La scène est courante : vous vous retrouvez dans une soirée mondaine organisée par l’amicale des amateurs de fromages français et vous devez faire la conversation. Malheureusement, vous n’y connaissez rien dans le subtil art du frometon. Ne paniquez pas, Cheezam vous permettra de tromper votre auditoire aisément.
Le site, développé par les équipes de l’entreprise Prevision.IO, promet d’identifier n’importe quel fromage à partir d’une simple photo. Brie, fourme d’Ambert, Cabeccou, Saint-Nectaire, l’intelligence artificielle connait un bon paquet de fromages et peut vous aider à identifier un délicieux produit inconnu. Prenez une photo du fromage, envoyez-la au site et, en quelques secondes, vous aurez votre réponse.
Comme l’indique le site, toute l’idée du service est partie d’une blague. « Lors d’un déjeuner, il y a quelques mois, un débat a eu lieu sur les types de fromages servis sur un plateau à dessert […] De ce déjeuner est née une idée : l’intelligence artificielle peut-elle être utilisée pour identifier un type de fromage ? Le moment est venu d’annoncer officiellement Cheezam, une application d’intelligence artificielle construite sur la plateforme de gestion de l’IA de Prevision.io. Elle a été entraînée sur un jeu de données de fromages français. »
Le fromage, cobaye idéal pour l’IA
L’outil a commencé comme un moyen d’identifier les différents types de fromage (pâtes molles, pâtes pressées, fromages de chèvre) et quelques 27 000 images plus tard, le site est devenu capable de différencier un brie de Meaux d’un camembert. « En fait, c’est notre système de test interne », nous explique Arnold Zephir, connu sous le pseudo cepcam sur Twitter. C’est sur ces milliers de photos de fromage que les IA de l’entreprise s’entrainent.
« En interne on n’aime pas trop les datasets d’images, parce que les plus courants sont des maladies de type cancer ou maladie de la peau. Ou alors ce sont des datasets avec des visages ( pour le maquillage typiquement ) et je n’aime pas trop avoir des datasets de personnes qui se baladent entre nous », précise l’ingénieur. Les équipes ont donc créé « un joli dataset de fromage qui ne pose pas de polémique », sur lequel il est possible d’entraîner les systèmes de l’entreprise lorsqu’une nouvelle version sort.
« En interne, il a pas mal de gros mangeurs, donc la bouffe s’est naturellement imposée », ajoute Arnold Zéphir. Mais le choix n’a pas été fait purement sur des considérations alimentaires. Analyser des photos de fromage est un bon test, car « il y a beaucoup de catégories et des problèmes d’éclairage ». Cela permet donc de tester les machines de l’entreprise sur une collection variée, et parfois complexe, d’objets différents.
Abondance ou Beaufort ? Cheezam en test
« La mimolette marche évidemment très bien, car elle est très spécifique. […] Les fromages suisses divers (abondance , appfenzeller, etc.) moins, car ils sont visuellement similaires » détaille l’expert en logiciels et en datascience. Techniquement, le système ne se repose pas sur une seule intelligence artificielle en réalité. L’algorithme derrière Cheezam va d’abord demander à une première IA d’identifier s’il y a du fromage ou non sur la photo, puis va passer le relai à une collection d’autres IA pour tenter de détecter de quel fromage il s’agit. « En fait, il y a 6 IA, une par famille de fromage en gros » pointe Arnold Zéphir. Les photos passent par chaque couche de la machine avant que ne s’affiche un résultat.
La plus grosse difficulté est de réussir à entrainer ces IA sur des photos avec des éclairages variés. Sous une ampoule de maison, la pâte blanche d’un brie peut se parer de teintes jaunes trompeuses. Lors de nos tests, Cheezam a tout à fait correctement identifié le profil si caractéristique du Saint-Nectaire, mais a confondu un crottin de chèvre avec un Pélardon. Un bout d’Abondance a aussi trompé la machine qui a pensé être devant un Beaufort. Les deux étant des fromages de Savoie avec un profil similaire, il n’est pas si étonnant de les confondre.
« Comme on s’interdit de stocker des images des utilisateurs, il faudrait qu’on aille passer du temps chez un fromager pour prendre plein de photos. C’est toujours le nerf de la guerre », conclut Arnold Zephir.
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