De vendredi à dimanche, j’ai porté l’Apple Vision Pro entre 4 à 5 heures par jour, en substitut de mon Mac et de mon iPhone. En attendant le test complet, qui arrivera dans plusieurs semaines (le temps de vraiment bien l’appréhender), voici un premier retour sur la vie spatiale qu’Apple présente comme l’informatique du futur.

L’Apple Vision Pro n’arrivera probablement pas avant plusieurs mois en France, donc j’ai pris l’initiative d’aller le chercher aux États-Unis. Depuis l’annonce de « l’ordinateur spatial » en juin 2023, Numerama veut s’imposer comme le média de référence sur le suivi de cette « révolution technologique ». Nous faisions partie des premiers testeurs français du casque, nous souhaitons maintenant être les premiers à repousser ses limites.

Le Vision Pro est-il l’ordinateur du futur promis par Apple ? Pour le savoir, j’ai passé une dizaine d’heures avec le produit sur la tête entre vendredi et dimanche. Au revoir l’iPhone et le Mac pour répondre aux messages, écouter de la musique, regarder des vidéos ou travailler, place à l’informatique spatiale. Est-ce que mes yeux fonctionnent encore ? La réponse dans ce « premier test », qui sera suivi de nombreux autres articles dans les prochaines semaines.

L’expérience est vraiment futuriste

Première chose importante : le Vision Pro n’est pas mon premier casque de réalité virtuelle. C’est important de le préciser, puisque j’ai l’impression que beaucoup des premiers testeurs américains n’avaient jamais essayé la VR avant Apple. Beaucoup se sont dit impressionnés par l’immersion permise par un tel produit, qui permet de se téléporter où on le souhaite. C’est vrai, mais ce n’est aucunement nouveau.

J’ai toujours apprécié la VR, mais je n’ai jamais testé de produits susceptibles de la rendre populaire pour tous. Mon Meta Quest Pro est cool, mais je n’imagine pas mes parents en porter un à jour. Et c’est cet aspect qui m’a beaucoup intéressé lors de ce premier week-end de test : je pense qu’Apple a trouvé la bonne formule.

Quand on met un Vision Pro, pas besoin de dire si on est assis ou debout, de configurer son espace de mobilité, on voit le monde et les icônes.
Quand on met un Vision Pro, pas besoin de dire si on est assis ou debout, de configurer son espace de mobilité, on voit le monde et les icônes. // Source : Numerama

Pourquoi ? Parce qu’Apple a supprimé tout ce qu’il y a de mauvais avec la VR. La configuration d’une pièce n’existe plus, le casque fonctionne dans la seconde où on le porte. Qu’on soit assis, debout ou en mouvement, cela n’a aucune importance, les applications sont les premières choses que l’on voit. Et c’est d’ailleurs le second avantage du Vision Pro : toutes les applications sont familières. Les messages de l’iPhone arrivent sur le casque, les appels aussi… Le Vision Pro n’est pas une expérience à part, c’est l’intégration de tous les produits Apple dans un seul. Bonus : Apple pense l’expérience autour de la réalité mixte, en répliquant le vrai monde grâce à des caméras. C’est le premier constructeur à avoir cette approche.

Évidemment, un des autres avantages majeurs du produit est la manière dont il se contrôle. J’aime les manettes du Quest, mais forcer un débutant à les porter est pénible. Ici, il suffit de regarder une icône, de pincer son pouce et son index… et voilà. C’est magique, ce n’est pas toujours parfait (j’en reparlerai dans quelques jours, quand j’aurai plus de recul) et c’est la meilleure manière de contrôler une réalité virtuelle en 2024. Sans aucune concurrence. La qualité visuelle aide aussi à rendre la réalité virtuelle plus plaisante, puisque les pixels sont invisibles. Un écran Retina dans la VR.

Quand on se met en mode VR, en désactivant les caméras, la qualité est hors norme. Il n'y a aucun pixel.
Quand on se met en mode VR, en désactivant les caméras, la qualité est hors norme. Il n’y a aucun pixel. // Source : Numerama

En France, l’expérience est volontairement bridée par Apple. Pour faire fuir les importateurs comme moi, la marque force à utiliser le produit en anglais, désactive l’auto-correction du clavier en français et ne propose pas d’App Store au lancement. Heureusement, avec un compte américain, on peut télécharger des applications. C’est aussi simple que sur un iPhone, avec en bonus une partie du catalogue iOS qui peut être installé sur le produit, sous la forme de fenêtres 2D flottantes. D’ailleurs, et c’est très cool, on peut toucher une application comme s’il s’agissait d’une application en l’approchant de ses yeux. Une fenêtre virtuelle devient alors une mini-tablette.

Pour le clavier, je recommande l’utilisation d’un clavier Bluetooth physique. Le Vision Pro n’est pas un jouet, mais un ordinateur. Le clavier virtuel est cool (on regarde les touches ou on appuie dessus, au choix), mais un clavier physique est beaucoup plus efficace.

Quand on utilise un clavier, on peut disposer une petite fenêtre flottante au-dessus des touches pour voir ce que l'on écrit. On peut la toucher pour choisir un mot suggéré.
Quand on utilise un clavier, on peut disposer une petite fenêtre flottante au-dessus des touches pour voir ce que l’on écrit. On peut la toucher pour choisir un mot suggéré. // Source : Numerama

Après un week-end avec le Vision Pro, j’ai la sensation qu’Apple vise juste. Mon père ou ma mère, malgré leur non-intérêt pour cette technologie, pourraient trouver ça cool le jour où je leur ferai essayer mon produit. Est-ce assez pour les convaincre de remplacer leurs téléviseurs et ordinateurs par un Vision ? Sans doute pas, mais c’est déjà une première victoire. La première cible d’Apple reste les fans de technologie et les jeunes, qui sont nombreux à manifester leur intérêt pour le Vision Pro. La suite viendra après, avec un produit qui gommera les défauts de la V1.

Un problème de vue très frustrant

L’Apple Vision Pro est un produit optique, une première pour Apple. La marque a d’ailleurs donné ce nom à une fonction, puisque l’équivalent de Touch ID et de Face ID sur le casque s’appelle Optic ID. Quand on a besoin de saisir automatiquement un mot de passe (un autre avantage de l’écosystème Apple), le casque vérifie que l’iris du porteur est celui de son propriétaire, il n’y a rien à faire à part attendre 2 secondes. Cette technologie marche incroyablement bien et donne l’impression d’être dans le futur.

À la première configuration, le Vision Pro configure aussi l’écartement des yeux (c’est automatique) et demande de regarder des points, pour apprendre le fonctionnement du regard du porteur. On ne s’en rend pas compte, mais l’optique est une science complexe.

La configuration du regard dans visionOS.
La configuration du regard dans visionOS. // Source : Numerama

Justement, c’est sur cet aspect qu’Apple se prend les pieds dans le tapis. Les experts de la VR étaient convaincus qu’Apple règlerait des problèmes physiques connus depuis des années, mais la marque utilise en réalité les mêmes lentilles que les autres. Le résultat est meilleur, grâce à la qualité des écrans et des caméras, mais des phénomènes comme le « vergence accomodation conflict » sont toujours là. En résulte une vision parfois floue, puisque l’écran reste à une distance fixe. Les muscles des yeux ne sont pas toujours capables de faire la mise au point.

Tout le monde n’est pas sensible à ce problème, mais c’est malheureusement mon cas. Certains disent qu’ils peuvent lire ce qu’il y a sur leur iPhone ou leur montre lorsqu’ils portent le Vision Pro, j’en suis incapable, alors que j’ai 10 sur 10 à chaque œil. J’ai tenté d’acheter des verres Zeiss pour améliorer ma vue, mais rien n’a changé. Je consulterai un ophtalmo à mon retour en France, mais tout me laisse penser que le Vision Pro V1 n’est pas compatible avec mes muscles oculaires. Je dois placer les fenêtres à plusieurs mètres virtuels de distance pour tout voir nettement. D’autres témoignages similaires apparaissent en ligne. Peut-être que quelques séances d’orthoptie amélioreraient ma vision ?

J'ai acheté des lentilles Zeiss pour la vue de près, mais rien n'a changé.
J’ai acheté des lentilles Zeiss pour la vue de près, mais rien n’a changé. Le problème n’est pas lié à ma vue. // Source : Numerama

Autre problème : le champ de vision. J’étais un des premiers à en parler en juin 2023, mais le Vision Pro n’est pas aussi immersif que ce que certains prétendent. Il laisse du noir autour de la vision, puisque la mousse qui protège le crâne bloque la lumière. C’est l’unique aspect sur lequel Meta fait mieux. D’un certain côté, cela offre un avantage : on ne peut pas oublier que l’on est dans une simulation du réelle. La qualité du « passthrough », malgré toute la puissance des puces Apple, est aussi limitée par le rendu en temps réel. Le casque laisse volontairement du bruit pour éviter de saturer.

Un poids améliorable

Et le poids ? Je vous en reparlerai de manière plus détaillée, mais sachez qu’Apple fournit deux sangles dans la boite. La premiere sert le tour de la tete, la deuxième ajoute un élastique au-dessus du crâne, pour plus de stabilité.

Je n’arrive pas à tenir 10 minutes avec la première, mais je tiens des heures avec la seconde. Le poids est un plus petit problème que la pression exercée par la mousse sur le front.

Pour travailler et se détendre, le Vision Pro est très cool

Ironiquement, l’ordinateur spatial d’Apple a besoin d’un autre ordinateur pour devenir un vrai outil de travail (on additionne donc 3 500 dollars au prix d’un Mac). Malgré la présence d’une puce M2, le Vision Pro ne peut pas faire tourner d’applications macOS nativement. Apple permet donc d’importer l’écran de son Mac dans l’appareil pour le contrôler avec son clavier et sa souris.

C’est bête, mais cette fonction est la « killer feature » de visionOS 1.0. Il n’y aucun lag, aucun problème de qualité, le Vision Pro permet de projeter un écran de 100 pouces sur le plafond ou devant soi, pour que l’on puisse travailler sans se tordre le dos pour regarder son MacBook. C’est génial et fonctionnel : la preuve, j’ai écrit l’intégralité de cet article avec le casque sur la tête.

Une fenêtre Chrome géante pour travailler, c'est très plaisant.
Une fenêtre Chrome géante pour travailler, c’est très plaisant. // Source : Numerama

Quand on émule son Mac, Apple a eu une idée que je trouve formidable. Il est possible d’avoir son Mac devant soi et des applications visionOS tout autour. Si vous faites dépasser la souris à droite ou à gauche de l’écran, elle vous permet de contrôler les applis visionOS. C’est aussi magique que génial. Et évidemment, le clavier fonctionne aussi.

Autre avantage du Mac Virtual Display : les applis indisponibles au lancement du Vision Pro, comme Messenger ou WhatsApp, peuvent être utilisées. Le mélange Mac/visionOS est vraiment cool. Dommage de ne pas pouvoir émuler plusieurs écrans en même temps, mais ça viendra.

En cas de bug d'une application, on la quitte de force comme sur Mac.
En cas de bug d’une application, on la quitte de force comme sur Mac. // Source : Numerama

Dans certains cas, j’ai aussi pu travailler nativement avec visionOS. Safari me permet d’accéder au back-office de Numerama, la version iPad de Slack est sur l’App Store et j’utilise iMessage pour communiquer avec des collègues. Quand plus d’applications seront là, visionOS pourra prendre son indépendance.

Quid du divertissement ? Voici quelques premières réactions :

  • La qualité des haut-parleurs est fantastique, pas besoin de mettre des écouteurs pour écouter de la musique ou regarder un film.
  • La possibilité de se créer une télévision virtuelle de la taille de son choix, qui reste au même endroit dans une pièce, est géniale. Le mode cinéma exclusif à l’appli Apple TV est aussi fantastique, avec le son qui s’adapte à votre place dans la salle.
  • Disney+, qui propose des environnements personnalisés, est la meilleure appli de streaming avec Apple TV. Les films 3D sont bluffants. C’est beaucoup mieux qu’au cinéma.
  • Regarder YouTube ou Netflix n’est pas un problème grâce à Safari, avec des fenêtres aussi redimensionnables.
  • Les vidéos immersives d’Apple offrent une profondeur inimaginable, mais la qualité visuelle est parfois moyenne. J’ai du mal à imaginer que de grands événements sportifs investiront dans le matériel nécessaire pour filmer dans ce format sur le court terme.
  • Les vidéos spatiales prises avec l’iPhone sont une vraie claque. Il y a un pincement au cœur à chaque fois. Apple peut potentiellement initier une révolution sur la manière de filmer, en ajoutant une dose de 3D à chaque fois.
  • Les panoramas sont moins bons que ce que j’aurais imaginé. Je n’ai pas été impressionné.
Les films 3D mettent une claque au cinéma. Jamais une profondeur n'a été aussi grande dans un casque VR.
Les films 3D mettent une claque au cinéma. Jamais une profondeur n’a été aussi grande dans un casque VR. // Source : Numerama

J’adore appeler des gens en FaceTime pour leur faire peur

J’en reparlerai une autre fois, mais le Persona, alias l’avatar 3D créé par le casque pour reproduire mon visage, est aussi fascinant qu’amusant. Je le trouve plutôt réaliste, mais les animations de mon visage donnent l’impression que je suis paralysé (je ne le suis pas, j’espère). En revanche, les yeux EyeSight sont moins mauvais que ce que j’aurais imaginé. C’est plutôt bien fait.

J’ai appelé 10 personnes de mon entourage ce week-end. 9 ont réagi de la même manière, en me disant que mon Persona était horrible et en me suppliant de retirer le casque. Mon père, lui, ne s’est pas rendu compte de la supercherie avant une vingtaine de secondes, puis a rigolé. Bref, les FaceTime dans le Vision Pro, ce n’est pas encore parfait.

Mon Persona me ressemble, mais il est bizarre.
Mon Persona me ressemble, mais il est bizarre. // Source : Numerama

En parlant de FaceTime, l’absence d’une vraie application dans visionOS est bête. Un bug fait parfois disparaître l’appel et il n’y a rien d’autre à faire que de fermer toutes ses fenêtres pour le retrouver. visionOS 1 a encore quelques problèmes de jeunesse.

Et la batterie ?

Honnêtement, même si le câble m’embête parfois, c’est un vrai détail. Le casque tient 3-4 heures sur une seule charge, alors qu’Apple annonçait 2 heures, et je l’ai souvent utilisé branché au courant. Bref, faux problème, qu’il faudra éliminer dans les prochaines versions.

J’ai hâte de continuer la découverte

Vous l’avez compris, ce premier week-end avec le Vision Pro est globalement une très bonne surprise, du moins du point de vue du concept qu’il amène. Je crains qu’il ne soit encore trop imparfait pour être le hit espéré par Apple, mais je pense que la marque a raison de croire en ce type de produit. Espérons désormais que les soucis de vision s’amélioreront et que les applications arrivent en masse. L’autre enjeu pour la marque est de multiplier les essais, puisqu’il faut porter le Vision Pro pour vraiment comprendre le produit.

La suite du test très bientôt, après un passage chez l’ophtalmo. Si vous avez des questions, n’hésitez pas à me les faire parvenir sur les réseaux sociaux.

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