C’est la première fois qu’un singe rhésus cloné vit jusqu’à plus de 2 ans. Les chercheurs ont modifié la méthode de clonage habituelle. Mais le taux de réussite reste en réalité très faible, et ne résout pas le débat bioéthique sur la question du clonage et de la souffrance animale.

Il se nomme Retro, il a fêté son troisième anniversaire et se porte bien, ce qui relève d’une première : jamais un singe rhésus cloné n’avait survécu si longtemps auparavant, jusqu’à atteindre l’âge adulte en dépassant sa deuxième année. Dans cette étude publiée le 16 janvier 2024, des scientifiques chinois expliquent les mécanismes à l’œuvre dans cette expérience de clonage.

Un nouveau type de clonage

La méthode décrite dans ce papier modifie le processus de clonage habituel — celui utilisé pour des clonages célèbres comme la brebis Dolly –, et qui a peiné à faire ses preuves en matière de chance de survie.

Lors du développement du fœtus, il faut que le placenta évolue correctement, en phase avec l’expression des profils génétiques. Problème : avec la technique de clonage habituelle (par transfert de noyau), l’activité génétique est perturbée. Le placenta des embryons clonés rencontre donc des anomalies qui réduisent considérablement la survie.

Le singe rhésus cloné. Il est encore en vie début 2024. // Source : Étude dans Nature Communications
Le singe rhésus cloné. Il est encore en vie début 2024. // Source : Étude dans Nature Communications

En revanche, le placenta d’embryons fertilisés in vitro (de manière extra-corporelle) se comporte comme on l’attend. C’est là que les chercheurs chinois ont trouvé une solution : un transfert de trophoblaste. Le trophoblaste correspond à la couche de cellules qui forme ensuite le placenta enveloppant le fœtus. Les chercheurs ont extrait les cellules de placenta d’un embryon sain produit par fertilisation in vitro pour les utiliser dans le clonage. En clair, l’embryon cloné se développe avec un placenta issu d’un embryon non cloné.

C’est cette amélioration de la technique initiale qui a permis à ce singe rhésus de survivre, pour la première fois, jusqu’à deux ans.

Un seul survivant sur 113 embryons

Il faut cependant creuser au sein de l’étude pour découvrir que les chances de survie restent globalement très faibles. Les scientifiques à l’origine de ces travaux ont mobilisé leur méthode sur 113 embryons. Sur les 113, un seul a survécu — le singe rhésus en question. Le taux de réussite est donc inférieur à 1 %. C’est sur les anomalies restantes, non encore corrigées par la nouvelle technique, que va se concentrer désormais cette équipe de recherche.

Le clonage animal reste une pratique controversée et fait l’objet d’un intense débat bioéthique. Le processus, qui implique beaucoup d’itérations, d’erreurs, et de décès d’êtres vivants, active régulièrement le problème de la souffrance animale dans les laboratoires. D’autant que, dans le cas présent, les singes rhésus sont une espèce fortement impliquée dans la recherche médicale, car sa séquence ADN est très proche de celle des humains. Le clonage est donc ici mobilisé aussi pour cette raison, ce qui ne fait qu’accroître les inquiétudes éthiques d’une telle utilisation du clonage.

Cela pose aussi la question du clonage humain, mais, même pour l’un des auteurs de cette étude, Falong Lu, il s’agit d’une frontière qu’il n’envisagerait pas lui-même : ce serait « totalement inacceptable » dit-il à CNN.

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