Le 11ème round de négociation de l’ACTA à Tokyo était bien le dernier. Le texte quasi final de l’accord a été publié, en attendant sa signature qui devrait intervenir avant la fin de l’année, après la suppression des quelques petites divergences restantes. Sous la pression publique, le chapitre Internet a été beaucoup dégonflé.

La députée européenne Sandrine Bélier (Europe Ecologie), très investie dans l’opposition parlementaire à l’Accord Commercial Anti-Contrefaçon, a publié jeudi le texte consolidé de l’ACTA (.pdf) issu des négociations de Tokyo. Il confirme que les discussions sont terminées, puisque la première page du document précise que « ce texte reflète le résultat du 11ème et dernier round de négociation tenu à Tokyo« .

Les négociations ne sont cependant pas totalement achevées. Il est aussi indiqué que « quelques délégations ont exprimé des réserves sur des parties spécifiques du texte, qui sont mises en évidence dans le texte par des soulignements et des lettres en italique« . La plupart du temps, les pays concernés ne sont pas identifiés.

Parmi les points de divergence restants, on remarque que les Etats-Unis ne souhaitent pas que la partie dédiée aux procédures judiciaires civiles s’applique aux brevets. Dans la partie pénale, une divergence persiste sur la condamnation du camcording, qui consiste à filmer les films dans les salles de cinéma. Le texte prévoit simplement que les parties « peuvent » prévoir des procédures pénales et des sanctions spécifiques, jusqu’à l’emprisonnement, alors que certains (probablement les Etats-Unis) souhaitent les rendre obligatoires.

Il y a en revanche un accord plein et entier sur le fait d’imposer des amendes et des peines d’emprisonnement « suffisamment élevées » contre le « piratage à une échelle commerciale« , y compris lorsque c’est réalisé sans but lucratif. Une mesure qui pourrait viser les échanges d’œuvres en P2P, notamment.

Le chapitre spécifique à Internet ne connaît pas beaucoup de divergences. Alors qu’il vise la protection des marques, des droits d’auteur et des droits voisins (producteurs, artistes interprètes…), certains souhaiteraient écarter les marques commerciales du champ d’application. Il y a aussi une réserve sur le fait de viser explicitement « l’utilisation illicite de réseaux de distribution massive à des fins de contrefaçon« , ce qui vise là encore le P2P et des sites comme The Pirate Bay.

Avec des prétentions revues à la baisse par rapport aux premières versions, le chapitre Internet de l’ACTA prévoit au final :

  • L’obligation de promouvoir des coopérations commerciales (contractuelles) dans la lutte contre la contrefaçon, mais dans le respect « des droits fondamentaux tels que la liberté d’expression, le droit à un procès équitable, et la vie privée« , et dans le respect de la concurrence loyale. Il peut s’agir ici de chercher à négocier la riposte graduée voire le filtrage par des accords entre les ayants droit et les FAI.
  • La faculté de donner à des autorités compétentes le pouvoir d’ordonner aux FAI qu’ils livrent aux ayants droit l’identité de leurs abonnés suspectés de piratage. Mais dans le cas où un Etat décidait de mettre en place un tel régime, comme en France, il aura l’obligation de veiller à ne pas « créer de barrière à des activités légitimes », et de respecter les droits fondamentaux déjà cités précédemment.
  • L’obligation de sanctionner le contournement des DRM, ou la mise sur le marché gratuite ou payante d’appareils ou de logiciels dédiés au contournement d’une mesure de protection. Ces dispositifs seront interdits s’ils sont faits spécialement pour, ou si leurs autres utilisations possibles n’ont qu’un « intérêt commercial limité ».
  • L’obligation de sanctionner la suppression de métadonnées (qui permettent d’identifier l’œuvre, ses ayants droit, les conditions d’utilisation autorisées, etc.), lorsque c’est fait en ayant conscience que ça peut conduire au piratage des œuvres.
  • La faculté pour les Etats de prévoir des exceptions légales aux cas de contournement des DRM et de suppression des métadonnées.

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