Les satellites en orbite autour de la Terre ont beau être des bijoux de technologie, ils n’en restent pas moins peu esthétiques. Une allure de gros insecte avec un corps cubique ou cylindrique et des grosses ailes que symbolisent leurs panneaux solaires. Mais la Nasa travaille actuellement sur un design un peu différent : les DiskSats.
Ces appareils en forme de disque sont développés par l’entreprise Aerospace Corporation qui espère en envoyer en orbite autour de 2024. L’agence spatiale américaine a financé la société pour lancer un démonstrateur technologique d’ici là. Mais pourquoi vouloir envoyer des soucoupes volantes dans l’espace ? « Dans le spatial, tout est affaire de compromis, confie à Numerama Éric Boussarie, ingénieur au Cnes, l’agence spatiale française. Il faut minimiser la masse tout en emportant de la puissance pour alimenter les instruments, et pour augmenter la puissance, toute initiative est bienvenue. »
C’est l’idée principale derrière le développement de ces DiskSats : fournir davantage d’énergie avec une structure moins lourde, facile à empiler dans des lanceurs pour être lancés en grande quantité. D’après Aerospace Corp, un DiskSat d’un mètre de diamètre, de 2,5 centimètres d’épaisseur et de 8 kg pourra fournir environ 100 watts. Pour comparaison, il faudrait un CubeSat de 30 kg pour apporter la même quantité d’énergie.
Une orbite vide à occuper
L’entreprise prévoit de lancer d’ici 2024 deux paires de DiskSats, la première se placera autour de 250 kilomètres d’altitude, et la deuxième en dessous des 200 kilomètres. Des orbites relativement basses, la plupart des autres satellites sont au moins à 500 kilomètres d’altitude. Mais il s’avère que le design des DiskSats est justement pratique pour voler un peu plus bas. Leur forme les rend moins sensible à l’air, ils frottent moins et ont donc besoin de moins de corrections de trajectoire, ce qui signifie donc des économies d’énergie. Selon Richard Welle, l’inventeur du DiskSat dans Space News : « C’est un tout nouveau régime orbital qui n’est pas trop pollué par les autres satellites. »
Il est vrai que l’explosion du nombre de satellites, notamment avec les constellations comme Starlink, rend le risque de collision plus élevé. Trouver des types de satellites capables de voler plus bas serait donc avantageux, même s’il reste toujours le risque lié aux débris spatiaux qui, eux, changent d’orbite de manière incontrôlée. Et justement, en parlant de débris, les créateurs du produit assurent que sans contrôle d’altitude, les satellites tomberaient plus vite sur Terre et seraient donc moins susceptibles de causer des collisions après la fin de la mission.
Cela dit, à quoi peuvent bien servir ces satellites ? Et bien selon Éric Boussarie, l’intérêt risque d’être plutôt limité : « Le problème avec ces designs, c’est que ça limite énormément le type d’instruments qu’on peut mettre dedans. Il faut que ce soit uniquement des antennes plates, aucun instrument d’optique… » Forcément, si des instruments ne peuvent pas être installés dans le « pack » du satellite, ils dépasseront et le DiskSat deviendra beaucoup moins pratique à lancer.
Des applications encore limitées pour ces DiskSats
Mais la Nasa a quelques idées d’applications avec cette technologie. Par exemple, il pourrait s’agir de constellations de satellites dédiés à la communication, le tout avec des engins plus puissants et plus légers que les satellites habituellement dédiés à ce genre de réseau orbital.
« Si les satellites peuvent s’approcher assez près de la Terre, ce serait pratique pour avoir des observations vraiment précises, reconnaît Éric Boussarie. Mais il faut se rappeler que ce ne sera pas dans l’optique, et que quand on est plus près, on a un champ de vision beaucoup plus étroit. Là aussi, il faut faire un compromis ! »
Mais avant d’en arriver là, Aerospace Corp et la Nasa espèrent avant tout réussir les premiers tests, dont le but sera de tester la maniabilité des engins. L’entreprise assure qu’il serait possible de faire changer l’orbite d’un satellite facilement, ce qui est habituellement une opération très gourmande en énergie.
Les DiskSats peuvent donc être utiles pour certaines missions spécifiques, des observations radar de la Terre par exemple qui pourraient être précises, ou dans un deuxième temps, des constellations de satellites plus puissants et moins lourds. Mais pour Éric Boussarie, nous ne sommes pas encore à la veille d’une révolution du secteur : « Dans ce marché, tout se joue dans la standardisation. Nous avons des instruments standards qu’il faut faire rentrer dans des architectures de véhicule. C’est intéressant d’imaginer de nouveaux concepts, et c’est ce que font les start-up. Mais au Cnes, nous avons toute la problématique en tête, et un tel changement a beaucoup de conséquences. »
Dans quelques années, les DiskSats pourront donc certainement cohabiter avec les CubeSats et autre NanoSats plus petits, mais pour chacune de ces technologies, le problème reste le même : il faut toujours trouver le bon équilibre entre la masse, la puissance et l’instrumentation. Actuellement, Aerospace Corp. travaille sur la manière d’adapter le design aux lanceurs, et il reste à savoir si des clients seront intéressés par ces soucoupes volantes.
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