L’action d’adolescents qui ont fait déclencher une opération anti-terroriste d’ampleur à Paris samedi dernier est une première par son ampleur, mais pas dans sa nature. Or quand elle parvient à identifier les auteurs des canulars, la justice sanctionne durement.

Samedi vers 16h, le quartier des Halles de Paris a vécu un moment d’angoisse lorsque les forces de police ont déployé d’importants moyens autour de l’église de Saint-Leu, qui faisait prétendument l’objet d’une prise d’otages. Le quartier a été bouclé, les forces d’intervention ont été déployées d’urgence, et un hélicoptère a survolé la zone. La préfecture, qui avait pris la menace très au sérieux, avait même déclenché une alerte par l’application SAIP, en affirmant qu’un attentat avait eu lieu.

Après une demi-heure de vérifications, les autorités ont toutefois pu lever les doutes et annoncer qu’il s’agissait d’une fausse alerte. Le lendemain, deux jeunes adolescents de 16 et 17 ans qui se faisaient connaître sur Facebook comme « Tylers Swatting » et « Zakhaev Yamaha » expliquaient à L’Obs être les auteurs de la fausse alerte, qu’ils présentent comme un simple canular. « J’ai fait le pire SWATT, j’ai fait déplacé [sic] des hélico, le gouvernement, 50 voiture de flics j’suis passer [sic] en premier sur twitter, j’suis passer sur periscope, j’suis passer sur facebook, j’suis passer sur BFMTV et 10 journal hihi #églisefuck #flicKO », avait écrit l’un d’eux sur sa page Facebook.

« On a fait ça pour le buzz. Si les gens ont eu peur c’est leur problème… », ont-ils expliqué. L’un raconte : « J’ai dit que j’étais caché dans la cave et que dix maghrébins étaient rentrés avec des armes dans l’église ».

Les deux complices, qui font prendre des risques à ceux qui ne croiront pas aux prochaines alertes, assuraient s’être mis à l’abri des poursuites judiciaires. « On n’est pas traçable, on utilise des serveurs cryptés. On est à moins de deux heures de Paris, on n’a pas peur de la police », lançaient les deux ados. Une affirmation qui est aujourd’hui fortement fragilisée, car la police a été interpellé un suspect qui pourrait être l’un des deux auteurs du canular. Il s’agirait du jeune âgé de 16 ans, selon une source judiciaire contactée par France Info.

Des précédents « swatting » déjà condamnés

L’utilisation de serveurs chiffrés n’est pas une nouveauté en matière de « swatting », cette activité idiote et dangereuse consistant à faire déplacer les forces de police, généralement chez un particulier, en invoquant une fausse menace à la bombe, à la prise d’otages ou au meurtre.

En début d’année, la justice avait mis en examen le fournisseur d’un serveur Jabber (XMPP) sécurisé, dont le service librement accessible avait été utilisé par une bande de « hackers » baptisé « Evacuation Squad » pour créer de fausses alertes à la bombe contre six lycées parisiens (Louis-le-Grand, Henri-IV, Condorcet, Charlemagne, Montaigne et Fénelon) les 26 janvier et 1er février 2016. Le jeune lycéen qui fournissait ce service ne conservait aucun log sur ses utilisateurs, et avait été poursuivi pour son refus de fournir les clés de chiffrement utilisées. Le groupe « Evacuation Squad » affirmait pour sa part disposer d’une « grande quantité de crédits d’appels » qu’il pouvait utiliser pour passer des coups de téléphone anonyme avec Skype, WhatsApp ou Google Hangouts. C’est peut-être la même méthode qui a été utilisée par les deux ados ayant créé la panique au quartier des Halles de Paris.

Le groupe n’a plus refait parler de lui depuis cette arrestation, et le lycéen est resté placé sous le statut de témoin assisté.

Quand la police parvient à identifier les auteurs des fausses menace (en essayant de remonter toutes les adresses IP utilisées sur les différents moyens de communication), les sanctions tombent. L’article 322-14 du code pénal prévoit deux ans de prison et 30 000 euros d’amende pour « le fait de communiquer ou de divulguer une fausse information dans le but de faire croire qu’une destruction, une dégradation ou une détérioration dangereuse pour les personnes va être ou a été commise ». Or c’est cette sanction maximale qui fut décidée en juillet 2016 contre un adolescent, qui avait fait intervenir la police contre un joueur qui diffusait sa partie de DayZ sur Twitch.

Quelques semaines plus tard, un homme de Thionville (Moselle) était condamné à quatre mois de prison pour la diffusion de fausses menaces publiée via un site belge et sur Facebook.

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