Le Parlement européen peut-il contribuer à sauver la neutralité du net aux USA ? 149 élus ont écrit à leurs collègues américains pour les inciter à agir sur le plan de la loi. Leur souhait ? Qu’ils contrent la décision du régulateur des télécoms.

Le vote aux États-Unis de la Commission fédérale des communications en défaveur de la neutralité du net n’en finit plus de causer des remous. Outre-Atlantique d’abord, mais aussi à l’étranger, notamment en Europe. Rien d’étonnant : les USA, de par leur poids économique et de la place qu’ils occupent dans l’écosystème numérique, sont un puissant prescripteur normatif pesant sur la politique d’autres pays.

Aussi la trajectoire américaine sur la neutralité du net est suivie avec attention de ce côté-ci de l’océan. La preuve : la France et le Royaume-Uni se sont sentis obligés de souligner leur attachement à ce principe lors d’un sommet entre les deux pays. Et en France, des membres du gouvernement comme Mounir Mahjoubi, le secrétaire d’État au numérique, et Jean-Yves Le Drian, le patron du Quai d’Orsay, ont fait de même.

Marietje Schaake

Marietje Schaake.
CC Sebastiaan ter Burg

Et c’est aussi pour cette raison qu’un collectif de 148 élus européens emmenés par leur collègue néerlandaise Marietje Schaake, qui est au passage la vice-présidente du dialogue transatlantique des législateurs au Parlement européen, s’est adressé aux membres du Congrès pour leur demander d’agir contre le vote de la Commission fédérale des communications,

« Nous vous prions instamment de garder le cap et vous demandons de renverser les règles adoptées par la FCC en décembre, qui visent à mettre fin à la neutralité du réseau », écrivent les représentants du Vieux Continent, en soulignant que « les normes et les règles établies aux États-Unis ont un impact mondial, surtout quand il s’agit d’Internet ».

« Nous vous prions instamment de renverser les règles adoptées par la FCC en décembre »

La gravité de la situation justifie d’ailleurs un certain interventionnisme européen dans les affaires américaines : Marietje Schaake indique en effet que « le Parlement européen essaie d’influencer au moins un sénateur républicain de plus pour qu’il vote en faveur du projet de loi », en référence à l’initiative législative menée au sénat et à la chambre des représentants par un groupe de démocrates.

À ce sujet, la patronne des démocrates à la Chambre a appelé à un vote contre la décision de la FCC, même si son parti est minoritaire. « Le Congrès doit agir pour renverser cette décision destructrice de la FCC qui a laminé un consensus bipartite qui durait depuis des décennies et la volonté du peuple américain en sapant les règles du jeu équitables qui sont au cœur d’Internet », a dit Nancy Pelosi.

En parallèle, la lutte au niveau des États fédérés se poursuit. En marge de l’action en justice lancée par les procureurs généraux de 22 États contre la décision de la FCC, le gouverneur du Montana, Steve Bullock, a signé un ordre exécutif qui, résume The Hill, exige que les fournisseurs d’accès à Internet ayant conclu des contrats avec l’État respectent les principes de neutralité du réseau.

« L’avenir du Montana dépend d’un Internet libre et ouvert. Aujourd’hui, nous sommes devenus le premier État du pays à faire quelque chose pour sauvegarder la liberté de l’Internet », écrit l’intéressé sur Twitter. Son désir ? « Faire en sorte que l’État du Montana ne traite qu’avec des entreprises qui adhèrent à la neutralité du net », ajoute-t-il dans un autre message.

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Paysage du Montana.
CC USFWS Mountain-Prairie

En théorie, l’ordre exécutif de Steve Bullock entrerait en vigueur le 1er juillet 2018. Mais la procédure risque d’être illicite : l’abrogation décidée par la FCC interdit aussi aux États fédérés d’appliquer leurs propres règles de neutralité du réseau, fait observer The Hill. Un obstacle qui n’a pas dissuadé Steve Bullock d’aller de l’avant, même en supposant qu’une mise en garde ait été émise par ses conseillers juridiques.

Sans doute l’initiative recevra-t-elle le soutien des grands groupes du numérique, puisque ces derniers, via leur lobby, ont exprimé leur intention d’aller en justice et de soutenir toute action législative pro-neutralité du net. Cette association regroupe des entreprises comme Amazon, eBay, Facebook, Google, Microsoft, Netflix, Spotify et Twitter.


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