Ce devait être le quatrième séjour d’Oleg Artemiev à bord de la Station spatiale internationale, après des missions conduites en 2014, 2018 et 2022. Mais finalement, le Russe ne sera pas du voyage. Roscosmos, l’agence spatiale russe, a dévoilé cette modification sur Telegram dans un message paru le 2 décembre 2025.
Officiellement, selon Roscosmos, Oleg Artemiev, qui devait partir pour six mois avec la Française Sophie Adenot au printemps 2026 à bord d’une capsule Crew Dragon de SpaceX (mission Epsilon), a été appelé à d’autres fonctions. « Cette décision a été prise en raison du changement de poste d’Oleg Artemiev », est-il écrit, sans plus de précision.
Il est remplacé par son compatriote Andreï Fediaïev. Roscosmos précise qu’il est cosmonaute depuis 2013 et qu’il a déjà été dans l’espace en 2023 lors de vol Crew-6, en tant qu’ingénieur de bord des expéditions 68 et 69. Il ne sera donc pas un novice sur le vol Crew-12 : il a déjà volé avec Crew Dragon et séjourné dans l’ISS.
Suspicion d’espionnage chez SpaceX
Tout ceci pourrait sembler très banal, mais le média indépendant russe The Insider, dont le travail est reconnu, donne une tout autre tonalité à l’affaire. Le site a écrit le 2 décembre qu’Oleg Artemiev a été écarté de Crew-12, car « il a photographié des documents de SpaceX et a ’emporté dans son téléphone des informations secrètes’ ».
Dans un article dédié à ce sujet, The Insider précise qu’Oleg Artemiev a été suspendu à la fin du mois de novembre, alors qu’il suivait une formation dans les locaux de SpaceX à Hawthorne, en Californie. Il aurait pris en photo les moteurs de SpaceX avec son téléphone, et d’autres documents internes de l’entreprise, puis aurait emporté le tout hors site.
Le caractère très évasif du communiqué de Roscosmos associé aux sources de The Insider laissent à penser que l’affaire est relativement grave.
« Être retiré du vol deux mois et demi avant la mission sans explication claire — c’est plutôt un signe indirect, mais révélateur », selon l’analyste Gueorgui Trichkine, cité par le média. « Il est difficile d’imaginer qu’un cosmonaute expérimenté commette une telle violation par inadvertance », a-t-il glissé, ce qui écarte la banale « gaffe ».
L’exclusion d’Oleg Artemiev, qui est également député à la Douma de Moscou et membre du parti Russie Unie, s’inscrirait, toujours selon The Insider, dans le cadre de la règlementation américaine dite ITAR, qui vise le trafic d’armes au niveau mondial. Ce cadre recouvre aussi le spatial, et interdit donc de vendre ou céder des composants ou des informations à certains pays.
La gravité des soupçons a par ailleurs entraîné l’ouverture d’une enquête inter-agences, selon les sources de l’analyste Gueorgui Trichkine.
À ce stade, l’agence spatiale américaine (Nasa) n’a pas encore réagi à ces changements de personnel — et semble ne pas vouloir le faire, à en croire les éléments de The Insider. Les comptes officiels de la Nasa et de l’ISS n’ont en tout cas pas réagi, dans la matinée du 3 décembre. Même chose du côté de SpaceX et de Sophie Adenot, dont les tweets se focalisent sur son entraînement et sa préparation.
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