Google, qui a échappé ce printemps à la déchéance de sa marque dans le cadre d’un procès en appel, risque maintenant de devoir se défendre devant la Cour suprême. C’est en tout cas le scénario qui se jouera si l’action de deux Américains aboutit.

Google risque-t-il de perdre la propriété de sa marque aux États-Unis ? C’est ce que craint le groupe américain : de l’autre côté de l’Atlantique, la société fondée en 1998 par Larry Page et Sergueï Brin est menacée par l’activisme de deux individus, David Elliott et Chris Gillespie. Ces derniers veulent obtenir de la justice la reconnaissance de la banalité du terme « google », car s’il est établi que ce mot est entré dans le langage courant sa protection commerciale ne sera plus possible.

Jusqu’à présent, Google a échappé à la perte de contrôle de sa marque déposée : en mai, la cour d’appel de San Francisco a considéré que « google » n’est pas assez entré dans le langage courant pour que l’on puisse commettre un « généricide », c’est-à-dire déchoir Google de ses droits au motif que la marque est devenue si habituelle qu’elle ne peut plus être protégée de la sorte. C’est ce qui est arrivé à des mots comme thermos, aspirateur (hoover) ou aspirine (aspirin).

Cour Suprême

La Cour suprême.
CC Nicolas Stambach

« Même en supposant que le public utilise le verbe googler de manière générique et à tort et à travers, cela ne nous dit rien de la façon dont il perçoit le terme en lui-même — sans tenir de sa fonction grammaticale — par rapport aux moteurs de recherche », écrivait le magistrat. Il ajoutait aussi que Google n’est pas non plus devenu un « descripteur exclusif » ; en clair, la concurrence ne se sent pas dans l’obligation de recourir à « googler » pour parler des solutions alternatives.

Mais David Elliott et Chris Gillespie n’ont pas dit leur dernier mot. Comme le pointe Ars Technica, l’affaire pourrait bien être portée devant les juges de la Cour suprême des États-Unis. Un recours a été produit par les deux particuliers avec l’espoir de renverser l’arrêt rendu en deuxième instance. « Il n’existe pas le moindre mot, hormis google, qui transmet [l’idée] de l’action d’une recherche sur Internet à l’aide de n’importe quel moteur de recherche », écrivent-ils.

Il est très difficile de savoir dans quel sens tranchera la Cour suprême. Il n’est d’ailleurs même pas certain que les magistrats acceptent de régler le différend entre Google et les deux Américains. L’affaire risque en tout cas de prendre plusieurs mois avant de connaître une issue, quelle qu’elle soit. Quoiqu’il en soit, elle a le mérite d’apporter un éclairage sur certains agissements passés de Google, comme en 2013 avec la suppression d’un mot du dictionnaire suédois.

dictionnaire encyclopédie

Google n’a pas vraiment intérêt à entrer dans le dictionnaire.
CC Dariusz Sankowski

Comme nous l’observions alors, la loi sur les marques commerciales impose aux titulaires de ces marques d’empêcher leur dilution dans le langage commun ; sinon, elles en perdent l’exclusivité et ne peuvent s’opposer à leur utilisation par des tiers. C’est par exemple ce qui est arrivé en France à la marque Frigidaire, qui est devenue synonyme du réfrigérateur, ou encore des mots escalator, sopalin ou fermeture éclair.

En France, le code de la propriété intellectuelle, dans son article L714-6, inclut justement une disposition de type « généricide » : « encourt la déchéance de ses droits le propriétaire d’une marque devenue de son fait la désignation usuelle dans le commerce du produit ou du service ». C’est pourquoi une entreprise comme Adobe lutte aussi pour que le public ne se serve pas du verbe photoshoper pour parler des trucages ou des retouches sur une photo.


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