Après Resident Evil 2 en 2019, Capcom continue de dépoussiérer son catalogue. C’est désormais au tour de Resident Evil 3 de bénéficier d’un remake. La relecture est courte mais intense.

Capcom n’est toujours pas décidé à offrir une suite à l’excellent Resident Evil 7: Biohazard, véritable retour aux sources pour la saga phare — avec passage en vue à la première personne. À la place, la firme japonaise préfère choyer ses pépites. C’est ainsi qu’elle a proposé un remake de Resident Evil 2 en 2019, avec le succès que l’on connaît. En 2020, elle enchaîne logiquement avec la relecture de Resident Evil 3, opus qui a amorcé l’orientation davantage axée sur l’action.

Comme pour Resident Evil 2, il ne s’agit pas d’un simple portage du jeu original mais d’une profonde refonte du survival-horror sorti en 2000 sur la toute première PlayStation. L’idée est bel et bien de moderniser une production qui a pris un sérieux coup de vieux en 20 ans d’existence. Le remake de Resident Evil 2, si séduisant soit-il, souffrait de mécaniques encore vieillottes. On se demande si sa suite ne pâtit pas du même syndrome.

L’horreur magnifiée

Disponibilité

Resident Evil 3 est disponible à partir du 3 avril sur PS4, Xbox One et PC.

Paradoxalement, le début de Resident Evil 3 se passe avant Resident Evil 2. On retrouve Jill Valentine, rescapée des événements du manoir Spencer (Resident Evil premier du nom) alors qu’elle continue de vouloir mettre fin aux agissements d’Umbrella — société qui a mis au point un virus transformant les gens en monstres. Dans la ville de Raccoon City, l’épidémie s’est propagée, plongeant les rues dans le chaos. Ciblée par Nemesis, une arme biologique envoyée par Umbrella, Jill doit trouver un moyen de fuir cet enfer.

Dans le lore mis en place par la licence, Resident Evil 3 n’est certainement pas l’épisode le plus déterminant. Il préfère s’en remettre à une mise en scène plus pêchue plutôt qu’accumuler les révélations sur les sombres secrets d’Umbrella. En ressort une expérience plus hollywoodienne, suffisamment tape-à-l’œil pour contraster avec l’atmosphère plus calme des deux premiers opus. On ressent en tout cas parfaitement le sentiment d’urgence qui anime Jill, lancée dans une course contre la montre et poursuivie par un ennemi effrayant qui laisse peu de place au répit.

Resident Evil 3 // Source : Capcom

Resident Evil 3

Source : Capcom

Nemesis est sans conteste le meilleur argument de Resident Evil 3. Plus abominable que jamais, le boucher d’Umbrella donne du fil à retordre à Jill pendant toute l’aventure. On joue avec la peur permanente de le voir surgir d’un moment à l’autre, craignant cette confrontation comme si on ne pouvait vraiment pas en réchapper. C’est d’autant plus vrai que Nemesis est quasiment invulnérable et, contrairement à un vulgaire zombie, peut utiliser des armes. En somme, c’est une vraie menace pour Jill.

Le moteur graphique RE Engine est capable de magnifier l’horreur

Comme ce fut déjà le cas pour Resident Evil 2, on observe que le moteur graphique RE Engine est bel et bien capable de magnifier l’horreur. Il suffit de regarder la modélisation de Nemesis pour se rendre compte combien l’optimisation d’un outil maison peut accoucher d’un rendu très plaisant techniquement. Nanti d’un framerate à 60 fps sur les consoles les plus puissantes, Resident Evil 3 s’appuie sur des arguments graphiques très forts. Il y a d’abord ces jeux de lumière somptueux et, ensuite, ces effets gores très appuyés (la chair qui se désagrège sous le poids des balles). En guise de menu défaut, on pourra toujours relever cet effet brillant qui dénature parfois le photoréalisme.

Resident Evil 3 // Source : Capcom

Resident Evil 3

Source : Capcom

Un RE plus action

Alors que Resident Evil 1 & 2 de situaient dans des environnements confinés, ajoutant au sentiment de peur ambiant, Resident Evil 3 a ouvert les horizons de la franchise. Cette fois, l’action prend place dans une ville, ce qui étire les décors et encourage davantage l’exploration. Capcom a surtout voulu donner naissance à un RE dans lequel les affrontements sont plus importants. Il y a moins ce côté survival-horror, quand bien même le tronc commun est toujours là pour assurer la parenté (la gestion de l’inventaire, limité en places, par exemple).

Par conséquent, Resident Evil 3 offre un gameplay beaucoup plus dynamique que son prédécesseur — en témoigne l’introduction d’une esquive qui, réalisée au dernier moment, peut ralentir un peu le temps (c’est très mal expliqué dans le jeu, d’ailleurs). Cela ne veut pas dire qu’il n’est pas encouragé de faire attention à son stock de munitions. S’il est possible de ne jamais en manquer, on conseillera de ne pas les gâcher inutilement sur des morts-vivants toujours aussi compliqués à tuer (viser la tête ne suffit pas…). Il est préférable de les éviter, en prenant soin de surveiller leurs gestes (ils ont l’air lents et inoffensifs mais ont des pics d’agressivité quand il faut sauter à la gorge de Jill).

Le gameplay est plus agréable que dans le remake de Resident Evil 2

La vulnérabilité aléatoire des ennemis est d’ailleurs toujours aussi étrange à appréhender. Un zombie peut offrir une résistance bien plus grande qu’un Hunter, pourtant réputé plus puissant. Dans certains cas, il sera donc nécessaire d’éviter les face-à-face pour économiser ses balles pour ceux qui sont inévitables. À noter, sur ce point, que Jill peut confectionner ses propres munitions en ramassant les ressources idoines. Bien évidement, il est toujours possible de créer des moyens de se soigner avec des herbes obtenues çà et là.

Il est bon de rappeler que le Resident Evil 3 d’origine n’offrait pas la possibilité de tirer en bougeant — une évolution qui fut ajoutée à la saga à partir du spin-off Resident Evil: Revelations. Ce remake bénéficie de cette liberté de mouvements, qui autorisent une souplesse bienvenue dans la prise en main très agréable, quand bien même elle manque de certaines actions (les exécutions au sol au hasard ?). Dans les grandes lignes, le plaisir de la (re)découverte est là, sachant que le gameplay est plus agréable que dans le remake de Resident Evil 2.

Resident Evil 3 // Source : Capcom

Resident Evil 3

Source : Capcom

Très, très court

Mode multijoueur

Resident Evil 3 est vendu avec un mode multijoueur baptisé Resident Evil: Resistance. Il propose des matches asymétriques à 1 contre 4.

Capcom a pris des libertés par rapport au Resident Evil 3 sorti initialement, que ce soit en termes de gameplay (les QTE ont disparu) que de situations vécues (exemple : Jill ne va pas dans le commissariat de Resident Evil 2). Plusieurs fans qui connaissent le matériau original sur le bout des doigts crieront à la trahison, mais c’est surtout une preuve que les éléments scénaristiques déroulés ne comptent pas tant que cela dans la mythologie RE (puisqu’ils sont malléables). En parallèle, les développeurs ont imaginé des séquences inédites (notamment avec Carlos), pour mieux en sacrifier d’autres. De fait, on a moins l’impression d’être plongé dans un hommage, comparativement au remake de Resident Evil 2.

Resident Evil 3 est surtout le premier épisode de la saga à n’avoir qu’un seul arc jouable — celui de Jill Valentine (Carlos n’est qu’un personnage secondaire). C’est un gros désavantage pour la durée de vie : en comptant sur un duo (Chris/Jill puis Leon/Claire), Resident Evil 1 & 2 doublaient artificiellement le temps de jeu. Là, on se retrouve avec une seule aventure qui n’occupera pas plus de huit heures (pour les moins rapides). Au cours de notre test, nous avons mis à peine six heures pour voir le bout, en prenant notre temps (on a même récupéré toutes les armes).

Une seule aventure qui n’occupera pas plus de huit heures

Il est vrai que Resident Evil 3 a une propension à devenir un jeu pour les férus de scoring. Comme l’aventure est courte, certains n’hésiteront pas à enchaîner les parcours pour atteindre le run parfait (temps passé, nombre de game over...). Il y a même un argument de speedrun pour les plus rapides, sans oublier les quelques secrets à percer. D’ailleurs, on débloque une boutique à la fin du jeu pour acheter quelques bonus pratiques dans les modes de difficulté élevés. En revanche, il n’y a qu’une seule fin dans ce nouveau Resident Evil 3 (il y en avait plusieurs à l’époque).

Le verdict

Capcom n’a pas voulu retomber dans l’hommage facile avec le remake de Resident Evil 3. Sa réadaptation transpire la modernité et troque les vieux relents de la saga pour un gameplay d’une souplesse bienvenue, servant ici une intrigue passable, davantage orientée sur l’action. Globalement, l’aventure est intense (merci Nemesis) mais se révèle trop courte, donnant l’impression de rester sur sa faim. Là est le propre des fuites, elles ne peuvent pas s’éterniser.

Ce choix loin d’être anodin sous-entend néanmoins que Capcom a pris beaucoup plus de libertés par rapport à l’opus original. Et la firme nippone n’a pas hésité à retailler son joyau, retirant des éléments pour mieux polir certaines parties. De quoi y voir une trahison ? Peut-être. Mais il ne faudrait pas prêter à Resident Evil 3 une autre ambition qu’une course-poursuite haletante entre une héroïne à bout de souffle et une arme biologique indestructible. Sur ce point, la mission est remplie haut la main.

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