Face à la « croissance spectaculaire » des actifs numériques et leurs « implications profondes » pour le business, la société et le dollar, le président américain a ordonné à toute son administration de tirer parti des technologies décentralisées.

Moment historique. Joe Biden a signé mercredi dernier un décret pour « garantir le développement responsable des actifs numériques », engageant la responsabilité de toute son administration dans une meilleure protection des consommateurs, investisseurs et entreprises.

Derrière cette démarche politique aussi louable qu’inédite, le président américain tient en fait sa version blockchain de l’America First. Il intervient pour protéger et idéalement renforcer le leadership américain dans le système financier mondial.

Dissimulée dans les longueurs d’un texte officiel semblant défendre la bonne cause, la rapacité des États-Unis cible pourtant la compétitivité technologique et les innovations en matière de paiement. Le locataire de la Maison Blanche admet qu’il est de l’intérêt de son pays de rester « à l’avant-garde du développement des actifs numériques » et de la technologie qui sous-tend les nouvelles formes de flux de capitaux dans le système international.

Ironie du calendrier, cet effort collectif américain qui entend tirer parti de la crypto, notamment en établissant des normes qui favorisent l’industrie, survient au moment même où l’Europe est sur le point de s’autosaboter. Le Parlement européen devrait voter ce lundi 14 mars le projet de réglementation dit MiCA (pour Market in Crypto Assets) dont la dernière version comporte des erreurs monumentales d’appréciation. Avec une interdiction frappant les actifs numériques issus d’un protocole jugé « non durables ».

Les cryptos feraient-elles de l’ombre au dollar ?

Dans l’architecture actuelle des systèmes de paiement internationaux, les États-Unis tirent du rôle central que joue le dollar d’importants avantages économiques. Il conviendrait donc pour Joe Biden de maintenir cette autre hégémonie pour défendre les intérêts et la puissance financière de sa nation.

Manifestement préoccupé par l’adoption massive des cryptomonnaies, le président américain exige que ses agences fédérales analysent les conditions qui favoriseraient cette croissance technologique. Il veut cerner les risques et les opportunités pour les investisseurs et les entreprises des États-Unis.

Parallèlement, le président Biden exige des recommandations politiques, dont des actions réglementaires et législatives potentielles, pour protéger les acteurs économiques américains tout en soutenant « l’élargissement de l’accès à des services financiers sûrs et abordables ».

Mais le président US considère néanmoins que le dollar en tant que monnaie souveraine reste la pièce maîtresse du bon fonctionnement du système financier, des politiques de stabilisation macroéconomique et de la croissance économique. 

La numérisation (accélérée) du dollar               

L’administration Biden accorde désormais « la plus grande urgence » aux efforts de recherche et de développement sur les options de conception et de déploiement d’une monnaie numérique de banque centrale américaine. Autrement dit, un e-dollar, un dollar digital, un billet vert numérique…

Les plus hautes instances technologiques de l’administration, en consultation avec le Département du Trésor et de la Réserve fédérale ont 6 mois maximum pour soumettre au président une analyse technique de l’infrastructure, de la capacité et de l’expertise technologiques qui seraient nécessaires pour introduire un système de dollar numérique. 

« L’évaluation doit également inclure toute réflexion ou recommandation sur la manière dont l’inclusion des actifs numériques dans les processus fédéraux peut affecter le travail du gouvernement des États-Unis et la fourniture de services gouvernementaux, y compris les risques et les avantages pour la cybersécurité, l’expérience client et les programmes de sécurité sociale », écrit Joe Biden.

L’impact environnemental

Autre détail notable dans cette course au leadership américain via la crypto, le président a commandé un rapport sur les conséquences induites par la blockchain, les activités de minage de bitcoin et autres altcoins, sur la transition énergétique.

Joe Biden semble s’interroger sur le fait que les actifs numériques puissent « entraver ou à faire progresser les efforts de lutte contre le changement climatique dans le pays et à l’étranger. »

S’inquiétant, à l’instar des législateurs européens, de l’impact des mécanismes de consensus des cryptomonnaies sur l’utilisation de l’énergie, le président des États-Unis a la présence d’esprit de chercher des « mesures d’atténuation potentielles et de mécanismes de consensus alternatifs et les compromis de conception qu’ils peuvent entraîner ».

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