Les ondes électromagnétiques ont-ils un effet sur l'Homme et, si oui, de quelle nature ? Le monde scientifique étudie depuis plusieurs années ce sujet, sans parvenir à s'entendre sur la nocivité ou l'innocuité des technologies sans fil. L'ANSES a produit ce mois-ci une synthèse en la matière, qui conclut sur l'absence d'effets avérés sur la santé humaine. Mais l'agence invite aussi à prendre des mesures de précaution.

L'influence des ondes électromagnétiques sur la santé est un sujet qui anime la communauté scientifique depuis plusieurs années, sans qu'un consensus véritable ne se dégage sur la nocivité ou l'innocuité des technologies sans fil. La littérature en la matière est déjà très fournie, et l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (ANSES) vient d'apporter sa pierre à l'édifice.

Suite à son rapport (.pdf), qui a passé en revue plus de 300 études scientifiques, l'ANSES indique dans ses conclusions que "les résultats de l’évaluation des risques liés à l’exposition aux radiofréquences sur la base d’une revue de la littérature scientifique internationale […] ne mettent pas en évidence d’effet sanitaire avéré et ne conduit pas à proposer de nouvelles valeurs limites d’exposition de la population".

Diverses thématiques ont été explorées concernant l'effet des radiofréquences sur l'Homme. Il apparaît bien souvent que les éléments de preuve de l’existence de l’effet étudié chez des modèles et chez l'Homme sont insuffisants pour conclure à un effet dans un grand nombre de cas et que cela nécessitera plus de travaux sur une plus grande période de temps. Voici la liste :

  • les fonctions auditives ;
  • l’apparition de la sclérose en plaque ;
  • l’apparition de la sclérose latérale ;
  • l'amyotrophique ;
  • l'épilepsie ;
  • la maladie d'Alzheimer ;
  • la fertilité féminine ;
  • la taille, le poids et la viabilité de la descendance ;
  • le développement in utero ;
  • la réponse immunologique ;
  • le système endocrinien ;
  • le rythme cardiaque ;
  • la tension artérielle ;
  • la vasomotricité ;
  • le bien-être et la santé auto-déclarée ;
  • la santé globale ;
  • les méningiomes ;
  • les neurinomes du nerf vestibuloacoustique ;
  • les tumeurs des glandes salivaires ;
  • les leucémies ;
  • les mélanomes ;
  • l’incidence et la mortalité par cancers (tout types confondus) ;

En revanche, la synthèse de l'ANSES indique que des éléments de preuve limités ont été repérés chez les modèles, mais pas chez l'Homme. Dans ces conditions et face à une documentation scientifique insuffisante, impossible pour l'ANSES de conclure en l'état à un effet. Trois cas sont concernés :

  • les fonctions cognitives ;
  • le sommeil ;
  • la fertilité masculine ;

Un effet possible dans un cas

Le rapport de l'ANSES constate toutefois un effet possible des radiofréquences pour l'Homme dans un seul cas : lorsque l'utilisateur cumule plus de 1640 heures d'exposition, c'est-à-dire lorsque l'usager a un emploi intensif du téléphone mobile. Le rapport de l'ANSES précise toutefois qu'il ne s'agit pas d'un effet probable et pointe par ailleurs que ces éléments de preuve demeurent limités.

"Ne peut être exclue une augmentation du risque de gliome : faible (moins de 20 % d'augmentation de l'incidence des gliomes) ; limitée à de petits sous-groupes d'utilisateurs (les utilisateurs très intensifs par exemple) ; associée uniquement à un ou des types rares de tumeurs gliales ; pour des durées d’induction supérieures à 15 ans (aucune donnée n’étant disponible au-delà)", est-il écrit.

Aux yeux de l'ANSES, il n'y a donc pas, en l'état actuel de la documentation scientifique, d'effet sanitaire avéré des ondes électromagnétiques. Le seul cas de figure "possible" concerne une classe d'utilisateurs bien particulière, puisque leur usage du mobile ne correspond pas avec celui d'un individu lambda. Cependant, l'ANSES précise qu'une absence d'effet sanitaire ne signifie pas absence d'effet biologique.

De la différence entre effet sanitaire et effet biologique

"Les effets biologiques sont des changements d'ordre biochimique, physiologique ou comportemental qui sont induits dans une cellule, un tissu ou un organisme en réponse à une stimulation extérieure. L’observation d’un effet biologique, a fortiori en conditions expérimentales, ne signifie pas forcément qu’il entraîne un dommage et encore moins qu’il se traduise par un effet sur la santé", explique l'ANSES.

"Le corps humain est soumis en permanence à un ensemble de stimuli internes et externes et un effet biologique peut manifester simplement la réponse adaptative normale de la cellule, du tissu ou de l'organisme à cette stimulation" ajoute l'agence.

"Un effet sanitaire n’intervient que lorsque les effets biologiques dépassent les limites d’adaptation du système biologique considéré. Il sort du cadre des réponses adaptatives physiologiques, de l'homéostasie, sous l'action de l’agent extérieur".

Conclusions et propositions

Le rapport de l'ANSES, rendu dans un contexte de développement du réseau 4G, estime en l'état actuel des choses qu'il n'est pas nécessaire de "proposer de nouvelles valeurs limites d’exposition de la population". Mais, à l'image de la position de l'Agence européenne pour l'environnement, il convient de prendre des mesures de précaution en matière de téléphonie mobile.

L'ANSES "recommande de limiter les expositions de la population aux radiofréquences – en particulier des téléphones mobiles -, notamment pour les enfants et les utilisateurs intensifs, et de maîtriser l’exposition générale résultant des antennes-relais" dont le niveau serait, selon  le rapport du comité opérationnel sur les ondes de téléphonie mobile à niveau médian relativement bas.

L'ANSES avance en particulier l'idée d'un usage plus fréquent du kit mains-libres, une meilleure information sur le DAS et la multiplication des antennes-relais pour réduire la puissance d'émission par infrastructure. Ce dernier point ne sera vraisemblablement pas suivi par le gouvernement, qui ne souhaite pas réviser à la baisse les seuils d'exposition imposés aux opérateurs sur leurs antennes relais.


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