Saviez-vous que les députés suisses ont ratifié le 5 octobre dernier les deux traités OMPI à l’origine de la loi DADVSI française ? Si vous ne le saviez pas, rassurez-vous… les Suisses non plus ! La loi a été adoptée en catiminie, sans doute dans l’espoir d’éviter un référendum populaire qui risquerait de bloquer son adoption…

Personne n’en a jamais parlé. Pas même la presse du pays. Le 5 octobre dernier, l’Assemblée fédérale de la Confédération suisse a adopté dans une extrême discrétion l’arrêté fédéral (.pdf) « portant approbation de deux traités de l’Organisation
Mondiale de la Propriété Intellectuelle et à la modification de la loi sur le droit d’auteur
« . La loi suisse du 9 octobre 1992 sur le droit d’auteur est ainsi modifiée avec en particulier une section sur la « protection des mesures techniques« . Par l’effet de cette nouvelle loi, il est interdit « de contourner les mesures techniques efficaces servant à la protection des œuvres », ou de concevoir ou faire la promotion d’outils essentiellement destinés au contournement des DRM. « L’interdiction de contourner ne peut pas frapper celui qui contourne une mesure technique efficace exclusivement dans le but de procéder à une utilisation licite », prévoit toutefois la loi.

Inspirée par l’Autorité de Régulation des Mesures Techniques mise en place en France, la Suisse crée un « Observatoire des Mesures Techniques ». Celui-ci « sert d’organisme de liaison entre les utilisateurs et les consommateurs, d’une part, et les utilisateurs de mesures techniques, d’autre part, et encourage la recherche de solutions communes ». Si l’intérêt public l’exige, l’Observatoire peut « prendre des mesures » pour le sauvegarder.

Le texte de loi prévoit une peine d’emprisonnement d’un an pour ceux qui mettent à disposition des œuvres piratées sur Internet, et une amende pour qui contourne ou propose des outils pour contourner les DRM. Ce sont des peines plus faibles qu’en France, où les peines sont de trois ans d’emprisonnement et 300.000 euros d’amende.

Malgré cela, les justiciables suisses pourraient s’opposer à l’adoption de la loi s’ils la jugeaient contraire à leurs intérêts. La constitution suisse leur accorde en effet le pouvoir de bloquer l’entrée en vigueur de la loi et d’exiger un référendum populaire s’ils recueillent au préalable 50.000 signatures. Le délai référendaire pour l’arrêté fédéral sur le droit d’auteur expire au 24 janvier 2008. On se souvient du débat passionné qui avait précédé l’adoption de la loi DADVSI en France. Dans chaque pays où il est question de ratifier les accords OMPI et de sanctionner le contournement des DRM, le débat est toujours vif et accroché. Alors qu’en France ce droit de véto populaire n’existe pas, la pétition lancée par EUCD.info avait recueillie 173628 signataires entre le 2 décembre 2005 et le 3 août 2006. Est-ce pour ne surtout pas risquer un référendum populaire qu’une telle omerta sur le texte existe ? Ou est-ce (plus gravement peut-être) le symptôme d’un manque total d’intérêt politique et démocratique chez nos voisins helvétiques ?


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