Les méthodes de pêche dans le golfe de Gascogne déciment les dauphins et marsouins. La France a été mise en demeure d’agir par la Commission européenne et par le Conseil d’État, mais le projet d’arrêté n’est pas à la hauteur. Les associations appellent à exprimer un avis défavorable dans le cadre de la consultation publique sur cet arrêté.

« C’est une hécatombe », alerte l’association Bloom, qui rappelle également qu’il est encore possible de se prononcer, par mail, en la défaveur d’un projet d’arrêté qui n’est pas à la hauteur. Et l’hécatombe n’est pas des moindres : chaque année, sur les côtes françaises, 1 500 dauphins et marsouins s’échouent. Tout du moins, pour les échouages visibles : nombreux sont les individus à mourir au fond de l’eau, de manière invisible, ce qui porterait le taux de mortalité à 5 000, voire 10 000 par an.

C’est un phénomène très documenté, et très suivi, par les scientifiques. La cause de ces décès par milliers a été pleinement identifiée. « Avant de venir s’échouer sur la côte, les mammifères ont été piégés dans l’un des nombreux filets de pêche déployés dans le golfe de Gascogne », expliquait, dans le journal du CNRS, Olivier Van Canneyt — biologiste à l’observatoire Pelagis (Observatoire pour la conservation de la mégafaune marin). « Faute de pouvoir s’en libérer, ils n’ont pu remonter à la surface et sont morts asphyxiés. »

« Ces mortalités, depuis six à sept ans, ne sont plus soutenables »

L’urgence est devenue absolue. « Ces mortalités, depuis six à sept ans, ne sont plus soutenables », explique Olivier Van Canneyt. Tant et si bien qu’aujourd’hui, les scientifiques estiment que l’on pourrait assister à une extinction régionale. Le problème vient notamment du taux de reproduction de ces mammifères marins : un taux très faible. Les dauphins ne se reproduisent qu’entre 8 et 15 ans, sur une durée de vie de 40 ans, avec une gestation de 10 mois pour un seul petit. Le rythme des décès surpasse le rythme de reproduction : c’est ainsi que fonctionne la disparition d’une espèce.

Un projet d’arrêté décrit comme « honteux »

La situation est si grave que la France a été mise en demeure par la Commission européenne, avec une obligation de mettre en œuvre « des mesures concernant la protection des espèces marines protégées et les captures accidentelles de cétacés ». Le Conseil d’État a également été saisi par trois associations. L’autorité a répondu avec une décision très claire en mars 2023 : « (…) le Conseil d’État ordonne aujourd’hui au Gouvernement de prendre des mesures, dans un délai de 6 mois, pour limiter les captures accidentelles des petits cétacés par les activités de pêche dans le golfe de Gascogne ».

Beaucoup de dauhpins, tués par ces méthodes de pêche, meurent en s'échouant de manière invisible, au fond de l'eau. // Source : Canva
Beaucoup de dauhpins, tués par ces méthodes de pêche, meurent en s’échouant de manière invisible, au fond de l’eau. // Source : Canva

Résultat : la France a publié un projet d’arrêté. Une bonne nouvelle ? Pas vraiment : l’association Bloom le qualifie de « honteux ». Et pour cause, « celui-ci balaie tout simplement les recommandations des scientifiques ».

Le Conseil d’État enjoint effectivement de fermer certaines zones de pêche pendant un temps approprié. Or, le projet d’arrêté est très limité :

  • Fermeture des pêcheries à risques pendant 1 mois (mi-janvier à mi-février)
  • Fermeture dans certaines zones du golfe de Gascogne d’un mois des pêcheries à risques (de mi-janvier à mi-février) et uniquement dans certaines zones du golfe de Gascogne.

Les recommandations scientifiques, telles que celles fournies par le Conseil international pour l’exploration de la mer (CIEM) — sur lequel s’appuie le Conseil d’État –, sont bien plus vastes :

  • Fermeture des pêcheries à risques pendant 4 mois
  • Fermeture dans l’ensemble du golfe de Gascogne

La disproportion en va également des équipements. L’association relève que le projet d’arrêté ajoute une exception pour la pêche à la senne, « une méthode qui impacte pourtant les cétacés ». Par ailleurs, la fermeture de la pêche ne s’applique pas aux bateaux déjà équipés de répulsifs acoustiques : « Souvenez-vous que ces dispositifs devaient uniquement être installés sur les chaluts ‘en complément’ d’une fermeture appropriée, et non ‘à la place’ », dénonce Bloom.

Comment participer à la consultation publique

Le projet d’arrêté est soumis à une consultation publique. Cela signifie que sa mise en œuvre est dépendante des avis reçus. Date de fin de la consultation : le 28 septembre 2023.

La démarche est très simple, il s’agit d’une adresse mail dans lequel vous devez donner votre avis : [email protected]

Deux règles dans le cadre d’une consultation publique quelle qu’elle soit :

  • L’avis doit être clair ;
  • Il ne doit pas être copier-coller

Vous pouvez faire très court, mais aussi étayer les raisons de votre opposition si vous décidez de vous y opposer. L’association France Nature Environnement, qui fait partie de celles qui avaient saisi le Conseil d’État, a listé un certain nombre d’arguments, sous une forme synthétique, sur les problèmes posés par le projet d’arrêté (attention, encore une fois : vous ne devez pas copier-coller ces éléments, ils ne servent qu’à nourrir votre avis et ainsi votre mail personnel).

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