pire douteuse. Sur Internet, il est en effet facile de prétendre répondre aux critères de la HAS, ou bien de vendre des tests ne servant pas à grand-chose. C’est le cas du laboratoire lithuanien Sololab, qui met en vente des autotests. Sololab précise que « si un résultat positif est obtenu, il faut impérativement le confirmer en faisant un autre test. Si le résultat est négatif, cela ne signifie pas que la personne testée n’est pas porteuse du virus ». Autrement dit, après avoir déboursé au minimum 23 euros (le site indique que, en dehors de la promotion actuelle, les tests sont vendus plus de 70 euros pièce), il faudra à nouveau faire un autre test, peu importe le résultat.
Ce n’est pas le seul exemple : le site « testezmoi.fr » revend des tests chinois « approuvés par des pays européens », même s’ils ne font pas encore partie de la liste éditée par le gouvernement français. Enfin, le site français Praxisdienst vend un test à 99 euros l’unité, qui ne présente aucune certification française ou européenne. Il est donc peu recommandé de s’en procurer sur Internet pour l’instant, même si les tests semblent à première vue être fiables.
Interrogé sur la légalité de la vente en ligne de ces tests, le Ministère des Solidarités et de la Santé n’a pas répondu à nos questions.
La publicité est-elle autorisée ?
Certaines entreprises font également de la publicité pour leurs autotests, ce qui peut rajouter de la confusion. C’est encore le cas du lithuanien Sololab, qui a acheté des encarts publicitaires sur Facebook.
Ce n’est pas une pratique légale. La promotion des dispositifs médicaux sur Internet est strictement encadrée depuis 2014 par la Charte pour la communication et la promotion des produits de santé sur Internet et l’e-media de l’ANSM. La charte stipule notamment que « les fonctionnalités inhérentes aux réseaux sociaux ouverts (de type Facebook, twitter, youtube, etc.) » peuvent conduire à des abus : « la fonctionnalité “[x] personnes aiment” peut être interprétée, si elle est consacrée à un produit de santé, comme une attestation de guérison par le public ». Ainsi, à moins d’enlever la fonction de partage ou de « j’aime », ce qui est n’est pas le cas pour Sololab, ce type de publicité est prohibée.
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