Il est invisible, mais a pourtant pu être découvert à plusieurs milliards d’années-lumière de nous. Un objet n’émettant aucune lumière a été trouvé dans l’Univers. Il pourrait s’agir d’un ensemble constitué de matière noire.

Trouver de la matière noire dans l’Univers n’est pas une activité évidente. Par définition, cette substance — hypothétique — n’émet aucune lumière, ce qui la rend absolument invisible à nos télescopes. Pourtant, des moyens détournés permettent de « distinguer » des ensembles dans lesquels il pourrait peut-être y en avoir.

C’est tout l’objet d’une étude publiée le 9 octobre 2025 dans la revue Nature Astronomy. Des scientifiques de l’Institut Max-Planck d’astrophysique, et leurs collègues venant d’autres universités en Italie ou aux États-Unis, ont mis la main sur un objet intriguant qui semble constitué de cette incertaine matière noire.

Des télescopes qui regardent à travers une loupe gravitationnelle

Tout a commencé avec l’observation d’un autre phénomène appelé « anneau d’Einstein ». Il s’agit d’une sorte d’illusion d’optique dans laquelle un objet particulièrement massif, ici une galaxie gigantesque, déforme la lumière qui nous parvient. Cette modification est causée par la déformation importante qui est exercée sur l’espace-temps autour de l’objet, ce qui aboutit à une lentille gravitationnelle à nos yeux.

Résultat, ce qui se trouve derrière l’objet massif apparaît comme grossi et déformé, puisque les rayons lumineux — d’ordinaire rectilignes — émis par la source ont été déviés pendant leur trajet. Pour l’observateur, cela donne un rendu assez proche de ce que l’on voit par exemple avec une loupe.

Anneaux d'Einstein. // Source : ESA/Hubble.
Des exemples d’anneaux d’Einstein. // Source : ESA/Hubble.

Cette approche est particulièrement utile pour observer les objets les plus lointains de l’Univers. C’est aussi le cas avec cet objet repéré à 10 milliards d’années-lumière. Il a pu être décelé grâce à l’appui de plusieurs télescopes à travers le monde, notamment le réseau VLBI européen composé d’une multitude de radiotélescopes en Europe, en Asie, en Afrique du Sud ou à Porto Rico. Le Green Bank Telescope de Virginie occidentale et le VLBA d’Hawaï ont aussi été mis à contribution.

Ensemble, toutes ces ressources ont permis de mettre la main sur ce qui est décrit comme un objet compact, symétrique et qui aurait pu n’être qu’un classique trou noir supermassif. Mais des analyses plus poussées sur l’effet gravitationnel dans cette région ont montré qu’il s’agissait d’autre chose. Un arc gravitationnel se formait et il ne pouvait pas être expliqué uniquement par la présence des astres visibles alentour.

Un « petit grumeau » peut-être constitué de matière noire

Les auteurs de l’étude en ont donc conclu qu’il y avait un autre objet caché, certainement entre nous et les galaxies extrêmement distantes présentes en arrière-plan. Un objet d’une masse équivalente à un million de fois notre Soleil, ce qui est, aussi surprenant que cela puisse paraître, relativement peu.

Mais le plus étonnant, ici, c’est que cet ensemble suffisamment massif pour créer une distorsion gravitationnelle n’émet aucune lumière. Cela a poussé les auteurs à dire qu’ils avaient sans doute devant les yeux un « grumeau » de matière noire. Ces sortes de structures avaient déjà été observées auparavant, mais il s’agissait plutôt de nuages gigantesques. Ici, c’est la première fois qu’un objet aussi peu massif semble pouvoir être associé à la matière noire.

Galaxie dont la matière noire est cannibalisée (à droite) par une galaxie massive (gauche). // Source : Montes & al., The Astrophysical Journal (2020)
Galaxie dont la matière noire est cannibalisée (à droite) par une galaxie massive (gauche). // Source : Montes & al., The Astrophysical Journal (2020)

La découverte est particulièrement fascinante parce que si toute notre compréhension de l’Univers suppose l’existence de cette matière noire, sa nature nous échappe encore. Nous ne savons pas de quoi elle est constituée ni comment elle interagit avec la matière ordinaire, si tant est qu’il y ait une quelconque interaction.

Naturellement, les étapes suivantes vont nécessiter des analyses plus poussées de cette région spatiale, ce qui n’est pas simple en raison des distances gigantesques en jeu. Les scientifiques espèrent aussi pouvoir mettre la main sur d’autres phénomènes similaires afin de s’assurer qu’il ne s’agit finalement pas d’une fausse piste, comme de la matière ordinaire.

Découvrez les bonus

+ rapide, + pratique, + exclusif

Zéro publicité, fonctions avancées de lecture, articles résumés par l'I.A, contenus exclusifs et plus encore.

Découvrez les nombreux avantages de Numerama+.

S'abonner à Numerama+

Vous avez lu 0 articles sur Numerama ce mois-ci

Il y a une bonne raison de ne pas s'abonner à

Tout le monde n'a pas les moyens de payer pour l'information.
C'est pourquoi nous maintenons notre journalisme ouvert à tous.

Mais si vous le pouvez,
voici trois bonnes raisons de soutenir notre travail :

  • 1 Numerama+ contribue à offrir une expérience gratuite à tous les lecteurs de Numerama.
  • 2 Vous profiterez d'une lecture sans publicité, de nombreuses fonctions avancées de lecture et des contenus exclusifs.
  • 3 Aider Numerama dans sa mission : comprendre le présent pour anticiper l'avenir.

Si vous croyez en un web gratuit et à une information de qualité accessible au plus grand nombre, rejoignez Numerama+.

S'abonner à Numerama+
Toute l'actu tech en un clien d'oeil

Toute l'actu tech en un clin d'œil

Ajoutez Numerama à votre écran d'accueil et restez connectés au futur !


Pour ne rien manquer de l’actualité, suivez Numerama sur Google !