Alors qu'Axelle Lemaire peaufine les derniers détails de sa loi numérique dont l'examen parlementaire est programmé à l'automne, le ministre de l'économie Emmanuel Macron annonce déjà qu'une nouvelle loi sera à l'étude l'an prochain, pour les volets purement économiques. Mais peut-on séparer les deux projets de loi sans atteindre la cohérence d'ensemble ?

C'était déjà pressenti, c'est désormais certain. Le projet de loi sur le numérique qu'Axelle Lemaire dévoilera dans les prochains jours sera cantonné principalement aux questions de régulation des contenus, de protection de la vie privée et d'ouverture des données publiques, tandis que le volet économique de la régulation du numérique sera laissé à un autre texte, porté par Emmanuel Macron. "C'est ce scénario en deux temps qui a finalement été confirmé mercredi soir par Matignon au Figaro", indique le quotidien.

En milieu de semaine, le ministre de l'économie avait dit vouloir légiférer pour "penser un nouveau logiciel et réfléchir à l'articulation entre les différentes formes de statuts et de travail", au moment où des entreprises comme Uber remettent en cause le salariat par le recours systématisé à des travailleurs indépendants, qui prennent les risques mais pas les bénéfices. Le ministre a dit vouloir "prendre le temps qu'il faut" pour aboutir à des propositions de réformes qui seront communiquées au plus tôt d'ici la fin de l'année. Dans ces conditions il est peu probable qu'un texte de loi s'attaque à ces questions avant, au mieux, le deuxième semestre 2016. Il n'apparaît de toute façon pas dans le planning des réformes numériques du quinquennat.

Ce dernier, à propos de la loi Lemaire, prévenait que la loi numérique viserait trois objectifs : 

  1. Affirmer de nouveaux droits pour les citoyens en assurant la protection de leurs données ;
  2. Ouvrir les données publiques pour favoriser l'innovation et leur utilisation à des fins d'intérêt général ;
  3. Moderniser l'action publique pour un Etat plus efficace et plus proche des citoyens.

L'idée absurde de séparer l'économie et les droits, comme si les deux n'étaient pas foncièrement liés, n'est pas nouvelle. C'était déjà le projet du cabinet de Fleur Pellerin, lorsqu'elle était en charge du numérique. Or cette idée est dangereuse puisqu'elle ouvrira la voie, par la régulation économique traditionnellement perçue comme la reine des régulations, à un recul de droits ou libertés qui n'auront pas été consacrées par la loi précédente. Pour trouver le meilleur équilibre entre les droits des internautes et les intérêts économiques de l'innovation, il est essentiel que les deux volets soient abordés ensemble, de façon cohérente, et non successivement.


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