Et si la lecture de l’ADN était bientôt à la portée de tous ? Une entreprise britannique a conçu le premier séquenceur portable. Une miniaturisation qui pourrait permettre de l’exporter facilement et prévenir les épidémies.

Les technologies transportables partout ont déjà changé notre quotidien. Téléphoner, passer une commande, payer, s’informer : ces actions ne sont qu’un échantillon de tous les services que nous rendent aujourd’hui les smartphones et autres objets connectés.

Et la santé n’est pas en reste, avec des applications capables de compter les calories ingérées, calculer son nombre de pas quotidiens, améliorer son sommeil ou suivre l’évolution d’une courbe de poids. Mais ces exemples ne sont peut-être encore que la version light de ce que réserve le futur de la santé connectée : et si, bientôt, nous pouvions lire notre ADN n’importe où ?

Décrypter l’ADN, partout

En effet, le premier séquenceur d’ADN portable au monde vient de voir le jour, et il pourrait fondamentalement révolutionner notre manière de lire l’ADN. Mis au point par Oxford Nanopore Technologies, une entreprise anglaise qui possède également des bureaux aux États-Unis, ce séquenceur nommé MinION tient dans la paume d’une main. Une taille qui ne l’empêche pas de fonctionner très longtemps en autonomie, pendant plusieurs jours si besoin.

Oxford Nanopore Technologies

Oxford Nanopore Technologies

Charles Chiu, professeur associé à l’UCSF School of Medicine de Los Angeles, a participé à l’élaboration de l’objet. En créant ce séquenceur, lui et son équipe avaient une volonté : permettre de réduire le nombre de tests nécessaires pour diagnostiquer des infections. « Nous pourrions potentiellement remplacer une dizaine, voire une centaine de tests cliniques, par un unique test », explique-t-il dans une interview.

Plus facile à transporter dans des zones infectées

Grâce à sa taille bien moins imposante que les traditionnels séquenceurs d’ADN (imaginez une énorme boîte de la taille d’un frigo), cette version miniaturisée serait bien plus facile à démocratiser. « J’envisage une situation où nous serons capables de diagnostiquer des infections dans des environnements de soins : aux urgences, dans les laboratoires de recherche, afin d’être capables d’identifier des épidémies aussitôt qu’elles apparaissent », poursuit Charles Chiu.

« Cela ouvre la perspective d’amener ces instruments et les tests qu’ils permettent de faire dans des endroits en Afrique, en Asie, ou dans les régions d’Amérique du Sud infectées par des virus comme Ebola ou Zika », poursuit-il.

Oxford Nanopore Technologies

Oxford Nanopore Technologies

Gordon Sanglera, le PDG d’Oxford Nanopore Technologies, prend appui sur les récentes épidémies que le monde a connu pour souligner l’intérêt médical que représenterait ce séquenceur d’ADN.

« Ce que nous voyons aujourd’hui, c’est qu’il y a de plus en plus d’épidémies d’origine alimentaire, la plus récente étant celle l’épidémie d’E. coli à Chipotle (ndlr : une chaîne de fastfood américaine, spécialisée dans la restaurions mexicaine). Ils ont été capables de le découvrir après coup, de détecter que c’était une épidémie d’E. coli. Cette technologie va nous permettre de faire des tests en cours de procédé, régulièrement. C’est de la prévention, et pas seulement des soins curatifs. »

Déjà un premier voyage à bord de l’ISS

Outre ces applications médicales, le séquenceur pourrait avoir de nombreuses autres utilités. Déjà mobilisé pour faire avancer la recherche spatiale, il s’est offert un séjour dans la Station Spatiale Internationale, lieu privilégié de nombreuses expérimentations. « Nous utilisons en effet cet instrument pour faire du séquençage dans la Station Spatiale Internationale afin de contrôler l’environnement dans l’espace. Nous pensons aussi que cela pourrait permettre d’identifier l’ADN à la base de la vie dans le cosmos », avance Charles Chiu.

Un accès pour tous à l’information biologique

Quant au commun des mortels, pourrait-il trouver un intérêt à lire son ADN partout, tout le temps ? On pourrait en douter quand on constate que, pour l’instant, connaître les risques livrés par les facteurs génétiques inscrits dans l’ADN ne semble pas suffire pour changer le comportement de la plupart d’entre nous. Le MinION changera-t-il la donne ? Gordon Sanglera n’a pas la réponse, mais croit déjà à un monde où l’ADN n’aurait plus de secret pour personne.

« Notre vision à long terme dans cette entreprise, est que tout le monde puisse accéder à l’information biologique, n’importe où, n’importe quand. Nous ne savons pas encore où cela va nous mener, mais c’est aussi pour cela que c’est excitant », conclut-il.


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