La décision intervient nécessairement trop tard, puisque c'est le simple fait d'avoir créé un précédent qui restera marqué au fer rouge sur l'histoire du fournisseur d'accès à internet. Alors que son directeur Maxime Lombardini doit rencontrer à 10 heures ce lundi matin la ministre de l'économie numérique Fleur Pellerin, Free a décidé de désactiver le blocage de la publicité qu'il avait imposé par défaut aux abonnés utilisateurs de sa Freebox Revolution.
"Sans mise à jour du firmware, la publicité a bien fait son retour sur les pages chargées depuis la Freebox", constate Freenews, qui confirme ainsi la décision annoncée dès samedi alors que l'Arcep avait demandé des explications. "Pas besoin de désactiver l’option de blocage des publicités depuis l’interface de gestion de la box : ce réglage semble désormais ignoré".
La raison technique est simple. Le fait d'activer le filtrage, ce qui était le cas par défaut pour tous les abonnés ayant mis à jour leur Freebox Revolution en fin de semaine dernière, provoquait l'utilisation d'un serveur DNS menteur, qui faisait croire que certains contenus appelés par l'internaute n'existaient pas. Free n'a pas eu besoin de désactiver l'option, ce qui nécessitait de remettre à jour le firmware des Freebox V6, mais simplement d'arrêter de faire mentir son serveur DNS utilisé sur les Freebox concernées.
Malheureusement, le mal est fait. Et il n'est pas économique. Certes, le fait de bloquer la publicité en ligne est porteur d'un danger financier pour les milliers de sites internet dont la gratuité n'est permise que par la publicité. Mais les régies publicitaires et les éditeurs auraient réagi rapidement pour trouver les parades technologiques et contourner le blocage. Le problème posé par le blocage des publicités est d'abord démocratique.
Free a démontré qu'un fournisseur d'accès à internet était prêt à bloquer des contenus (oublions deux minutes qu'il s'agit de publicité, il s'agit d'abord de code HTML) sans prévenir ses abonnés, et sans leur dire que des contenus avaient été supprimés sur la page qu'ils demandaient. Il ne pourra pas le nier lorsque d'autres intérêts seront en cause et que des lobbys de toutes parts demanderont qu'un tel blocage soit mis en oeuvre pour éviter aux internautes d'accéder à telles ou telles catégories de contenus. Le fait que l'option était désactivable n'était qu'un moindre mal (pour avoir le choix, encore faut-il être informé), et était en lui-même porteur d'une perversité : c'est savoir qui demande à ne plus filtrer, et donc qui a un comportement potentiellement suspect.
S'agissant de la loi Hadopi, par exemple, demander à débloquer un filtrage par défaut des sites BitTorrent ou de streaming, c'est juridiquement se rendre coupable de négligence caractérisée.
Il nous semble que ce danger, que nous avions mis en exergue dès 2011 s'agissant d'un projet de blocage par défaut de la pornographie, a été beaucoup trop sous-estimé par des internautes qui n'ont vu que le sympathique service rendu de la suppression d'un contenu qu'ils n'apprécient pas. Mais l'enfer est pavé de bonnes intentions.
Et ce précédent de Free laissera des traces. Soyons-en certains.
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