Dans un article publié le 29 septembre 2025 dans la revue PNAS, des scientifiques dévoilent des preuves chimiques datant de plusieurs millions d’années qui signeraient la présence d’éponges sur Terre bien avant le développement d’autres formes de vie complexes.

Et, si Bob l’éponge avait été présent sur Terre bien avant le reste des animaux ? C’est ce que des scientifiques auraient peut-être bien prouvé.

Des chercheurs du Massachusetts Institute of Technology (MIT) ont mis en évidence, dans une étude publiée le 29 septembre 2025 dans la revue Proceedings of the National Academy of Sciences (PNAS), un fossile chimique, soit une signature géochimique qui date de plusieurs millions d’années. Dans le cadre de cette découverte, ce fossile impliquerait que parmi les tout premiers animaux sur notre planète, il y avait des éponges.

« Un fossile chimique est un vestige d’une biomolécule issue d’un organisme vivant, puis enfouie, transformée et préservée dans des sédiments, parfois pendant des centaines de millions d’années », explique le communiqué du MIT. Ici, ces traces chimiques ont été trouvées dans des roches vieilles de 541 millions d’années.

Une histoire de stérols et de stéranes

La signature chimique que les chercheurs ont identifiée sont des stéranes. Il s’agit « d’une forme géologiquement stable de stérols, présente chez tous les eucaryotes (plantes, animaux et tout organisme doté d’un noyau et d’organites membranaires). »

Le lien entre ce composé chimique et une éponge ? « Les chercheurs ont relié ces stéranes spécifiques à une classe d’éponges marines appelées démosponges », est-il expliqué.

Éponge-vase ramifiée  // Source : Wikimédia
Éponge-vase ramifiée // Source : Wikimédia

Les démosponges sont présentes dans les océans avec des tailles et des couleurs différentes. Elles ont une texture molle et spongieuse, et agissent comme des « organismes filtreurs ». Les ancêtres des démosponges pourraient aussi avoir eu ces caractéristiques.

Roger Summons, professeur émérite de géobiologie du MIT et l’un des auteurs principaux de l’article souligne ne pas savoir « exactement à quoi ces organismes auraient ressemblé à l’époque, mais ils auraient certainement vécu dans l’océan, ils auraient eu un corps mou et nous présumons qu’ils n’avaient pas de squelette de silice. »

En découvrant un fossile chimique spécifique à ces éponges, l’équipe a plus largement prouvé que les prédécesseurs des démosponges aurait donc fait partie des premiers animaux à évoluer sur notre planète Terre, et ce, beaucoup plus tôt que le reste des animaux.

De premières preuves, il y a plus de 15 ans

Les premières preuves, les premiers fossiles chimiques venant d’éponges anciennes ont en réalité été trouvés il y a plus de 15 ans, en 2009.

L’équipe de chercheurs avait découvert des stéranes qui s’avéraient être des vestiges préservés de stérols possédants 30 atomes de carbone. « Il est très inhabituel de trouver un stérol avec 30 carbones », souligne Lubna Shawar, l’autrice principale de l’étude.

En plus de ce fait rare, pour les chercheurs, ce composé ne pouvait être créé que grâce à une protéine particulière qui, elle-même, provient d’un gène très spécifique, commun aux démosponges.

Représentation artistique des éponges de mer  // Source : Jose-Luis Olivares-MIT
Représentation artistique des éponges de mer. // Source : Jose-Luis Olivares-MIT

Ces fameux stéranes ont, par ailleurs, été découverts à Oman dans des roches formées il y a entre 541 et 635 millions d’années. Cette période précède l’apparition de la vie sous forme multicellulaire sur Terre. Donc, comme l’explicite le communiqué, cela « suggère que les éponges anciennes sont apparues bien plus tôt que la plupart des formes de vie multicellulaire et qu’elles ont peut-être été l’un des premiers animaux sur Terre. »

Cependant, après l’étude de 2009, des voix de la communauté scientifique se sont élevées, arguant que ces stérols à 30 atomes de carbone auraient pu être formés par un autre vivant, ou même simplement par un processus géologique.

De nouvelles preuves, finalement

Aujourd’hui, les chercheurs apportent de nouvelles preuves sur la table qui appuient la première hypothèse émise il y a 15 ans, comme quoi ces stérols à 30 atomes de carbone sont bien une forme de signature chimique des éponges anciennes. En effet, ils ont identifié un nouveau fossile chimique dans des roches datant de la même période et dans différentes localisations (Oman, Inde et Sibérie).

Cette fois-ci, les scientifiques ont compris que le même gène spécifique provenant de l’éponge permettait, en plus des stérols à 30 atomes de carbone, de produire un composé encore plus rare : des stérols à 31 atomes de carbone. En étudiant attentivement leurs échantillons de roche, ils se sont aperçus qu’effectivement, à côté des stérols à 30 atomes de carbone, il y avait des stérols à 31 atomes de carbone en abondance !

« Ces stéranes particulières étaient là depuis toujours », raconte Lubna Shawar. « Il a fallu se poser les bonnes questions pour les trouver et vraiment comprendre leur signification et leur origine. »

Une éponge d'eau douce // Source : Wikimédia
Une éponge d’eau douce // Source : Wikimédia

En simulant les conditions d’évolution sur des échantillons de démosponges modernes, les chercheurs ont finalement réussi à prouver que les composés qu’ils analysaient depuis le début (les stérols et les stéranes) n’avaient pas été « produits par un processus non biologique aléatoire ». Ce qui signifie donc que « les stéranes découverts dans les roches anciennes ont bel et bien été produits par des organismes vivants, plutôt que par des processus géologiques ». Et ainsi, par conséquent, prouver que les éponges étaient l’une des premières espèces animales sur Terre.

Pour la suite, les chercheurs voudraient rechercher des fossiles chimiques dans plus d’échantillons de roche, provenant des différentes régions du monde, afin de pouvoir affiner leur estimation des périodes auxquelles se sont formés certains des premiers animaux.

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