Nous avons nous-mêmes été bernés. « Wow, j’ai kiffé », s’est exclamé l’un de mes collègues, pourtant féru de musique. Jusqu’à ce qu’il apprenne que ce morceau — Walk my Walk de Breaking Rust — était entièrement généré par IA. Pas étonnant, quand on sait que 97 % des auditeurs seraient incapables de faire la différence entre des chansons générées par IA et celles composées par des humains, selon une étude de Deezer et Ipsos publiée le 12 novembre 2025 (via Reuters). À l’image de notre réaction, environ 71 % des auditeurs se disent, eux aussi, surpris de ne pas pouvoir faire la différence.
Les musiques générées par IA cartonnent dans les classements
Bien qu’elles soient redoutées et critiquées par une partie de l’industrie comme des auditeurs, les musiques générées par IA ont néanmoins le vent en poupe. Le phénomène dépasse largement la curiosité passagère : certains titres s’installent désormais dans les classements les plus suivis. Ce même morceau qui a brièvement conquis l’un de nos collègues figurait ainsi, au 11 novembre 2025, parmi les « meilleures ventes digitales » du classement country de Billboard. Rien que ça.

À leur (et notre) décharge, difficile de faire le tri dans cette jungle musicale. De nombreux comptes d’« artistes » ne sont pas identifiés comme tels — Breaking Rust n’est qu’un exemple parmi d’autres. Pour le public, cette absence de transparence crée une frustration croissante. Les chiffres de l’étude sont d’ailleurs révélateurs : menée auprès de 9 000 personnes dans 8 pays, dont les États-Unis, le Royaume-Uni et la France, elle indique que 73 % des sondés souhaitent que les morceaux générés par IA soient clairement signalés lorsqu’ils leur sont recommandés. 45 % aimeraient pouvoir les filtrer, et 40 % affirment qu’ils les passeraient directement.
Mais il faudra prendre son mal en patience. Les principales plateformes de streaming musical affichent aujourd’hui des politiques très disparates face aux morceaux générés par l’IA, ce qui entretient une véritable zone grise pour les artistes comme pour le public. Spotify, en particulier, a été au cœur de plusieurs polémiques ces derniers mois après avoir laissé prospérer des projets musicaux à l’identité volontairement floue, dont des groupes comme The Velvet Sundown. L’entreprise avait alors été accusée de manquer de transparence et de profiter d’un volume artificiellement gonflé de titres low-cost.

Des politiques en matière d’IA encore très différentes selon les plateformes
Le Français Deezer — qui revendique 9,7 millions d’utilisateurs — a été l’un des premiers acteurs à se positionner fermement contre la prolifération des titres générés par IA. La plateforme voit arriver plus de 50 000 morceaux créés artificiellement chaque jour, soit environ un tiers de l’ensemble des mises en ligne, contre 18 % en avril. Une croissance fulgurante qui a poussé la firme tricolore à introduire, en juin 2025, un système d’étiquetage des chansons générées par IA, après une première phase de détection automatique en décembre 2024. Apple Music, de son côté, n’a pas instauré d’étiquetage visible ni de filtre spécifique pour les contenus produits par IA. En revanche, il n’hésite pas à retirer des titres lorsque ceux-ci enfreignent des droits d’auteur ou utilisent la voix d’artistes sans leur consentement, comme ce fut le cas avec « Heart On My Sleeve », le morceau viral imitant Drake et The Weeknd. Une stratégie qui s’apparente davantage à une gestion au cas par cas, plutôt qu’à une politique généralisée.
Spotify maintient quant à lui la musique générée par IA sur sa plateforme, mais impose désormais l’identification claire de ces titres, conformément au standard DDEX. Cette mention doit préciser où et comment l’IA intervient dans la production. La plateforme insiste sur sa volonté de ne pas freiner l’innovation tout en limitant les dérives, afin d’encadrer ce nouvel écosystème sans le brider. Une position équilibrée en théorie, mais qui peine encore à convaincre une partie des utilisateurs, échaudés par plusieurs polémiques récentes. Comme le souligne Reuters, Universal Music Group a récemment réglé un litige en matière de droit d’auteur avec la société d’IA musicale Udio. Si les termes financiers de l’accord n’ont pas été divulgués, les deux entreprises prévoient de lancer en 2026 une plateforme de création musicale basée sur l’IA, entraînée sur des œuvres sous licence.
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