Whirlpool Amiens, symbole d’une campagne de second tour qui commence sur les chapeaux de roues. La manufacture du géant de l’électroménager, condamnée à un plan social prochain, servait aujourd’hui d’arène politique à Marine Le Pen et Emmanuel Macron. Offrant aux électeurs un détonnant spectacle de communication politique.

La journée commençait mal pour Emmanuel Macron. Alors qu’il rencontrait des syndicalistes et employés de la région d’Amiens et de Whirlpool, Marine Le Pen profitait de l’absence du candidat dans les médias pour aller à la rencontre des ouvriers de la même entreprise sur le parking de l’usine. S’offrant ainsi des images d’une rare finesse politique, mêlée à la foule des futurs licenciés, la candidate du FN pouvait — à l’image au moins — enfin se targuer d’être la candidate du peuple.

Sur les chaînes d’information en direct, les images de la fille de Jean-Marie Le Pen sont éloquentes : elle est du côté de ceux qui perdent face à la mondialisation alors que M. Macron se retrouve en réunion avec des syndicalistes dans une salle proprette de la Chambre de Commerce et d’Industrie. Le fond ne compte plus dans la course trumpienne dans laquelle s’est lancée la candidate : ce qui compte, ce sont les images.

Or même si la démarche de rencontrer des employés pour évoquer une situation durant plus d’une heure semble plus légitime qu’une session de bain de foule sur un parking, Whirlpool est vite devenu un symbole. Un symbole à la portée politique très forte : en reprenant les habitudes de François Hollande durant la campagne de 2012, Le Pen se place dans une posture aux airs socialistes.

L’usine de sèche-linges avait de quoi devenir le Gandrange de Sarkozy, le premier clou sur le cercueil. L’écho qu’a eu cette visite sur les réseaux sociaux et dans l’actualité en est la preuve. Ce qui aurait été particulièrement ironique pour M. Macron qui avait organisé sa journée à Amiens et chez Whirlpool alors que Mme. Le Pen n’avait fait que passer moins d’une heure sur un parking en prenant son adversaire par surprise.

Ce qui compte, ce sont les images

L’échec de la communication d’En Marche était évident. La riposte ne devait pas tarder, au risque sinon de voir la situation s’enliser. Et si on pouvait redouter une riposte molle, les équipes du candidat ont trouvé une parade presque parfaite. Emmanuel Macron a surpris son monde en organisant une communication politique tout à fait inédite sous la Ve République. Peu avant 15h, il s’est rendu là où Marine Le Pen se trouvait plus tôt pour être également aux côtés des salariés. Néanmoins, fidèle à son tempérament bagarreur, le candidat a organisé une confrontation brute, non montée, en direct sur Facebook.

Tenant un micro, Macron s’approche des employés pour leur donner la parole, pour répondre : la cohue s’installe, la scène est fascinante et saisie par les caméras d’En Marche ! qui diffusent au même moment la scène sur Facebook. Le live réunit pas moins de 50 000 vues en moins d’une heure.

Et comme un symbole d’une époque qui s’éteint, les caméras des journalistes sont éloignées du candidat qui veut faire face, seul, aux Français. Jouant de son courage et du risque pris, mais également de l’instantanéité du web, en moins d’une heure, le candidat d’En Marche !  a court-circuité les chaînes de télé, a repris la main sur l’agenda médiatique et a offert un spectacle finalement très différent de celui de François Hollande en 2012 — ringardisant la pâle copie proposée par Marine Le Pen plus tôt dans la journée. Au point que l’événement, un candidat tendant un micro aux Français, a forcé les chaînes précédemment éloignées de la scène a diffuser sur leur canaux le live Facebook en lieu et place de leurs caméras professionnelles.

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En une heure, les caméras des reporters s’éteignaient pour laisser place à la communication purement numérique d’un candidat. Du jamais vu.


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