Un rapport remis mercredi par une mission d’information du Sénat propose de mener des expérimentations du revenu de base, susceptible de remplacer les minima sociaux. Trois modèles sont envisagés.

Le Premier ministre Manuel Valls a indiqué qu’il souhaitait en faire un grand débat, qui pourrait être un marqueur de la présidentielle 2017 alors que les Républicains semblent au contraire totalement négliger l’impact des technologies sur les revenus du travail. Mercredi, la mission d’information du Sénat « sur l’intérêt et les formes possibles de mise en place d’un revenu de base en France », présidée par le sénateur Daniel Percheron (PS), a rendu son rapport. Il préconise d’expérimenter le revenu de base sur une partie du territoire, auprès d’une population test comprise « entre 20 000 et 30 000 personnes ».

D’une extrême prudence, le rapport évite de prendre position entre les différentes visions du revenu de base, et propose d’en tester trois versions différentes, qui permettrait de toucher à chaque fois l’équivalent du RSA (environ 535 € pour une personne seule ou 800 € pour un couple), en remplacement de la totalité des minimas sociaux (RSA, ASS, AAH…) perçus par les personnes faisant l’objet de l’expérimentation.

Le Mouvement français pour un revenu de base (MFRB) a publié deux ouvrages sur le sujet, aux éditions Yves Michel.

Le Mouvement français pour un revenu de base (MFRB) a publié ce mois-ci deux ouvrages sur le sujet, aux éditions Yves Michel.

À condition qu’une loi l’autorise, les collectivités locales candidates à l’expérimentation pourraient ainsi tester ces trois formules différentes, sur une période de trois ans :

  • Une allocation sous forme inconditionnelle : « Les bénéficiaires se verraient verser une somme fixe, indépendamment de leur pouvoir d’achat, qu’ils pourraient utiliser de façon totalement libre.(…) Cette expérimentation pourrait concerner les 25-64 ans, dans un objectif de lutte contre la précarité et de retour à l’emploi » ;
  • Un versement inconditionnel avec obligation d’utiliser l’allocation à des fins spécifiques : « Un montant fixe serait versé à chaque bénéficiaire, mais son emploi serait « finalisé ». Le bénéficiaire devrait utiliser ces fonds par exemple pour des achats alimentaires, des actions de formation, des frais de mobilité.(…) L’expérimentation de cette forme de revenu serait particulièrement pertinente à l’égard des jeunes, pour lesquels il semble préférable d’orienter l’utilisation de l’allocation envisagée à des actions en lien avec leur bonne insertion dans la société » ;
  • Un versement conditionné au respect d’une obligation spécifique : « Le revenu ne serait versé qu’en contrepartie d’une obligation particulière, par exemple le suivi d’une action de formation ou des mesures de recherche d’emploi actives. Deux variantes seraient possibles : dans l’une, le revenu serait versé mais susceptible d’être retiré par la suite en cas de méconnaissance des obligations ; dans l’autre, le versement n’interviendrait qu’une fois constaté que l’intéressé a commencé à remplir ses obligations ».

On a là tout l’éventail des différentes visions du revenu de base, de la plus « pure » qui ne veut pas regarder à qui ni pourquoi l’allocation est versée, à la version la plus « dure » qui reviendrait par exemple à priver les allocataires de leurs droits s’ils ne recherchent pas un emploi ou ne rendent pas de service civique.

L’expérimentation devrait concerner en premier lieu les bénéficiaires des minima sociaux

Selon les propositions du rapport, l’expérimentation devrait être menée de la manière la plus scientifique et indépendante possible, pour comprendre les effets de la mise en place d’un revenu de base avant d’envisager sa généralisation à l’échelle nationale. Cela donc demandera de tester plusieurs bassins de populations, à la fois dans des régions dynamiques ou en déclin économique, et éventuellement de tester différentes tranches d’âge. Le rapport semble ainsi pencher pour un des expérimentations qui pourraient ne toucher que les 18-25 ans et les 50-65 ans, qui sont les plus touchées par le chômage.

« Le revenu de base, s’il devait être instauré en France, devrait avoir pour objectif prioritaire la lutte contre la pauvreté tout en ne remettant pas en cause l’importance du travail et de l’activité dans l’insertion sociale », écrit ainsi la mission d’information. « L’expérimentation devrait en premier lieu concerner la population en grande difficulté, c’est-à-dire notamment celle qui bénéficie aujourd’hui des minima sociaux ». Néanmoins les sénateurs ne souhaitent pas, comme c’est par exemple le cas en Finlande, réserver le revenu de base aux seuls chômeurs, dans une vision ultralibérale très pénalisante pour certains bénéficiaires.

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