Alors qu'elle avait affirmé la semaine dernière la nécessité d'apporter de vraies garanties de respect de la neutralité du net, ce qui était un revirement, la commissaire européenne Neelie Kroes a livré ce mardi un discours plus conforme à ses habitudes. La fourniture d'un accès à Internet neutre pourrait être imposée aux FAI, mais pas la neutralité du net. Une subtilité d'importance cruciale.

La semaine dernière, nous rapportions que la Commissaire Européenne en charge de l'agenda numérique, Neelie Kroes, avait fait marche arrière et décidé d'imposer le respect de la neutralité du net aux fournisseurs d'accès à Internet, quelques mois après avoir promu le redoutable libre choix des FAI et des consommateurs. Le retour à la raison nous était même confirmé par le porte-parole de Mme Kroes, qui affirmait que la vice-présidente de la Commission Européenne parlait bien de "garantir que tous les contenus soient (disponibles) sur tous les appareils", sans discriminations.

Mais le discours prononcé ce mardi par Neelie Kroes, à l'occasion d'une conférence parlementaire "sur l'Internet Ouvert", invite à la prudence.

Certes, la Commissaire a confirmé qu'elle avait entendu les protestations et compris que la seule transparence des offres des FAI n'était pas suffisante pour garantir la neutralité du net. "Avec une véritable transparence, je doute que beaucoup de consommateurs prendraient la peine d'acheter" des offres qu'ils savent bridées par les FAI, a-t-elle réitéré. Mais "il est tout aussi clair pour moi que beaucoup d'Européens attendent une protection contre de telles pratiques commerciales, et c'est exactement ce que la protection de l'Union Européenne va apporter. Une protection pour chaque Européen, sur n'importe quel appareil, sur tous les réseaux ; une garantie d'accès à l'internet plein et ouvert, sans aucun blocage ou bridage de services concurrents".

"Des utilisateurs différents ont des besoins différents"

Cependant dans le même discours, qui a été assez froidement accueilli par les partisans de la neutralité du net, Neelie Kroes est aussi revenue à ses premières amours. "Pour moi, une plateforme ouverte est basée sur la concurrence, la transparence d'innovation, et le choix. Et c'est aussi sur ça que sera basée notre proposition", a-t-elle déclaré.

"Nous devrions favoriser l'innovation. Les nouveaux services qui se profilent ne dépendent pas uniquement du contenu, mais aussi de connexions de haute qualité. Par exemple, si vous venez d'acheter un système de vidéoconférences, vous voudrez probablement un accès à Internet qui garantisse la bonne qualité, de bout en bout. Si quelqu'un veut payer quelque chose en plus pour ça, aucune règle européenne ne devrait se mettre en travers de leur chemin".

La vision de Neelie Kroes semble ainsi partagée entre d'un côté l'imposition d'une neutralité d'Internet, au besoin par l'obligation faite aux FAI de proposer une option "Internet illimité sans bridage" pour un coût supérieur à leur offre de base limitée ; et de l'autre côté le souhait de libérer la possibilité pour les FAI de proposer des "services gérés", notamment via leurs box ADSL/fibre, qui garantiront une qualité d'accès dans le cadre d'un réseau fermé, qui n'est plus tout à fait Internet.

"Il ne faut pas approcher les choses par idéologie (…). Je n'ai jamais cru que l'on pouvait réguler par des slogans (…) Des utilisateurs différents ont des besoins réseaux différents (…). Je veux mettre les besoins de ces consommateurs au centre de notre réflexion. Les opérateurs ont besoin de respecter ces différents besoins, et pour ce faire il faut aussi leur permettre de répondre à ces besoins".


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