The Flash était présenté comme un sauvetage de l’univers cinématographique DC et des films de super-héros. Il n’en est rien. C’est même l’inverse : The Flash est un saccage pur et dur, dénué de profondeur et qui parvient même à gâcher ses rares atouts. Critique sans spoilers.

Quand les effets spéciaux ratés n’apparaissent pas comme le pire défaut d’un film, c’est que quelque chose cloche. On aurait pu aisément pardonner les défauts esthétiques de The Flash, car, après tout, une œuvre peut parfois transcender la simple exigence visuelle. Mais le manque de joliesse du nouveau long-métrage DC n’est que la face émergée d’un iceberg aussi vide que difforme.

Difforme, car en sa structure même, The Flash passe à côté de son propre récit et de ses propres personnages — il n’y a tout bonnement pas d’écriture. Vide, car le long-métrage d’Andy Muschietti parvient à produire une œuvre sans cœur et sans émotion à partir d’une histoire qui avait pourtant tout pour être puissante.

Ce n’est pas The Flash, mais le Barry Allen show

Barry Allen est l’un des personnages les plus attachants et les plus aimés de l’univers DC. Il est un trublion, drôle, chaotique, sympathique, mais terriblement touchant. Sa gentillesse et son dévouement proviennent de son origin story tragique : le meurtre de sa mère, dont son père est accusé à tort, alors que Barry n’était qu’un enfant. Pour changer cette tragédie, le héros parvient à remonter le temps.

Barry Allen, alias The Flash. // Source : DC/Warner
Barry Allen, alias The Flash. // Source : DC/Warner

C’est là que The Flash aurait pu puiser toute sa puissance en proposant un film superhéroïque fort : un drame originel, un fils éploré qui bouleverse le temps et l’espace pour retrouver et sauver sa mère, innocenter son père. En lieu et place, les minutes défilent alors que les émotions se font toujours plus absentes. Loin de s’intéresser à la psyché de son héros, le film glisse à sa surface sans la moindre intelligence. D’une froideur glaciale dans son approche du drame de Barry, The Flash désactive constamment sa charge émotionnelle par des blagues, une musique tonitruante et de catastrophiques plot holes dans le développement de Barry — comme de l’intégralité des personnages.

Ces apories scénaristiques dérapent d’ailleurs sur l’intégralité du récit. Jamais un film de super-héros, dans l’histoire, n’avait disposé d’une écriture si faible, si distinctement inachevée. Si l’affirmation peut sembler exagérée, c’est pourtant ce qui caractérise The Flash : l’absence totale, radicale, de narration construite, cousue, réfléchie. Le film d’Andy Muschietti est un livre dont il manque des pages entières et dont des paragraphes entiers sont biffés. Il en résulte un fil rouge sans queue ni tête, où les séquences superficielles défilent encore et encore, sans enjeu, sans réalisme, sans humanité. La belle histoire est ainsi remplacée par un « Barry Allen show » agaçant tant il en devient vide de sens.

Qu’avez-vous fait à Supergirl et Batman ?

Au saccage du récit de Barry Allen, il faut ajouter l’impardonnable gâchis de Supergirl. C’était pourtant l’un des atouts du film : une Sasha Calle impeccable dans son rôle et une version nouvelle — plus sombre — de Kara. L’actrice livre parmi les meilleures scènes de The Flash : l’actrice et l’héroïne qu’elle interprète semblent être les seules à prendre véritablement au sérieux le cours des événements. Elle n’endosse pas seulement un costume : elle porte en elle une histoire, des sentiments, une complexité plus grande que ce qu’on en voit. C’est ce que l’on attend d’un film superhéroïque : apercevoir un miroir humain en des personnages surhumains.

Sasha Calle en Kara dans The Flash. // Source : DC/Warner
Sasha Calle en Kara dans The Flash. // Source : DC/Warner

Supergirl aurait-elle pu sauver le film ? Peut-être, si le personnage avait reçu la moindre considération dans son écriture et dans son temps de présence à l’écran. Ce n’est pas le cas. Même sa colère, saisissante pourtant, est compartimentée à des séquences courtes, limitées. Seul espoir pour réparer cette injustice : que James Gunn décide de donner sa chance à Sasha Calle pour Supergirl : Woman of Tomorrow.

On aurait pu compter aussi sur Michael Keaton, car il n’est pas insensé de considérer que The Flash repose en grande partie sur son charisme. Il est indéniable que l’acteur incarne un Batman impressionnant, voire attachant, et qu’il porte parmi les meilleures scènes du film. Du moins, lorsqu’une scène d’action badass n’est pas court-circuitée par Barry en train de vomir sur le bas-côté, et lorsque Bruce Wayne ne parle pas : rarement des lignes de dialogue avaient été aussi clichées.

Michael Keaton en Batman dans The Flash. // Source : DC/Warner
Michael Keaton en Batman dans The Flash. // Source : DC/Warner

The Flash marque l’histoire de la pire façon

« The Flash nous rappelle pourquoi on va au cinéma », titrait l’une des affiches, qui s’étalent sur les bus de toute la capitale. Ce n’est pas tout à faux. The Flash nous rappelle que le cinéma mérite mieux que ce film qui, en profondeur, ne raconte rien et ne montre rien. The Flash déçoit jusqu’à sa scène post-générique et nous rappelle qu’une œuvre cinématographique ne peut faire l’impasse sur la caractérisation humaine de ses personnages et que le grand spectacle ne peut jamais remplacer un véritable récit correctement écrit.

Il était finalement possible de faire bien pire que Quantumania, deux symboles que le cinéma super-héroïque a besoin de renouer avec une vision artistique plus profonde et un amour véritable pour ses personnages. Car avec de la considération pour ce que l’on écrit et met en scène, cela donne plutôt Spider-Man Across the Spider-verse.

Le verdict

Si les effets spéciaux catastrophiques vous inquiètent, pas de panique : ils ne sont pas si dérangeants. Car ce défaut semble futile, et l’on s’en serait volontiers accommodé, en comparaison de l’ampleur du problème : The Flash est un titanesque brouillon sans queue ni tête à 220 millions de dollars. Parsemé de plot holes lunaires qui brisent toute cohérence, incapable de générer de véritables émotions, le nouveau blockbuster de DC passe à côté de tout ce qu’un film super-héroïque peut offrir de beau. Cerise sur le gâteau, The Flash gâche son atout qu’était Supergirl / Sasha Calle, et n’accorde aucune considération à l’écriture du Batman de Michael Keaton, deux personnages qui portent pourtant le film.

Si, chez Marvel, Quantumania apparaissait déjà comme le pinacle du film super-héroïque assassiné par son propre spectacle tonitruant, son humour à la frontière du ridicule et sa superficialité, The Flash fait pire encore. À tel point que le simple plaisir de l’entertainment commence à ne plus suffire.

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