Ecartée du débat en France, où la répression du piratage reste privilégiée, la licence globale n’est pas encore morte et enterrée. C’est au Brésil qu’elle pourrait bientôt ressurgir, forte du soutien d’une coalition inédite d’artistes et de membres influents de la société civile.

Le 14 juin 2010, le gouvernement brésilien avait ouvert une consultation publique sur une proposition de réforme du droit d’auteur, censée renforcer les droits des artistes et ceux des consommateurs. Entre autres sujets, le texte de loi doit fixer les règles en matière de droit à la copie privée, d’accès aux œuvres à fins d’éducation, de droit au remix, à la conservation du patrimoine numérique, des œuvres orphelines, etc.

Les Brésiliens avaient jusqu’au 31 août pour communiquer au Ministère de la Culture leurs remarques et propositions sur le texte soumis à la consultation. Or c’est le 31 août que près d’une trentaine d’organisations d’horizons divers, réunis sous la bannière du Réseau pour la réforme du droit d’auteur, ont décidé de soumettre « quinze contributions pour l’accès à la connaissance« .

Or l’une des propositions phares appuyée par la coalition est la légalisation du partage de fichiers, compensée par une taxe de 3 réals (env. 1,35 euro) prélevée sur les abonnements à Internet. Un texte de loi a même été proposé, qui précise que le montant pourra être ajusté en fonction du type de connexion, sans dépasser le plafond des 3 réals. La somme serait alors répartie entre les créateurs et producteurs par l’intermédiaire de sociétés de gestion, qui doivent « utiliser un équipement de mesure qui enregistre aussi précisément que possible chaque contenu qui circule« , sans atteindre à la vie privée des abonnés.

Selon Vgrass.de, cette proposition a été « développée par le Centre d’Etudes et de Recherche sur le Droit d’Auteur et les Droits Culturels (NEDCA) de l’Université Fédérale de Rio de Janeiro (UFRJ), le Groupe de Recherche sur les Politiques Publiques pour l’Accès à l’Information (GPOPAI) de l’Université de Sao Paulo (USP), par Pena Schmidt, un producteur de grands groupes de rock brésiliens des années 1980, fondateur et premier président de l’association de labels indépendants Associaçà£o Brasileira da Música Independente (ABMI) et désormais directeur de l’Auditório Ibirapuera, et par son vieil ami Fernando Yazbek du cabinet d’avocats Yazbek, Portaro Advogados Associado« . La rédaction du texte aurait aussi reçu l’aide d’une école de droit de Rio de Janeiro, et d’un doctorant en Droit de l’Université de Duke aux Etats-Unis.

La pétition qui accompagne la promotion a par ailleurs été signée dès sa publication par Claudio Prado, « un producteur culturel et un personnage clé dans la définition des politiques culturelles numériques du Brésil« , par le professeur de sociologie Bernardo Sorj qui milite pour le libre accès aux données scientifiques, ou encore par Ladislau Dowbor, »un des économistes les plus influents du pays« .

L’initiative rappelle celle de l’Alliance Public-Artistes qui avait vu le jour en France pour soutenir la licence globale. Mais cette dernière n’avait pas le soutien public d’universitaires ou d’économistes, culturellement plus observateurs qu’acteurs de ce côté-ci de l’Atlantique.

Rappelons qu’en France, la licence globale avait été votée à l’Assemblée Nationale fin décembre 2005, contre l’avis du gouvernement. C’est en réaction que Nicolas Sarkozy, alors ministre de l’intérieur, avait réuni le gratin de l’industrie culturelle en urgence et mis au point une première version de la riposte graduée, ensuite (et déjà) censurée par le Conseil constitutionnel. Cinq ans plus tard, l’Hadopi reste le monstre enfanté par l’adoption éphémère de la licence globale un soir de Noël.

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