Deux personnes s’occuperont des dossiers relatifs au numérique. La Danoise Margrethe Vestager, sous l’angle de la concurrence, et le Français Thierry Breton, pour le marché intérieur.

C’est donc le 1er décembre 2019 que la nouvelle présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, a pris officiellement ses fonctions. L’Allemande est devenue de fait la première femme à présider l’institution, en succédant au Luxembourgeois Jean-Claude Juncker. À ses côtés, l’intéressée a une équipe de 26 commissaires qui l’accompagnera au cours des cinq ans de son mandat.

Ursula von der Leyen

Ursula von der Leyen.

Source : European Union 2019

Pour qui suit l’actualité européenne, il apparaît que la nouvelle équipe est composée à la fois de commissaires qui étaient déjà en poste lors de la précédente présidence, comme la Tchèque Věra Jourová ou la Danoise Margrethe Vestager. De nouvelles têtes sont aussi de la partie, à l’image du Français Thierry Breton. Au total, on compte 12 femmes et 15 hommes et la présidente sera assistée de 8 vice-présidents.

Mais dans le détail, quelques mouvements internes sont à observer dans cette nouvelle Commission européenne, notamment pour ce qui à trait avec le numérique.

Thierry Breton récupère le numérique

C’est le principal enseignement de cette redistribution des portefeuilles : le Français Thierry Breton devient commissaire en charge du marché intérieur. Par conséquent, c’est lui qui va piloter et développer le marché numérique, qui était auparavant sous la direction de la Bulgare Mariya Gabriel. Le numérique était aussi sous la houlette de l’Estonien Andrus Ansip sous la présidence Juncker.

Sur le terrain du numérique, Thierry Breton prolongera les nombreux chantiers dans lesquels était engagée sa collègue (qui récupère le portefeuille de l’innovation et de la jeunesse), comme l’éthique dans l’intelligence artificielle, l’amélioration de la couverture Wi-Fi dans les territoires ruraux, la mise en place de superordinateurs de classe mondiale ou encore la baisse des frais téléphoniques.

Thierry Breton

Thierry Breton, lors de son audition pour devenir commissaire européen.

Source : Lukasz Kobus/ European Union, 2019

Précédemment, Thierry Breton a occupé plusieurs postes politiques, dont celui de ministre de l’Économie, des Finances et de l’Industrie au milieu des années 2000. Il a aussi été conseiller régional une quinzaine d’années plus tôt. Dans le privé, Thierry Breton a dirigé plusieurs grandes entreprises, comme Bull, Thomson, France Télécom et, dernièrement, Atos, groupe qu’il a quitté fin octobre 2019.

Le fait est que le portefeuille dont Thierry Breton a la charge recouvre en partie les secteurs dans lesquels Atos se déploie et place de grands espoirs commerciaux. C’est le cas entre autres de l’intelligence artificielle, les superordinateurs, la cybersécurité et la souveraineté numérique. Il aura aussi à gérer les enjeux liés à l’espace, à la politique industrielle et l’industrie de la défense.

Bien que le parcours professionnel de Thierry Breton lui confère de fait une connaissance fine des sujets liés au numérique — il a également une formation d’ingénieur et a été dans un lointain passé professeur de mathématiques et d’informatique –, son arrivée à un poste aussi stratégique et étendu, dont certains secteurs intéressent ses anciennes entreprises, pose forcément la question du conflit d’intérêts.

Atos Bull

Bull, spécialiste des superordinateurs, une filiale d'Atos

Source : Département des Yvelines

L’intéressé a toutefois pris des dispositions pour ne plus avoir de lien particulier avec les groupes qui ont un lien avec son domaine d’intervention. Dispositions qu’il a rappelées à plusieurs reprises aux eurodéputés qui l’interrogeaient à ce sujet. Il a ainsi quitté tous ses mandats dans les conseils d’administration, cédé ses actions dans Atos et démissionné de toutes les responsabilités professionnelles qu’il avait précédemment.

Enfin, dernière mesure que Thierry Breton s’engage à respecter : se déporter dès lors qu’un dossier risque de poser un problème. Dans ce cas de figure, ce sera l’un de ses collègues à la Commission qui s’en occupera. Thierry Breton a toutefois prévenu que cela ne couvrirait que les dossiers ayant une dimension financière ou contractuelle (un appel d’offres par exemple), pour éviter d’être systématiquement sur la touche.

Margrethe Vestager reste à la concurrence

Autre constat dans cette nouvelle distribution : Margrethe Vestager est reconduite pour un nouveau mandat. La Danoise conserve son portefeuille sur la concurrence et, précise Bruxelles, coordonnera l’ensemble du programme de la Commission pour une Europe adaptée à l’ère du numérique. Au passage, l’intéressée prend du galon : elle devient vice-présidente de l’institution.

Margrethe Vestager

Margrethe Vestager, en avril 2019.

Source : Etienne Ansotte/ European Union, 2019

À cette occasion, Ursula von der Leyen s’est autorisée un commentaire dans lequel on devine les sujets qui occuperont l’intéressée : « Nous devons faire en sorte que notre marché unique soit adapté à l’ère du numérique, nous devons tirer le meilleur parti de l’intelligence artificielle et des mégadonnées, nous devons améliorer la cybersécurité et nous devons lutter âprement pour notre souveraineté technologique. »

Le maintien de Margrethe Vestager à la tête des problématiques de concurrence sera sans doute accueilli sans aucun enthousiasme chez les géants du web, en particulier Google, car elle s’est montrée très en pointe sur la lutte contre les sujets anticoncurrentiels. C’est sous sa supervision que Google s’est pris trois amendes antitrust, en 2017, 2018 et 2019, avec un montant qui a à chaque fois dépassé le milliard d’euros.

C’est également elle qui a évoqué le démantèlement de Google en 2018 si les règles du Vieux Continent continuent d’être foulées au pied par la firme de Cupertino.

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