Le professeur Mike Wade qui enseigne dans une prestigieuse école internationale de gestion a envoyé à la presse une tribune se moquant de la volonté des parlementaires européens de scinder Google en diverses entités indépendantes, pour assurer sa neutralité et éviter les abus de position dominante. Problème : ce professeur est aussi consultant dans le privé, et compte Google parmi ses principaux clients.

L'essentiel est certainement que quelques uns s'y fassent avoir. Ce mercredi matin, Numerama a reçu comme probablement beaucoup de confrères un communiqué envoyé par le service de communication de la prestigieuse école de gestion IMD basée à Lausanne. Il s'agit d'une tribune écrite par Mike Wade, "professeur de gestion de l'innovation et de l'information stratégique", qui attaque la résolution du Parlement Européen demandant à scinder Google en plusieurs entités indépendantes.

"Les récentes tentatives du Parlement européen de censurer et de contrôler les activités de Google sont malavisées et possiblement motivées par des considérations politiques", tonne le professeur qui fait aussi référence à l'obligation imposée par la justice européenne d'autoriser le droit à l'oubli dans les résultats de recherche.

"Google a du succès en grande partie parce qu'il propose un bon produit gratuitement. La grande majorité des gens utilisent le moteur de recherche de Google de leur propre choix et trouvent que les résultats sont utiles. Les utilisateurs ne sont pas forcés d'utiliser la recherche Google d'une façon monopolistique. Ils ont le choix d'utiliser d'autres services gratuits concurrents comme Bing ou Yahoo", ajoute-t-il. Mike Wade fait mine ensuite de ne pas comprendre ce que les parlementaires demandent, lorsqu'ils souhaitent une "neutralité" dans les résultats de recherche.

Or personne ne conteste le fait qu'en Europe les utilisateurs choisissent d'utiliser Google (ou désormais le font par réflexe). Le problème est que Google abuse de son monopole de fait, sans aucun doute mérité, pour mettre en avant ses propres services spécialisés (Maps, YouTube, Shopping, News…) au détriment des services concurrents qui se retrouvent relégués dans les bas de pages. Ou qu'il use de ses fonds colossaux pour épuiser ses concurrents en offrant d'abord gratuitement des services qui deviennent ensuite payants lorsque la concurrence est rincée.

Consultant pour Google

Hélas, les habitudes des internautes européens font qu'un service qui n'est pas visible sur Google a très peu de chances d'être connu et utilisé par les internautes. La "neutralité" qui serait imposée à Google ne consiste donc évidemment pas à lui demander de ne pas avoir d'algorithmes qui trient l'information, ce qui serait stupide, mais à faire en sorte que le moteur de recherche Google traite avec le même égard les services annexes développés par Google et leurs concurrents. Comme nous l'avions expliqué dès 2010, la neutralité de Google ne peut être garantie qu'en découpant Google en entreprises indépendantes.

N'importe quel professeur d'économie ou de gestion est capable de le comprendre et devrait le défendre, mais apparemment pas M. Wade qui traite avec dédain de cette question et de la résolution du parlement européen. Or il suffit d'aller consulter la biographie officielle de Michael Wade pour voir que ce professeur fournit également "des services de consulting, de la formation de cadres et des évaluation d'expert auprès de plusieurs organisations du secteur public et privé, dont IBM, LVMH, Google, et Novartis".

On ne sait pas si la résolution du Parlement Européen était malavisée et motivée par des considérations politiques, mais on doute que la tribune du professeur Wade soit motivée par une stricte indépendance intellectuelle et financière à l'égard du sujet de sa tribune…

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