Près de 30 grands groupes du numérique devront payer cette taxe de 3 % sur leur chiffre d’affaires réalisé en France. Le gouvernement espère générer environ 500 millions d’euros par an.

Le calendrier de la taxe sur les géants du numérique se précise. Le projet de loi sera présenté en conseil des ministres le mercredi 6 mars, a déclaré en début de semaine le ministre de l’Économie et des Finances, Bruno Le Maire. L’objectif poursuivi par le gouvernement avec ce nouveau prélèvement, qui ne concernera qu’une poignée de sociétés, est de récupérer 500 millions d’euros par an.

Au passage, le patron de Bercy a aussi précisé l’étendue de cette taxation : en tout, c’est une trentaine d’entreprises qui devra s’acquitter de cet impôt. La liste exhaustive n’est pas donnée, mais on sait déjà que des groupes comme Airbnb, Amazon, Apple, Booking, Facebook, Google et Uber sont concernés. La majorité d’entre eux sont des groupes étrangers, précise Bruno Le Maire au Parisien.

Bruno Le Maire. // Source : Aron URB

Bruno Le Maire.

Source : Aron URB

Profil de la taxe

« Il y aura également une entreprise française et plusieurs autres sociétés d’origine française, mais rachetées par des grands groupes étrangers », précise le ministre. Il s’agit de Criteo, une compagnie fondée en 2005 et aujourd’hui valorisée 1,7 milliard de dollars. Sa spécialité est le ciblage publicitaire, l’un des secteurs qui est concerné par le projet de taxe sur les géants du net.

Il est prévu d’appliquer un taux de taxation de 3 % et rendre la mesure rétroactive au 1er janvier, avec un vote de loi courant 2019.

Hormis le ciblage publicitaire, sont aussi visées la revente de données personnelles à des fins publicitaires et la mise en relation, contre rémunération, entre des clients et des entreprises. C’est le cas par exemple d’Uber dans le domaine du transport ou bien d’Amazon sur son site de commerce électronique. Mais quand Amazon vend ses propres produits, ceux-ci ne sont pas touchés.

Le ministre a donné l’exemple de Darty : « une entreprise qui met en vente sur son site ses propres marchandises n’aura pas à s’en acquitter. Par exemple, Darty vend ses téléviseurs ou ses lave-linge sur son site, il ne s’agit pas de mise en relation entre deux internautes, cette activité ne sera pas taxée. En revanche, quand Amazon est rémunéré comme intermédiaire numérique entre un producteur et un client, là, ce sera taxé ».

Plusieurs entreprises françaises, filiales ou non de groupes étrangers, comme Le Bon Coin, SoLocal (ex-Pages Jaunes) et BlaBlaCar, ont fait part de leur inquiétude à l’égard de cette taxation, soit parce qu’elles cochent toutes les cases de l’éligibilité, soit parce qu’elles ne sont pas loin de le faire. Mais le ministère a imaginé plusieurs leviers pour leur permettre d’y échapper ou de limiter le prélèvement.

Blablacar

Blablacar craint pour sa croissance avec l’arrivée de cette taxe.

Préserver les groupes français

Afin de préserver au maximum les entreprises françaises, qu’il s’agisse de startups ou de grands groupes, le gouvernement français a imaginé une structure juridique spécifique : il faut en effet atteindre un double seuil (750 millions d’euros de chiffre d’affaires dans le monde et 25 millions d’euros de chiffre d’affaires en France) pour devoir s’acquitter de la taxe.

L’exécutif a aussi prévu un mécanisme de déduction d’impôt pour les entreprises qui ont déjà une démarche vertueuse : « le montant acquitté sera donc déductible du résultat comptable sur lequel est calculé l’impôt sur les sociétés. Cela aura pour effet de réduire jusqu’à un tiers du montant de cette taxe pour les entreprises qui payent leurs impôts en France », détaille Bruno Le Maire au Parisien.

Par ailleurs, le ministre a tenu à détailler les autres mesures favorables aux entreprises, en citant la baisse de l’impôt sur les sociétés (de 33,3 % à 25 %), une mesure « beaucoup plus attractive que ce que peut représenter la taxation du numérique », ou bien le crédit d’impôt recherche. « Notre attractivité se juge avant tout à l’aune des nouvelles dispositions fiscales que nous avons mises en place. C’est là-dessus que se jouera l’implantation des centres de recherche ou des centres de données ».

Enfin, le mécanisme doit être provisoire, en attendant une solution au niveau européen, voire mondial. « Dès qu’il y aura un accord au sein de l’OCDE, ces nouvelles règles fiscales internationales prendront la place de notre taxe française », affirme Bruno Le Maire, qui balaie au passage tout risque juridique avec les États-Unis. Le ministre affirme qu’il est « nul ».

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