Les scientifiques du CERN ont expliqué comment les expériences basées sur l’élément du plomb ont produit de l’or pendant une fraction de seconde. Une expérimentation fascinante.

Le rêve de changer le plomb en or est une fable ancienne, qui renvoie notamment à la légende de la pierre philosophale, très inscrite à l’époque du Moyen Âge. Mais l’alchimie peut-elle trouver une traduction scientifique ? Il faut se rendre au LHC — le Grand collisionneur de hadrons — pour y répondre, comme le CERN l’explique dans un article publié le 8 mai 2025.

À notre époque, on connaît la composition de ces métaux jusqu’à leur plus petite échelle. Le plomb et l’or sont des éléments chimiques, distincts, chacun avec un numéro atomique. Leur différence ? L’atome de plomb (82) comprend trois protons de plus que l’atome d’or (79). Pour transformer le plomb en or, il faut donc retirer trois protons à l’or. Ce qui n’a rien de simple, il s’agit là d’une opération chirurgicale de l’extrême.

Comment passer du plomb à l’or ?

Au LHC, dont le coût de construction est estimé à 4332 millions de francs suisses par le CERN (donc plus de 4 milliards d’euros), les scientifiques tournent des faisceaux de plomb l’un vers l’autre. Objectif : des quasi-collisions à très haute énergie entre des noyaux de plomb. L’idée est essentiellement d’étudier l’état de la matière que cela produit, un plasma quarks-gluons, l’état de la matière qui prévalait à sa naissance (dans le clignement d’œil qui a suivi le Big Bang).

Sauf que ce processus perturbe aussi le champ électromagnétique des noyaux de plomb. Il faut s’imaginer ce champ comme une sorte de prison où sont enfermés les protons. Lorsque les noyaux se frôlent à vitesse extrême, ce champ change de forme (ses lignes s’aplatissent « comme une crêpe », précise le CERN). Ce qui ouvre la voie à une possibilité : une impulsion d’énergie qui va éjecter des protons.

Or, si exactement trois protons sont éjectés des 82 protons du noyau de plomb lors de ce processus… vous obtenez 79 protons, c’est-à-dire de l’or. Ce processus s’appelle la transmutation nucléaire.

La collision à très haute énergie entre noyaux de plomb éjecte des protons : si 3 protons sont éjectés, de l'or est produit durant une fraction de seconde. // Source : CERN
La collision à très haute énergie entre noyaux de plomb éjecte des protons : si 3 protons sont éjectés, de l’or est produit durant une fraction de seconde. // Source : CERN

Pour analyser ce phénomène, les scientifiques du LHC ont utilisé les calorimètres à zéro degré d’un détecteur appelé ALICE. Ce n’est pas vraiment une calculette habituelle : elle a permis à l’équipe de calculer très précisément les émissions de protons. De fait, en calculant les protons éjectés, vous pouvez donc savoir toutes les fois où de l’or a été généré dans l’accélérateur.

29 trillionième de gramme d’or pendant une microseconde…

Le résultat a été publié dans une étude : entre 2015 et 2018, on compte 86 milliards de noyaux d’or produits lors des collisions à très haute énergie, soit 29 trillionièmes de gramme. L’état d’or ne se maintient que durant une microseconde, un délai infime, mais tout de même notable.

Que devient l’or ensuite ? N’envisagez pas d’en faire des bracelets. Les noyaux d’or viennent se fracasser contre les parois des faisceaux et des machines, puis « ils se fragmentent immédiatement en protons, neutrons et autres particules », explique le CERN.

« Cette analyse est la première à avoir détecté et analysé systématiquement, dans une expérience, la signature de la production d’or au LHC », se réjouit Uliana Dmitrieva, l’une des scientifiques impliquées.

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