TF1 avait fait bloquer sur YouTube un extrait vidéo dans laquelle la chaîne avait elle-même copié la vidéo de celui qui diffusait l’extrait. Juridiquement parlant, TF1 aurait pu s’entêter. Elle ne l’a pas fait.

Le journaliste Julien Ménielle raconte qu’une vidéo qu’il avait réalisée pour le journal 20 Minutes avec l’eurodéputé et militant écologiste José Bové s’était retrouvée à l’antenne de TF1, détournée pour les besoins d’un sketch de Nicolas Canteloup. Mais lorsqu’il a voulu s’en féliciter par un clin d’oeil partagé avec ses amis et confrères, TF1 a fait bloquer l’extrait sur YouTube, pour violation des droits d’auteur.

Le fait que TF1 utilise la vidéo de 20 Minutes ne pose aucun problème au regard du droit d’auteur puisque la loi autorise les parodies si les « lois du genre » sont respectées, ce qui paraît être le cas en l’espèce. Et même si la vidéo avait été recadrée pour faire disparaître le logo incrusté de 20 Minutes, Julien Ménielle ne s’en était pas offusqué lorsqu’il a publié l’extrait sur sa chaîne YouTube. « Une certaine idée de la consécration« , s’était-il contenté d’écrire :

Mais voilà. Grâce à la magie des systèmes de protection automatisée des droits d’auteur, que les chaînes de télévision françaises veulent imposer aussi sur Facebook et Twitter, l’extrait du passage de sa propre vidéo sur TF1 s’est retrouvé temporairement bloqué sur YouTube, en raison des droits d’auteur que la chaîne s’octroie automatiquement pour tout ce qu’elle produit et qui provient de ses antennes (en pratique ça se fait par l’ajout d’une empreinte en filigrane, reconnue par les outils de filtrage).

Sans avoir à demander explicitement le retrait de la vidéo, le retrait se fait automatiquement, et vaut avertissement à l’internaute qui envoie la vidéo « piratée ». « Vous avez désormais 1 avertissement pour violation du droit d’auteur. Avoir de multiples avertissements pour violation du droit d’auteur peut conduire à l’arrêt de votre compte« , a prévenu YouTube en écrivant à Julien Ménielle :

L’affaire s’est finalement résolue à l’amiable, sans que l’on sache ce qui a joué le plus, entre la notoriété du journal et du journaliste, ou la conscience du ridicule total de la situation. TF1 a retiré très vite sa plainte automatisée. « Bonne nouvelle« , lui dira YouTube, qui ne s’excuse toutefois pas d’avoir supprimé provisoirement la vidéo et de l’avoir donc fait passer pour un contrefacteur aux yeux de ceux qui pensaient voir la vidéo (pour mémoire et même si la loi est totalement absurde, en l’état actuel la contrefaçon est plus grave que le harcèlement moral, la profanation de cimetière ou l’abandon de famille).

Notez toutefois qu’en droit, TF1 aurait été parfaitement fondé à s’entêter et à réclamer le retrait de la vidéo. En créant cette parodie dans les règles de l’art, TF1 bénéficie en effet de l’exclusivité des droits, et ceux dont les oeuvres sont empruntées n’ont pas leur mot à dire, ni aucune prétention sur l’oeuvre qu’ils ont inspirée. C’est pourquoi la proposition de la députée Isabelle Attard de sanctionner du « copyfraud », qui consiste à s’accaparer faussement des droits d’auteur, n’aurait pas eu d’impact ici. Ce n’était, juridiquement parlant, pas une faute de la part de TF1. Même si l’extrait repris par Julien Ménielle était court (moins de 30 secondes), il n’existe en France aucun droit à la diffusion d’extraits d’oeuvres audiovisuelles. 


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