Un séjour dans l’espace n’est pas sans conséquence sur le sang des astronautes. La microgravité a pour effet une destruction accélérée des globules rouges dans leur sang.

Que se passe-t-il dans le sang des astronautes qui séjournent dans l’espace ? Sans surprise, les effets ne sont pas très positifs. Voyager dans l’espace contribue à détruire davantage les globules rouges dans le sang, avance une équipe de scientifiques dans Nature Medecine le 14 janvier 2021. Leur étude est relayée par l’université d’Ottawa.

Depuis les toutes premières missions spatiales, on sait que l’anémie, c’est-à-dire une baisse anormale du taux d’hémoglobine (présente dans les globules rouges) dans le sang, peut survenir chez les astronautes. Normalement, de nouveaux globules rouges sont créés chaque jour par l’organisme, plus précisément par la moelle osseuse, pour remplacer ceux qui sont détruits. En cas d’anémie, on constate soit que la production de globules rouges est insuffisante, soit que les globules rouges sont bien produits, mais détruits de façon trop importante.

Le sang de 14 astronautes en mission dans l’ISS analysé

Mais « les mécanismes contribuant à l’anémie dans les vols spatiaux sont restés flous », constatent ces scientifiques. C’est pourquoi ils ont entrepris de mesurer des marqueurs de l’hémolyse (la destruction des globules rouges du sang, un phénomène normal tant que la destruction n’est pas accélérée), dans des échantillons d’haleine et de sang de plusieurs astronautes. Ils effectuaient des missions de 6 mois à bord de la Station spatiale internationale. Les prélèvements ont eu lieu avant le vol, 4 fois pendant la mission et jusqu’à un an après, auprès de 14 astronautes (11 hommes et 3 femmes). Tout cela s’est passé entre 2015 et 2020, dans le cadre de l’expérience MARROW.

Thomas Pesquet insérant les tubes de prélèvements sanguins de l'expérience MARROW dans un congélateur, à bord de l'ISS, en 2016. // Source : Nasa (photo recadrée)
Thomas Pesquet insérant des tubes de prélèvement sanguin de l’expérience MARROW dans un congélateur, à bord de l’ISS, en 2016. // Source : Nasa (photo recadrée)

Résultat : « le vol spatial est associé à des niveaux constamment accrus de produits de la dégradation de l’hémoglobine ». Dit plus simplement, cela signifie que la destruction trop importante de globules rouges (ou hémolyse) serait bien un effet entraîné par le fait de rester dans l’espace — on parle plus précisément de microgravité dans l’ISS. Chez ces 14 astronautes, les scientifiques ont pu constater que leur corps détruisait 54 % de globules rouges de plus dans l’espace, par rapport à ce qui se passerait normalement sur Terre.

  • Sur Terre, le corps humain crée et détruit 2 millions de globules rouges chaque seconde,
  • Dans l’ISS, le corps de ces astronautes en a détruit 3 millions chaque seconde.

Les scientifiques n’ont pas pu mesurer directement la production des globules rouges : ce qu’ils ont quantifié, c’est la quantité de monoxyde de carbone dans les échantillons. Une molécule de ce type est créée à chaque fois qu’une molécule d’hème (le pigment rouge des globules, précise le communiqué) est détruite. Les chercheurs n’ont pas pu vérifier si les astronautes produisaient assez de globules rouges en plus pour compenser les cellules détruites, mais cela semble probable puisqu’ils n’ont pas développé des anémies sévères.

Manquer de globules rouges pose surtout problème à l’atterrissage

Comme l’expliquent ces scientifiques, avoir moins de globules rouges n’est pas forcément un problème en apesanteur. Cela le devient au moment d’atterrir sur Terre (et certainement sur d’autres planètes ou lunes) lorsque la personne se retrouve à nouveau confrontée à la gravité. On pourrait donc imaginer que cela ait un impact après que les astronautes se posent sur la Lune ou Mars, par exemple. Et plus la mission est longue, plus les risques d’anémie risqueraient de s’aggraver.

Sur Terre, il a été constaté que le phénomène était réversible : 3 à 4 mois après leur retour sur notre planète, les astronautes ont retrouvé progressivement des niveaux de globules rouges plus normaux. Mais cela n’empêche pas des effets à plus long terme : un an après le vol, la destruction des globules était encore supérieure à 30 %, par rapport au niveau avant le vol.

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